Le Président Macky Sall avait pourtant clos le débat en déclarant être dans une logique de faire deux mandats et de partir. Son ministre de la Justice aussi. Mais Ismaïla Madior Fall, même s’il n’a pas soulevé le débat sur un 3ème mandat, l’a quand même relancé par son «en principe» qui vaut une fenêtre d’interprétation.
«Pour moi, la Constitution est claire, mais j’ai entendu des professeurs de droit dire que, telles que les dispositions ont été rédigées, le Président peut faire un autre mandat. En principe, c’est le deuxième et dernier mandat. (…) A mon avis, les dispositions sont claires. D’autres ont donné leur avis en disant que les dispositions ne sont pas claires. Il appartient au président de la République d’apprécier.»
Dans son entretien avec le journal Enquête, le ministre de la Justice a jeté le trouble sur l’éventualité d’un 3ème mandat pour Macky Sall. Si la déclaration de Ismaïla Madior Fall tend vers un 2ème et dernier mandat, les expressions telles «en principe, c’est le deuxième et dernier mandat» ou encore «c’est au président de la République d’apprécier» alimentent la polémique. Pourtant, il était plus formel que cela.
Ismaïla Madior : «La Constitution ne laisse place à aucune interprétation»
Et curieusement, le Garde des sceaux semble avoir dilué son discours qui tranche avec ses déclarations d’avant la réélection de Macky Sall. En effet, deux constitutionnalistes relevaient en octobre 2017 l’absence de dispositions transitoires mentionnant que le premier septennat était le premier de Macky Sall. Par conséquent, Jacques Mariel Nzouankeu et Babacar Guèye avaient conclu qu’un 3ème mandat était «juridiquement possible» en 2024 pour le Président qui cherchait un second mandat. Et là aussi, le ministre de la Justice avait tenu à clore le débat. «Vous savez que la Constitution du Sénégal est très claire sur la question et ne laisse place à aucune interprétation. L’article 27 de la Constitution dit clairement que “le président de la République est élu pour un mandat de 5 ans renouvelable une fois”. Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs», contre-attaquait Ismaïla Madior Fall. Et le concerné lui-même a fermé à double tour cette porte ouverte à toutes les conjectures.
Macky Sall : «Après le quinquennat, il faudra partir»
A l’époque, ce débat s’était même invité à la visite du Président Roch Marc Christian Kaboré au Sénégal. Devant son homologue burkinabè, Macky Sall s’était montré plus ou moins ferme : «Nous devons être très sérieux dans ce pays lorsque nous voulons apporter une contribution positive à la marche de notre pays. Cette question a été définitivement fixée par la Constitution. Le nombre de mandats, c’est réglé depuis très longtemps. Pourquoi engager une réflexion sur un débat de 2024 ? Ce débat ne doit pas nous faire perdre du temps (…). Je reste dans la logique de ne pas dépasser les 2 mandats si le Peuple sénégalais me fait confiance», déclarait le président de la République. Et lors de son entretien avec la presse le 31 décembre 2018, le Président sortant concluait : «J’ai mis dans la Constitution que nul ne peut faire plus de 2 mandats. Donc, si je suis réélu, c’est la somme de 7 ans et 5 ans. Après, il faudra partir. Je suis dans cette logique.» Sauf que son conseiller en chef en matière constitutionnelle indique que c’est au Président Sall d’apprécier.