Hizbut Tarkqiyyah, mouvement mouride : Atou de Diagne

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A Touba et dans plusieurs villes, il règne sur un patrimoine colossal : Ce sont des stations d’essence, des écoles, des boulangeries, une chaîne de télévision et une imprimerie. Le mouvement Hizbut Tarkqiyyah, qui fête cette année ses 40 ans, a connu une croissance exponentielle avant de vivre aussi des moments de crise. Président du mouvement à ses débuts, Serigne Atou Diagne reste une constante que les contestations n’ont pas réussi à transformer en variable. Mais son mouvement s’essouffle.

Il a 40 ans. Depuis 1975, le mouvement Hizbut Tarkqiyyah se fond dans le mouridisme. Ses talibés se distinguent par leurs habits encombrants. Même en pleine chaleur, ils trimbalent leurs longs draps pour afficher leur fierté. Sous leurs pieds, de grandes babouches, et sur leur tête, ils rehaussent leurs tenues d’un grand bonnet. Un chapelet orne tout le temps leurs mains, alors que leurs yeux ne quittent pas le livret sacré de khassaïdes. Repus au travail, ils se réfèrent au fondateur du mouridisme Cheikh Ahmadou Bamba. Ils se vêtent, se comportent comme lui. La plupart d’entre eux viennent du centre du Sénégal, Diourbel, Mbacké, Touba, précisément le fief des mourides. Baol-Baol bon teint, ces messieurs sont aussi connus sous le nom de Hizbut Tarkqiyyah.

De la naissance à nos jours : les dates charnières
Né en 1975 au sein de l’Université Cheikh Anta Diop, le Hizbut Tarkqiyyah a vu son acte de naissance officielle délivré en février 1976 par le troisième Khalife général des mourides, Cheikh Abdou Lahad Mbacké. Créé au sein du campus universitaire par un groupe d’étudiants Hizbut Tarkqiy­yah, il était alors connu sous l’appellation de Dahira des étudiants mourides. «Nos aînés avaient senti un vide dans leur personnalité musulmane. Dans leur cursus scolaire, du cycle primaire au niveau académique, rien n’a été prévu pour consolider les acquis sur le plan religieux. Ils avaient senti dans leur cœur la nécessité d’une éducation religieuse. Etre né dans une famille musulmane, avoir suivi un cursus scolaire et ne pas connaître sa religion.» Serigne Atou Diagne, président-fondateur du Dahira des étudiants mourides, voulait combler ce vide. A l’époque, rappelle Serigne Atou, les Français avaient laissé une politique d’assimilation culturelle pour changer la façon de penser et le comportement des jeunes. Prenant conscience de cela, ces jeunes ont alors décidé de prendre leur destin en main. Ils se retrouvèrent pour créer un cadre leur permettant de sauvegarder les valeurs qu’ils ont acquises dès le bas âge. Entre des rencontres dans les chambres d’étudiants, des thé-débats, des échanges, naît une fraternité entre les membres d’une même confrérie.
De 1976 à 1981, il y eut un phénomène de civilisation. A cette période, le dahira n’avait pas encore un lieu permanent pour accueillir ses membres. C’est à partir 1981 que le premier siège du dahira fut créé à Sicap Rue 10. «C’était en dehors du campus social universitaire parce que les franchises universitaires ne nous permettaient pas de créer un siège au sein de l’université. On s’est efforcé de répondre aux chartes universitaires…», indique M. Diagne. Il ajoute : «Les membres payaient ainsi 20 mille francs pour la location et c’était difficile de rassembler une somme pareille à l’époque. Ils conjuguaient leurs efforts et y arrivaient à peine. C’était comme le budget de la Primature.» Les années folles ont duré jusqu’en 1989. Il y a eu des mutations profondes au sein du dahira qui est devenu un cadre de référence. «Les activités marchaient très bien. On s’est donné corps et âme pour consolider les acquis. Le dahira a commencé à accueillir des activités qui ont accéléré la transformation qualitative des membres. Certains avaient commencé à lire le Coran alors qu’ils n’étaient même pas alphabétisés. C’était un lieu où l’on pouvait apprendre des khassaïdes, le Coran et l’enseignement des préceptes islamiques», savoure-t-il. Le dahira commença son expansion et le développement des activités avait fait naître la nécessité de la mise en place d’un cadre plus harmonieux et plus grand. En 1989, il décide de sortir de la Sicap Rue 10 pour se déployer dans un cadre qui colle à leurs ambitions. De 1989 à 1991, le dahira poursuit son plein essor au niveau national. Ayant décroché leur maîtrise, les initiateurs du mouvement rejoignent l’Ecole normale supérieure (actuelle Fastef) et d’autres acquièrent du job dans d’autres secteurs dans la vie courante. Ceux qui ont rejoint leurs postes à l’intérieur du pays créent des cellules affiliées à la direction du Dahira des étudiants mourides. On assistait ainsi a l’implantation des premières antennes de l’association à l’intérieur du pays et ensuite en Afrique (Mali, Gambie, Côte d’Ivoire, Mauritanie, Afrique du Sud, Maroc, …), en Europe (France, Norvège, Espagne, Italie, Allemagne…), et en Amérique (New York, Californie, Atlanta, Chicago, Amérique du Sud, Brésil…).  C’est le grand boom. «La gestion des membres fut alors informatisée et automatisée. En 1992, on ne l’appelait plus Dahira des étudiants mourides, mais Hizbut Tarkqiyyah, un nom donné par Cheikh Saliou Mbacké alors khalife général des mourides. En 1995, le siège de la direction générale des Hizbut Tarkqiyyah qui était à Dakar fut déplacé et implanté à Touba (sur la route de Belel derrière les Hlm). De 1995 à nos jours, on ne cesse d’assister au développement fulgurant des activités de Hizbut Tarkqiyyah», explique l’éternel patron du mouvement.

Réalisations du mouvement Hizbut Tarkqiyyah
Après 40 ans de vie, le mouvement Hizbut Tarkqiyyah est riche d’un vaste patrimoine entièrement voué à l’éducation conformément aux enseignements de Cheikh Ahmadou Bamba et à l’islam, à la formation professionnelle. A Dakar, Touba et Kaolack, les Hizbut ont ouvert des groupes scolaires allant du préscolaire, élémentaire et moyen. Un Institut international d’études et de recherches sur le mouridisme (Iierm) qui reçoit chaque année des chercheurs venant du Sénégal et du monde entier. Les Hizbut Tarkqiyyah promeuvent aussi l’expertise locale en créant des cadres d’excellence et des espaces culturels pour la formation des ados, des hommes et des femmes. A Touba par exemple, ils ont un atelier de formation professionnelle en menuiserie métallique, bois, en électricité et travaux en génie civil. Dans la vallée du fleuve Sénégal, les Hizbut détiennent des exploitations agricoles et participent à la production et à la consommation locale du riz et du mil. C’est tout un patrimoine. Dans la communication, les Hizbut ont développé leur propre chaîne Tv sur Ip et radio. Il faudrait dire que la société Hizbut Tarkqiyyah est une force motrice au Sénégal. Mais elle a connu une scission en 2010 : C’est la naissance du Hizbut Tarkqiyyah Darou Khoudoss. Il commence à perdre de sa splendeur.

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