La crise en Gambie résulte en réalité d’une seule et unique cause, l’impréparation des différents protagonistes à la situation actuelle.
De la CEDEAO qui avait vu ses observateurs boutés hors du territoire Gambien, aux Chefs d’Etat des pays de la sous – région, à la communauté internationale, en passant par le Président Jammeh lui – même et le candidat déclaré vainqueur Barrow, personne n’a prévu la défaite de Yaya. Et de fait, personne ne s’est préparé à la bonne réaction face à cette état de fait plein d’imprévues.
Le Président Jammeh fut le premier à être surpris par sa défaite. Après 22 ans de pouvoir sans partage, tenant en mains tous les leviers de l’Etat, dont le système électoral, il était tellement sûr de sa victoire qu’il avait oublié de mettre en place la Cour Suprême, pensant que, comme les dernières fois, ses membres seraient réactivés pour venir l’installer et repartir après ce qui semblait pour lui une formalité. Son principal opposant étant en prison, il n’avait pas vu à l’horizon, ce candidat sorti de nulle part, qu’il ne connaissait même pas bien et qu’il considérait comme quantité négligeable sur l’échiquier politique. Leurs échanges à la télé le prouvent, il lui demandait son âge, ce qui laisse supposer que ses services n’avaient pas travaillé sur lui.
La CEDEAO fut elle – même surprise par la tournure de l’élection. Elle avait encore préparé ses communiqués pour désavouer la non – transparence de cette élection et élever quelques notes de protestations face au flou dont on dit que cette joute a été empreinte en cas de victoire de Jammeh.
La communauté Internationale, avec en son sein, les organisations des droits de l’homme, qui n’avaient même pas osé mettre pied en Gambie et les quelques journalistes présents, envoyés spéciaux, s’attendaient tous à la réélection de Jammeh. Ceci était possible, parce que la Gambie avait été isolée du monde par la coupure d’internet et l’interdiction faite aux médias nationaux de relayer les informations sur le scrutin. Il faut le dire, à moins de jouer aux voyants, peu pouvait croire à la défaite du candidat Jammeh.
Ceci étant, face à une telle situation de surprise, il ne faudrait pas prendre des décisions hâtives. Puisque tout le monde a été surpris, on a voulu profiter de la maladresse du Pdt Jammeh, qui s’est ressaisi entre – temps pour enclencher la marche arrière, pour l’acculer. Ce n’est pas la bonne solution. A cette situation imprévue, il faudra des réglages intelligents et réalistes pour amener tout un chacun à la raison.
Les délais étant courts, la Cour Suprême, elle – même, surprise, donc, matériellement empêchée de dire le Droit. Yaya Jammeh, groggy, ne sachant à quel destin se vouer. La CEDEAO emportée par son élan, et la communauté internationale impréparée, il faut travailler à une transition qui permettrait de faire tous les réglages qui garantiraient une passation de pouvoir dans la paix. Nous ne cesserons de donner l’exemple pédagogique de La RDC, d’ailleurs, les organisations comme la CEDEAO ou l’ONU, devraient largement s’inspirer de ses mécanismes locaux de règlements des conflits comme la CENCO qui a brillamment réussi à imposer la Paix aux protagonistes Congolais et à faire éviter des milliers de morts.
Il est plus que temps pour nos chefs religieux de s’impliquer au grand jour dans une solution de paix en Gambie. Une guerre en Gambie est une guerre civile au Sénégal, la Gambie étant une région du Sénégal, géographiquement parlant. La première déflagration qu’on entendra en Gambie, sera entendue au Sénégal. Un mort Gambien est un mort Sénégalais. Gambiens et Sénégalais sont un même peuple. Et cela, nos chefs religieux le savent, car, ils ont leurs fidèles disséminés à travers tout le territoire Sénégambien. Ils ont donc un devoir d’agir pour la Paix.
Que le Président Jammeh reste quelques mois de plus, le temps à la CEDEAO de mettre en place les mécanismes de son départ, vaut largement la Paix. Et cela donnera du temps aux forces de la Paix de se mettre en place et de faire leur travail de médiation et de trouver des solutions médianes à cette crise qui a plus de chances d’aboutir dans la paix, que dans la guerre.
Une transition permettra au Président Jammeh de préparer son départ, lui qui sort affaibli de cette crise, ne pourra représenter un danger que pour lui – même. La transition lui permettra de trouver une voie de sortie honorable.
Quant aux Chefs d’Etat et à l’organisme régional qu’est la CEDEAO, ça leur permettra d’expérimenter une voie de règlement des conflits inédite dans la sous – région et de retenir la leçon non sue des guerres basées sur des principes intangibles et d’éviter à jamais de régler les problèmes politiques par les armes.
Entre 1960 et les années 80, des Etats se sont affrontés au nom de l’intangibilité des frontières, faisant des milliers de morts et hypothéquant leur développement, aujourdhui, ces mêmes Etats tentent de gommer ces frontières par l’intégration. Il nous faut quand même profiter de nos erreurs.
La crise Gambienne doit être le premier laboratoire d’expérimentation des mécanismes traditionnels de recherches de la Paix.
Une transition ne tuera personne et permettra de mettre en place de nouveaux outils démocratiques.
Ndao Badou le Médiateur
Fondateur de l’Armée de la Paix
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