Après vingt années d’une coopération économique Chine-Afrique particulièrement dynamique et porteuse d’espoir pour le continent, le Forum sur la coopération sino-africaine (Focac) qui s’est ouvert ce dimanche 28 novembre à Dakar devrait marquer le pas sur les précédentes éditions.
Dettes, développements de projets bénéficiant aux communautés limités, échanges commerciaux déséquilibrés, droit du travail et de l’environnement pas toujours respectés… Sur le terrain, les espoirs mis dans l’engagement chinois n’ont pas été entièrement comblés. A l’exemple du contrat du siècle en RDC qui devait permettre en contrepartie la construction de nombreuses infrastructures qui n’ont pas vu le jour.
Dans un livre blanc publié quelques jours avant ce sommet, les autorités chinoises détaillent leurs actions et leurs ambitions en Afrique. Elles parlent d’une « nouvelle ère » fondée sur l’égalité.
Parmi les termes employés afin de caractériser cette relation : « Sincérité, résultats réels, amitié et bonne foi ». Un lexique qui répond peut-être aux signaux de frustrations qui sont apparus ces dernières années dans certains pays où des manifestations et des incidents contre des citoyens chinois ont pu avoir lieu.
A l’arrivée aujourd’hui il y a une dose d’inquiétude, d’angoisse, parce que la Chine commence à demander le remboursement de ces prêts et dans certains cas, on n’a pas nécessairement vu ces grandes infrastructures voir le jour. Les pays africains commencent à se poser des questions dans cette relation.
Pékin ne lésine donc pas sur les effets d’annonces et la communication. La Chine, qui a envoyé son ministre du Commerce Wang Wentao et son ministre des Affaires étrangères Wang Yi, à Dakar, investit principalement dans les domaines de l’industrie, des mines, de la construction et des transports. Fin 2020, selon les autorités chinoises, 43 milliards de dollars auraient été injectés sur le continent via des entreprises chinoises. 3 500 se seraient implantées. Les entreprises chinoises ont construit ou modernisé plus de 10 000 kilomètres de chemin de fer et près de 100 000 kilomètres de routes en Afrique rappelait le porte-parole de la diplomatie chinoise vendredi.
Sur la question de la dette, les chiffres varient et il est difficile de connaître l’ampleur exacte des créances des Etats africains. Entre 2000 et 2019, la Chine aurait prêté aux pays du continent 153 milliards d’euros selon la China africa research initiative. Mais cette créance est très variable d’un Etat à l’autre. L’Angola à lui seul cumule 30% de cette dette. Depuis 2016, les montants des prêts sont en baisse. Et ces derniers mois, la Chine a accepté d’effacer ou de réévaluer la dette de certains Etats.
Cependant de nombreux observateurs évoquent le « piège de la dette chinoise » et brandissent la menace de la saisie d’infrastructures. La semaine dernière, la rumeur de la saisie possible de l’aéroport ougandais a agité les réseaux. Sur Twitter l’ambassade de Chine à Kampala interroge : « Quels projets chinois en Afrique ont été confisqués ? AUCUN ! », assure-t-elle.
Mais compte tenu du poids de la dette de certains Etats, les prêteurs chinois ont de toute façon une approche plus sélective des projets. La taille et le montant des investissements dans les nouvelles routes de la soie seront « ajustés » comme disent les diplomates en fonction des risques et de la viabilité des différentes propositions avancées.
Le statut de cette conférence dite « ministérielle » et non de sommet de chefs d’Etat – comme dans les éditions précédentes – symbolise d’une certaine façon une possible inflexion dans ces relations.
Parmi les priorités qui seront mises en avant lors de ce rendez-vous : la coopération dans le domaine des services de soins, la lutte contre la Covid-19. Autre point toujours évoqué par Pékin : les Nouvelles routes de la soie. La coopération de la Chine sur le continent est très dynamique. 19% des échanges commerciaux de l’Afrique ont lieu avec la Chine.