La Palestine avait été la grande oubliée des débats lors de cette Assemblée générale de l’ONU, occultée au profit de la crise syrienne et de la lutte contre l’Etat islamique. Ni Barack Obama ni François Hollande n’auront fait la moindre allusion au conflit israélo-palestinien dans leur discours respectif. Mais il aura suffi d’une petite phrase de Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, pour remobiliser la communauté internationale sur ce conflit : « Nous ne sommes plus liés à ces accords [sous-entendu les accords d’Oslo]. Notre patience est arrivée à bout. »Lire aussi : Pour Mahmoud Abbas, la Palestine n’est plus tenue par les accords d’Oslo
Simple menace ou annonce coup de poing ? La portée de la déclaration du Raïs palestinien laisse la place à la spéculation : se retirer des accords d’Oslo implique la dissolution de l’Autorité palestinienne créée en 1994 pour pouvoir les appliquer. Mahmoud Abbas n’a pas pour autant annoncé sa démission et n’a finalement fait que répéter ce que l’Autorité palestinienne affirme depuis plusieurs années déjà : ces accords ne peuvent pas s’appliquer tant qu’Israël soutiendra les colonies de peuplement en Cisjordanie et refusera de libérer les prisonniers palestiniens.
« Nous ne pouvons pas continuer à être liés par ces accords et Israël doit assumer toutes ses responsabilités de puissance occupante », a-t-il annoncé à la fin de son discours, qui a duré près de quarante minutes.
La délégation israélienne, qui assistait à son allocution dans l’hémicycle de l’Assemblée générale, n’a marqué aucune réaction, et des officiels du gouvernement israélien seraient en train d’analyser le discours de M. Abbas et ses effets pratiques sur le terrain en termes de coopération sécuritaire et économique avec Israël.
Raïs vieillissant de 80 ans et contesté, Mahmoud Abbas est en proie à une frustration grandissante dans les territoires palestiniens alors que le processus de paix tourne à vide depuis l’échec d’une médiation américaine au printemps 2014, que la situation humanitaire s’aggrave avec le blocus de la bande de Gaza et que les tensions sont vives sur l’esplanade des Mosquées à Jérusalem-Est, où des heurts entre jeunes Palestiniens et policiers israéliens se multiplient depuis plusieurs semaines. Le recours « à la force brutale » par Israël sur ce lieu saint « pourrait transformer ce conflit politique en conflit religieux », a encore prévenu Mahmoud Abbas.
Les Palestiniens avaient aussi espéré voir aboutir une initiative française au Conseil de sécurité de l’ONU pour la reconnaissance de leur Etat. Ce projet de résolution fixait les paramètres des négociations entre Israël et la Palestine ainsi qu’une date butoir à dix-huit mois pour parvenir à un accord. L’initiative française est passée aux oubliettes devant le peu d’empressement des Américains à voir aboutir un accord alors que la campagne présidentielle débute et que l’électorat juif américain est très courtisé.
Le drapeau rouge, blanc, noir et vert comme lot de consolation
Maigre lot de consolation, les Palestiniens ont eu le droit de hisser leur drapeau rouge, blanc, noir et vert sur le parvis des Nations unies juste après le discours du président Mahmoud Abbas. L’Assemblée générale avait voté le 10 septembre dernier une résolution qui autorise dorénavant les états observateurs de l’ONU (Vatican et Palestine) à hisser leurs couleurs au même titre que les 193 Etats membres.
Les quelques « youyous » et applaudissements n’ont pas réussi à masquer l’absence de ferveur qui entourait cette cérémonie. Même le vent manquait pour faire flotter fièrement ce drapeau devant les nombreuses caméras et appareils photo qui enregistraient cet événement symbolique. 300 personnes, diplomates, journalistes et membres de gouvernement, dont le ministre des affaires étrangères français Laurent Fabius, avaient fait le déplacement.
« Les symboles sont importants. Ils peuvent mener à l’action », a estimé le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon. « Nous ne pouvons en aucun cas nous imaginer que cette cérémonie marque la fin du parcours. »