Les services de renseignement britanniques ont affirmé, vendredi 17 mars, ne pas avoir surveillé le candidat républicain.
C’est un événement rare : les services de renseignement extérieurs britanniques, le puissant Government Communications Headquarters (GCHQ), ont publiquement démenti, vendredi 17 mars, avoir mis sur écoute l’actuel président américain alors qu’il était candidat. Donald Trump avait publiquement accusé, le 4 mars, son prédécesseur, Barack Obama, d’avoir mis son quartier général, la tour Trump à New York, sur écoute téléphonique. Comme tous leurs homologues, les services britanniques refusent dans la quasi-totalité des cas de commenter leurs activités.
D’où viennent ces accusations ?
Donald Trump n’a pas précisé sur quelles informations il se basait pour accuser son prédécesseur. Mais comme le note la presse américaine, plusieurs articles évoquant une mise sur écoute de la tour Trump avaient été publiés les jours précédents sur des sites d’extrême droite, dont Breitbart, qui a fait campagne pour Donald Trump, et plusieurs sites conspirationnistes.
En résumé, la théorie évoquée par ces articles s’appuyait sur les enquêtes ouvertes par le ministère de la justice sur les relations présumées entre l’équipe de campagne de Donald Trump et des hommes d’affaires ou des intermédiaires russes. Quatre mois avant l’élection, le ministère de la justice avait tenté d’obtenir un mandat auprès du Foreign Intelligence Surveillance Ac Tribunal (FISA – Tribunal fédéral relatif au renseignement étrange), qui encadre les écoutes et mises sous surveillance de manière confidentielle.
Après avoir rejeté une première fois la demande de mandat – un cas très rare pour ce tribunal qui valide l’écrasante majorité des demandes –, il a fini par accorder un mandat à la mi-octobre, selon la presse anglo-saxonne. Mais les discussions de l’instance étant par nature secrète, il est impossible d’affirmer qui a précisément pu être mis sur écoute, où, et dans quelles conditions.
Quelles sont les preuves avancées par M. Trump ?
Il n’y en a pas. Après avoir publié plusieurs messages sur Twitter accusant Barack Obama, le président des Etats-Unis s’est refusé à détailler ses accusations. M. Trump a promis qu’il présenterait « très bientôt » des preuves de ses accusations à la commission parlementaire sur le renseignement. Mais depuis dix jours lorsque M. Trump ou ses porte-parole ont été interrogés sur le sujet, ils ont répondu de manière très évasive.
« Le président a utilisé les mots “mise sur écoute” dans un sens large. Il parlait de surveillance et d’autres activités », a déclaré Sean Spicer, le responsable de la communication de la Maison Blanche. Interrogé sur Fox News, Donald Trump lui-même a expliqué qu’il voulait parler de « surveillance et de bien d’autres choses ».
Que viennent faire les services britanniques dans cette affaire ?
Aux Etats-Unis, les règles encadrant la surveillance des citoyens sont beaucoup plus strictes que celles encadrant la surveillance des étrangers. Les documents internes de la NSA, révélés par le lanceur d’alerte Edward Snowden, ont notamment montré que l’agence de renseignement avait fréquemment recours aux services d’agences partenaires pour procéder à des surveillances d’Américains. Le GCHQ britannique a ainsi été mis à contribution par le passé pour procéder à des surveillances pour le compte de la NSA, tout comme l’inverse. Mais la mise sur écoute d’un citoyen états-unien, qu’elle soit faite par une agence américaine ou étrangère, nécessite toujours, au moins en théorie, un mandat judiciaire aux Etats-Unis.
Cela n’a pas empêché des partisans de Donald Trump, dont un commentateur de Fox News et son porte-parole Sean Spicer, d’affirmer que les services américains avaient probablement sous-traité la surveillance du candidat à leurs homologues britanniques. Ce qu’a démenti l’agence, le 17 mars, qualifiant ces soupçons de « totalement ridicules ».
Que disent les services de renseignement américain ?
La commission du renseignement du Parlement américain s’est également penchée sur ces accusations. Le 15 mars, lors d’une conférence de presse, le président de cette commission a affirmé que les députés n’avaient « vu aucune preuve qu’il y ait bien eu une mise sur écoute de la tour Trump ».
Par ailleurs, les spécialistes du renseignement américain notent que dans le cas où la tour Trump aurait bien été mise sur écoute, cela ne signifie pas automatiquement que Donald Trump l’ait été. La moitié de la tour, qui compte cinquante-huit étages, est en effet occupée par des bureaux loués à diverses sociétés ou à des particuliers qui auraient pu être ciblés par le mandat du tribunal FISA – mais le secret des délibérations de cette cour empêche de le savoir.
Le Monde