De l’urgence de sauver Air Sénégal de sa douloureuse agonie ( Par Papa Ibrahima Diassé)

Papa Ibrahima Diassé

C’est fini le « Tog mouy Dox !

Air Sénégal serait le parfait endroit pour l’expérimentation et l’application de cette nouvelle doctrine du gouvernement Diomaye-Sonko.

Au seuil d’une nouvelle ère prometteuse, le Sénégal emprunte avec beaucoup d’espoir, les sillons d’un changement de paradigme radical dans sa bonne gouvernance.  Affichant audace et témérité, les nouveaux dirigeants du pays, ont décliné sans attendre, leur ambition et prouver par leurs premiers actes posés, une volonté politique réelle de transformation qualitative de l’économie du pays. De la présidence à la nomenclature des départements ministériels mis en place en passant par la primature, les pièces du puzzle de la nouvelle administration se dessinent dans la rigueur, la transparence et la fermeté. Avec beaucoup de maîtrise, rien ne semble les distraire de cette dynamique de travail. C’est d’ailleurs là, la raison qui a attiré notre attention, car si l’ensemble des éléments constitutifs du dispositif de l’État et de la nouvelle administration prend forme au fur et à mesure, il urge de faire noter que la situation des structures composant l’écosystème du transport aérien est en grand danger et, en particulier Air Sénégal, la compagnie nationale est en effet dans une position « d’agonie » malgré des centaines de milliards du contribuable investis dans ce projet structurant pour l’attractivité du Sénégal. 

Depuis octobre 2022, suite au plan de relance validé par l’État du Sénégal, plus de quatre-vingt milliards de francs CFA ont été versés à Air Sénégal avec comme objectif d’atteindre l’équilibre en décembre 2023. La réalité du moment est toute autre, Air Sénégal affiche un déficit cumulé de plus de cent milliards (100 milliards). De la gestion catastrophique du DG (Directeur Général… NDLR) avec des abus de biens sociaux et un enrichissement illicite, de l’absence de leadership du DG, en passant par un département des ressources humaines au solde de tous les actes frappés d’illégalité et de d’illicéité du DG, et par une direction commerciale et marketing sans compétences incapables de définir une politique et un réseau structuré, et des services au sol (Maintenance et escale) déstructurés, des salariés démotivés, opprimés, harcelés et inquiets de leur avenir…..-la liste est longue-, tous les indicateurs sur la compagnie nationale sont au ROUGE. Le vent du renouveau et de l’espoir qui souffle depuis quelques semaines  au Sénégal doit toucher et, RAPIDEMENT, le secteur névralgique et structurant du transport aérien et en priorité Air Sénégal SA qui est en balbutiement perpétuel et dans une profonde turbulence du fait d’un management chaotique. 

Que se passe-t-il à Air Sénégal ?

Les dirigeants d’Air Sénégal pour ne pas les nommer, complètement en déphasage avec la nouvelle signature de l’État, basée sur une dynamique de rigueur sous tendue par une gestion transparente axée sur le résultat, campent sur leurs anciennes méthodes peu orthodoxes, tant décriées et dénoncées. Des sources proches de la direction affirment que le DG, Alioune Badara FALL ne dort plus depuis l’accession de Bassirou Diomaye Faye  à la magistrature suprême et la nomination de Ousmane SONKO à la primature.

Il semblerait que les premiers actes de gouvernance, éclairés et transparents du Président de la République et du Premier Ministre ne soient pas de son goût. Lui qui est adepte de mauvaise gestion et qui, de jour en jour, enfonce dans le trou de l’agonie, le pavillon national par son inaptitude notoire et ses nombreux actes d’enrichissement sans cause. Malheureusement employés, passagers, partenaires et même l’État vont devoir le temps qu’il restera au poste, souffrir. Souffrir parce que le DG d’Air Sénégal ne dispose pas de vision stratégique pour faire tourner le moteur de la compagnie et faire rayonner celle-ci en Afrique.

Une flotte amputée, décimée !

A ce jour, seuls deux avions de la flotte sont opérationnels (l’A330 Néo nommée « Sine-Saloum » immatriculé 6-ANB et le A321 immatriculé 6V-AMC). L’un des 2 ATR immatriculé 6V-AMS est loué à Cabo Verde Airlines qui l’utilise pour ses dessertes dans les iles du Cap-Vert. Dans le même temps, Air Sénégal affrète la compagnie aérienne TRANSAIR pour effectuer ses vols entre Dakar et Saint-Louis. Quelle incohérence ! Comment une jeune compagnie avec une si petite flotte peut se permettre de mettre en location ses appareils acquis en achat et de les mettre en vente sans pouvoir justifier de l’opportunité d’une telle décision ? Le deuxième avion gros porteur l’A330 Néo dénommé « Casamance » quant à elle, prend la poussière et le soleil sur le tarmac de l’aéroport International Blaise DIAGNE de DIASS  depuis plusieurs mois pour défaut de moteurs, Air Sénégal connaissant des difficultés de trésorerie pour payer les nouveaux moteurs. Le cout des affrètements d’avions impacte aussi négativement sur la situation financière de la compagnie avec des contrats ACMI avec HIFLY pour effectuer les vols sur New York et couvrir les vols vers Paris les jours où le seul A330 opérationnel effectue la destination vers JEDDAH. Les pertes se chiffrent ainsi à plusieurs milliards par mois.

 De l’absence d’une stratégie réseau

Air Sénégal aujourd’hui ne dispose pas d’une stratégie réseau claire basée sur un modèle réfléchi et soutenable en intégrant ses capacités opérationnelles. Comment comprendre dans un contexte de grandes difficultés financières avec perfusion de l’Etat, que le DG décide d’ouvrir une nouvelle destination JEDDAH avec des remplissages très faibles, de maintenir la ligne Dakar-New-York avec d’énormes pertes, de supprimer les lignes Milan, Marseille, Lyon, Barcelone ? Après la fermeture de ces destinations vers l’Europe du Sud, les compagnies concurrentes ont immédiatement augmenté leurs fréquences sur Dakar, ce qui témoigne du potentiel passagers sur ces lignes.

Dans un communiqué récent, Air Sénégal a à nouveau décidé de rouvrir ces lignes à compter du mois de juin. Quelle cacophonie ! Les passagers, les salariés, de même que tous les experts, se perdent dans ce yoyo entre ouverture, fermeture, réouverture et les nombreuses conséquences qui en découlent en terme de notoriété. Changement d’organigramme au lendemain de l’élection présidentielle et recrutements pléthoriques. Si rien n’est fait, le gouvernement risque de se heurter à la première grande déception de son régime et voir s’arrêter d’un cran, le sentiment de progrès décliné et vendu aux Sénégalais. Il faut dire que  le pavillon national file droit vers la faillite en effet. Chaque nouveau soleil apporte un lot de scandales dans cette boite, minée par le népotisme, l’amateurisme, le copinage et la gabegie. 

Le 25 mars 2024, au lendemain de l’élection présidentielle, le DG a illico presto fait un nouvel organigramme dénudé de sens et, qui promeut ses fidèles « béni OUI OUI » qui valident toutes ses décisions empreintes d’irrégularités et non-conformes notamment le Directeur de l’ administration générale et support , Hanne Samba SALL qui s’approprie les RH, la responsable juridique promue Directrice juridique, la scission de la Direction commerciale et Marketing en deux directions après l’avoir fusionnée à sa nomination en juillet 2022, la nomination comme Directeur des Opérations aériennes (DOA) de son ami le Commandant THIOR après avoir éjecté, sans raison valable, le rigoureux et expérimenté Commandant GUEYE dont le tort a été d’avoir refusé le paiement indu d’honoraires de prestations de Pilote réclamés par le DG en sus de son salaire. Il reprocherait aussi au Commandant GUEYE de n’avoir pas accéléré son vœu ardent de passer commandant de bord après plus de trente ans comme officier pilote de ligne. Beaucoup de nominations à tout-va à des postes de hautes responsabilités sont faites pour des personnes qui n’ont pas le niveau de compétences requis. Leur seul mérite : être proche du super puissant « maréchal » qui fait et défait selon ses humeurs et le degré de soumissions.

Faudrait-il noter que les recrutements inopportuns de navigants et au sol se poursuivent en mode « fast-track » pour caser des connaissances pendant que  l’activité connait une baisse suite aux suppressions de plusieurs lignes et réduction de fréquences. Pour ce faire, contre toute logique, le DG décide d’ouvrir des agences dans les régions (Mbour/Saly, Thies, Touba etc…) ce qui augmentera drastiquement les charges fixes avec des recrutements et les charges d’exploitation (bail, véhicule, électricité, téléphone, gardiennage, internet et vidéosurveillance etc….). La réalité du marché, de même que les tendances actuelles dans l’ère du digital, auraient accepté une décision allant dans le sens de mettre en place une politique digitale pour faciliter l’achat de billets aux passagers en développant des plateformes sécurisées et optimales en temps.

Tous les recrutements se font dans des conditions nébuleuses et sans aucun processus transparent. Le récent recrutement du Directeur commercial, un marocain, en est une parfaite illustration. Les salariés y compris l’équipe des ressources humaines ont su ce recrutement qu’à son arrivée. Au moment où, il charge la masse salariale, il met aux placards des salariés, cadres qui auraient pu occuper ce poste (pour exemple, l’ancien Directeur commercial et marketing est au frigo depuis deux ans). Au rythme où évoluent les choses, les travailleurs risquent même d’être sevrés subitement de salaires car l’état financier de la boite est catastrophique avec une situation de trésorerie tendue.

L’absence de leadership et un style de management autoritaire

Dans un autre régistre, le système de management autoritaire du DG Alioune Badara FALL porte un réel préjudice à la productivité des employés de Air Sénégal. Il les divise pour mieux régner, optant de fait, pour une interaction et une communication descendantes.  Il concentre les pouvoirs sur lui et les cadres sont réduits à de simples exécutants. L’absence de leadership du DG s’illustre aussi par la non-tenue de manière récurrente comme un rituel de réunions hebdomadaires de CODIR (Comité directeur) pour partager et échanger de manière constructive avec ses directeurs qui auront la charge de cascader toutes les décisions issues de cette instance. Le management moderne n’est qu’un art relationnel avec une capacité à décliner une vision, motiver et inspirer ses collaborateurs et faire preuve d’exemplarité dans ses attitudes et comportements et de bâtir un environnement propice à la performance sur la base de valeurs qui constitueront l’ADN de la compagnie.

Le scanning social d’Air Sénégal révèle un cadre de travail peu épanouissant et un climat social suffoquant et toxique, comme en témoignent beaucoup des employés avec qui nous nous sommes entretenus et qui désignent sans trembler le DG et ses affidés les directeurs commercial et marketing, le directeur support qui fait office de DRH, la responsable juridique, le DOA comme les principaux responsables. Ses confusions nombreuses et ses changements d’humeurs guidés par sa pratique de direction abusive avec des faits comme le harcèlement sont souvent décriés. Le DG règne en « empereur » surtout avec l’absence de délégués du personnel que la Direction appuyée par son directeur administration générale et support feint de ne pas organiser pour une entreprise d’un effectif de plus de cinq cent salariés. Le DG met de ce fait Air Sénégal en situation d’irrégularité vis-à-vis de la législation du travail. Le niveau de motivation des salariés reste ainsi très bas entraînant une inhibition totale de toutes initiatives et implications des salariés.

Des fautes de gestions à foison !

La gestion du DG Alioune Badara FALL est teintée d’innombrables manquements qui exposent et fragilisent la compagnie nationale. Il s’est fait, avec l’implication douteuse du Conseil d’administration, augmenter  au mois d’aout 2023 son salaire qui passe à plus de onze (11M) millions net par mois auquel s’ajoutent des honoraires mensuels de plus de trois millions (3 M) soit plus de quatorze (14M) millions nets perçus par le DG chaque mois. Comment justifier juridiquement deux contrats dans une seule et même entreprise pour une même personne ? Comment percevoir des honoraires sans qu’il y ait prestations faites ? Comment justifier du paiement rétroactif de ces honoraires depuis sa nomination en juillet 2022 ?

En guise de régularisation, le DG a perçu indument un montant de plus de cinquante millions pour un mois y compris son salaire mensuel revu à la hausse. Concomitamment, le PCA (Président du Conseil d’administration), le Général DIOP a vu ses émoluments mensuels augmentés et bénéficie cumulativement aussi d’un contrat de prestation de service en tant que pilote alors qu’il est nommé pour exercer pleinement la fonction de PCA. Il touchera à son tour de manière rétroactive un pactole de plus de 20 millions (20M) pour un mois.

Comme si ces agissements ne suffisaient pas, le DG se fait payer des indemnités de congés payés sans disposer des droits relatifs à la période de référence et toujours avec la complicité fautive de son directeur administration générale et support. Le DG s’est permis d’accorder un car plan à son ancien chargé de mission et ami Commandant THIOR à hauteur de près de trente millions (30M) alors qu’en tant que simple pilote il n’était pas éligible au car plan. Quid de l’énorme commande relative au matériel de handling à hauteur de plusieurs milliards de franc cfa dans la projection « avortée » d’acquisition des parts de LAS dans 2AS dont Air Sénégal détenait déjà les 49% ? Selon nos sources, malgré le paiement de plusieurs milliards, il n’ y a à ce jour aucun matériel livré. A Air Sénégal, il n’existe plus une gestion basée sur les procédures et, cela s’est exacerbé depuis que le DG a licencié abusivement le directeur audit il y a un an de cela. Ce dernier de même que d’autres directeurs injustement licenciés du fait de leur posture de conformistes, ont traduit Air Sénégal devant la juridiction du travail. Ce qui risque d’avoir un impact financier lourd pour la compagnie exposée à des sanctions pécuniaires.

Encore des histoires de mœurs…

Des histoires de mœurs s’invitent dans la gestion

Les scandales à Air Sénégal ne se limitent plus aux finances, des faits de mœurs s’invitent dans l’entreprise selon nos sources. Des faits récents de trafic supposés de bagages par des personnels navigants de cabine que le DG et son actuel DOA voulaient licenciés ont été étouffés dans l’œuf. La raison de cette reculade trouverait son explication du fait de vidéos et photos compromettantes du DG que détiendraient certains personnels navigants qui auraient menacé de les divulguer si le DG passait à l’acte.

Malgré tous ces scandales dissimulés, le directeur général d’Air Sénégal et sa team tentent désespérément de faire les yeux doux au nouveau régime. Ils ont affûté leurs armes et par le biais d’émissaires, ils font des pieds et des mains auprès des nouvelles autorités pour les convaincre du bien-fondé de leur présence afin de pouvoir continuer et surtout bénéficier d’un énième soutien de l’État. Impensable, à l’heure des rapports et de la reddition des comptes, le mieux pour eux serait de prouver aux sénégalais comment la compagnie a été gérée durant tout ce temps et justifier des énormes dépenses, des licenciements abusifs ordonnés, des recrutements injustifiés et des promotions douteuses à certains employés  à l’allure de cadeaux …

Il résulte de tous ces faits avérés que le DG Alioune Badara FALL est tout bonnement en panne de solutions, lui et son équipe formée de béni-oui-oui toujours empressés d’approuver ses initiatives par peur de faire les frais de son autoritarisme et de sa bipolarité. Ce désordre profond ayant mené Air Sénégal, qui n’existe plus que de nom désormais, dans une situation incertaine peut à coup sûr, freiner l’élan de travail et l’énergie positive apportée par le tout nouveau régime inscrit résolument dans l’ère du « Juub, Juubeul, Juubeuneti ». L’heure est grave et il urge pour le nouveau gouvernement de prendre une décision rapide et immédiate pour sauver ce qui peut encore l’être, sauver des emplois et sauver cet instrument national qu’est Air Sénégal et espérer redonner un nouvel élan à tout un secteur, celui du transport aérien du Sénégal, en situation de déliquescence. Mr Le Président, Mr le Premier ministre, la balle est dans votre camp, sauvez notre patrimoine, Air Sénégal, en faisant le choix d’une compétence qui a du leadership et la qualité d’un meneur d’hommes.

Papa Ibrahima Diassé

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