Après les mutineries de 8 400 soldats pour réclamer le paiement de primes, d’anciens rebelles démobilisés ont lancé une journée d’action lundi 22 mai dans plusieurs villes de Côte d’Ivoire. Objectif : faire valoir des revendications financières similaires à celles des mutins.
Moins d’une semaine après le retour des mutins dans les casernes ivoiriennes, les démobilisés – en majorité d’anciens rebelles non-intégrés à l’armée après avoir combattu au sein des Forces nouvelles – ont tenté lundi de faire valoir leurs revendications financières.
Ces derniers ont brièvement occupé lundi matin le corridor de Gesco situé au nord de Yopougon, à Abidjan, avant d’être rapidement dispersés par les forces de l’ordre. Dans le nord du pays, à Korhogo, ils ont également perturbé le corridor sud de la ville, a expliqué l’un d’eux, contacté par téléphone lundi matin.
Bouaké, épicentre de la contestation
Leur manifestation la plus importante a eu lieu à Bouaké, épicentre des dernières mutineries, où un de leurs camarades est mort dimanche 14 mai après avoir été atteint par des tirs de mutins. Dans la deuxième ville du pays, des soldats en colère avaient en effet ouvert le feu sur des démobilisés, les accusant d’avoir compromis le paiement de leurs primes en raison de leurs revendications financières similaires.
Le 8 mai dernier, des centaines de démobilisés avaient ainsi bloqué les accès de Bouaké pour réclamer leur intégration à l’armée ainsi que le paiement de 18 millions de francs CFA par personne. Contrairement aux 8 400 mutins de janvier et de mai, les démobilisés n’ont pas été intégrés au sein de l’armée après le programme de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR).
La ministre Mariatou Koné brièvement bloquée
Lundi matin, des centaines d’entre eux défilaient dans les rues de Bouaké en marge des funérailles de leur camarade tué. Venue assister à la levée du corps à la morgue, la ministre de la solidarité Mariatou Koné a brièvement été bloquée par les démobilisés, a rapporté l’AFP.
Loin de calmer l’atmosphère, l’annonce par la ministre de la création d’un fonds d’aide à la création d’entreprise pour les ex-rebelles a au contraire provoqué la colère de ces derniers. « On ne veut pas des projets, on veut l’argent », a crié l’un d’entre eux, selon un journaliste de l’AFP. Pendant quelques minutes, ils ont ensuite bloqué sa voiture, avant de la laisser quitter les lieux. « Je n’ai jamais été séquestrée », a précisé la ministre dans un communiqué cité par l’Agence de presse africaine.
« Nous voulons une entrevue avec le président Alassane Ouattara »
« Nous voulons que l’État de Côte d’Ivoire nous dise quand et comment nos primes vont nous être payées. Nous voulons également que les plus jeunes d’entre nous soient intégrés à l’armée », explique-t-on à la communication de la « cellule 39 », l’un des collectifs de démobilisés.
« Nous ne voulons plus d’intermédiaires et nous voulons une entrevue avec le président Alassane Ouattara. Depuis le début, nous manifestons pacifiquement pour obtenir l’ouverture de discussions, mais nous sommes ignorés », a déploré depuis Korhogo l’un des responsables de ce collectif. Avant de poursuivre : « Cela veut-il dire qu’en Côte d’Ivoire on écoute ceux qui sont armés et pas ceux qui veulent discuter ? »
Ces nouvelles manifestations surviennent moins d’une semaine après l’accord conclu entre le gouvernement et les 8 400 soldats à l’origine de la mutinerie de janvier et de mai. Si les autorités sont restées silencieuses sur l’entente trouvée avec les mutins, ces derniers ont affirmé avoir obtenu le paiement de 5 millions de Francs CFA – ils avaient déjà indiqué avoir reçu cette même somme en janvier – et de 2 autres millions de F CFA attendus d’ici la fin du mois de juin.
Les excuses du chef de l’état-major aux démobilisés
Cet accord a ravivé la colère des démobilisés, qui réclament des primes similaires. Le chef de l’état-major des armées avait pourtant tenté de désamorcer leur mouvement de colère dans la foulée des mutineries. Le général Sékou Touré s’était ainsi rendu à Bouaké jeudi 18 mai pour demander « pardon » aux démobilisés après la mort de l’un d’entre eux.
« Je viens vous présenter les excuses de toute l’armée. Quand vous êtes père et que vous avez malheureusement de mauvais enfants, vous allez toujours avoir honte du comportement de ces enfants. Nous sommes venus ici pour vous demander pardon », avait déclaré le chef d’état-major des armées, selon des propos rapportés par l’AFP. Des porte-paroles de démobilisés avaient par la suite indiqué « suspendre leur mouvement », avant de se raviser quatre jours plus tard, annonce Jeune Afrique.