La corruption au sein de l’IAAF a pris une tournure des plus inattendues. Selon le Monde qui cite l’Office central de lutte contre les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), Papa Massata Diack aurait joué le rôle d’intermédiaire dans tous les deals effectués dans ce paysage de l’athlétisme international.
Selon les révélations de son père devant les enquêteurs, « Papa Massata Diack s’est occupé du financement de la campagne présidentielle de 2012 avec le russe Balakhnichev, président de l’ARAF, la Fédération russe d’athlétisme. »
Ensuite vient Gabriel Dolé, le médecin français de l’IAAF qui révèle : « Lors d’un dîner en janvier 2012 à Monaco, avec le président Lamine Diack, Habib Cissé et peut-être Balakhnichev, il m’a été suggéré pour le cas de dopage de Lilya Shobukhova, d’être accommodant afin de ralentir la procédure.
A cette époque-là, il y avait des discussions avec un sponsor et Papa Massata Diack, et il m’avait dit qu’une mauvaise publicité nuirait aux négociations avec ce sponsor, dans la perspective des Jeux de Londres. J’ai accepté de ralentir la procédure la concernant »
Avant de poursuivre en enfonçant Diack-fils : « C’est Papa Massata Diack qui m’a remis une première enveloppe de 50 000 euros en une seule fois à l’hôtel Fairmont, à Monaco. » Après son départ précipité de l’IAAF fin 2014, il touche 140 000 euros supplémentaires, encore en liquide, dont 90 000 des mains du président Lamine Diack.
« Le reste m’a été remis par quelqu’un qui a été envoyé et la remise s’est effectuée à l’aéroport de Nice. (…) J’avais un descriptif de cette personne. Il devait y avoir un coup de téléphone sur mon portable personnel. Cela s’est passé en février, je crois… »
Lors de sa garde à vue, Gabriel Dolé mentionne la présence d’argent dans un coffre chez lui, au sous-sol, « au-dessus de la machine à laver ». Les enquêteurs découvrent alors 87 000 euros en liquide lors d’une seconde perquisition. Une autre partie a été dépensée au casino, une « addiction », selon M. Dolé, qui a aussi reçu une montre de luxe en cadeau, de la part de Papa Massata Diack. Contacté par Le Monde, son avocat, Me Eric Borghini, s’est refusé à tout commentaire.
Après que les carottes allaient être cuites pour Gabriel Dolé, sentant le danger venir, Papa Massata Diack adresse, le 29 juillet 2013, un mail à son père, intitulé « strictement confidentiel ». Il écrit que Valentin Balakhnichev l’a sollicité « pour intervenir en interne auprès du personnel de l’IAAF qui lui a été antagonique dans le processus de gestion de ce dossier depuis septembre 2012 et à cette fin, un travail de lobbying et d’explication a été fait auprès de C. Thiaré (50 K), Nick Davies (UK press lobbying et calmer Jane Boulter), G. Dolé (50 K) et PY Garnier (assistance champagnolle 10 K, géré par Cheikh). »
« K veut dire kilo et la devise est en dollars ou en euros », explique doctement Lamine Diack lors de sa quatrième audition. Et de décrypter : « Papa Massata Diack a donné de l’argent aux uns ou aux autres pour les faire taire et qu’ils ne s’opposent pas ».
Alors qu’aucune mise en examen nouvelle n’a été annoncée depuis début novembre, les enquêteurs recherchent toujours Papa Massata Diack. Joint par Le Monde, son avocat, Me Jean-Yves Garaud, n’a pas répondu à nos sollicitations. Le fils de l’ex-président de l’IAAF semble posséder les réponses aux questions qui restent encore en suspens dans ce dossier. Ainsi quand le juge Van Ruymbeke demande au président de l’IAAF qui, au Sénégal, a reçu l’argent des Russes, Lamine Diack botte dans le camp de sa progéniture : « Papa Massata Diack peut vous répondre ».