Selon l’inspecteur des Impôts Ousmane Sonko, il n’y a aucune trace des impôts des députés dans les caisses de l’État. « Il n’y a pas de reversement d’impôts de l’Assemblée nationale du Sénégal », a-t-il révélé lors de la dernière séance des « Samedis de l’Économie », rencontre dont le thème était « Politiques fiscales et financements de l’économie au Sénégal ».
Cette annonce a surpris le député Mamadou Diop Decroix, qui était présent à la rencontre. « Il y a des prélèvements qui sont faits sur mon salaire chaque fin du mois, a indiqué le parlementaire affilié à l’opposition. Je ne sais pas c’est quoi, mais on prélève quelque chose sur mon salaire. Il faut nous expliquer, sinon on va poser cette question à l’Assemblée nationale pour avoir des explications. »
Répondant à cette interpellation de Decroix, Ousmane Sonko a donné plus de détails : « Ce qui est constant, c’est qu’il n’y a pas de reversement d’impôts de l’Assemblée nationale. Comme c’est le système d’exonération à la source, c’est le questeur, qui paie les salaires, qui doit opérer la retenue et qui reverse. Ce qui est constant, c’est que jusqu’au moment où je vous parle, il n’y a jamais eu de reversement d’impôts. »
Depuis que l’inspecteur des Impôts et des Domaines Ousmane Sonko a déclaré que l’administration de l’institution ne reversait pas les impôts des députés prélevés à la source, la réaction de l’Assemblée nationale était attendue. Ni les questeurs ni les directeurs du Trésor et de la Comptabilité n’ont donné suite aux nombreuses demandes de la presse.
Le président Moustapha Niasse, absent du pays au moment des révélations de Sonko, ne s’est pas non plus prononcé publiquement sur la question depuis son retour au pays . L’institution parlementaire finit par réagir. Enfin !
Dans un communiqué, la direction de la communication de l’Assemblée nationale informe qu’à la suite des révélations d’Ousmane Sonko, Niasse « a demandé au Questeur de lui faire la situation exacte sur l’objet de cette déclaration ».
« Après vérification auprès des services financiers de l’Assemblée nationale », indique la même source, il apparait à ce jour que les députés paient régulièrement l’impôt et que des reversements ont été effectués. Contrairement donc aux affirmations de Sonko.
D’après les services de Niasse, « le montant des retenues opérées à l’Assemblée nationale s’élève, chaque mois, à environ 10.000.000 (dix millions) francs CFA ». Des coupes qui fluctuent « en fonction du quotient familial, mais aussi (des) positions (des députés), selon qu’ils sont députés simples, membres du bureau de l’Assemblée nationale ou présidents d’une Commission permanente ».
« Nous sommes donc à des années-lumière des milliards annoncés. En plus, il est inapproprié et injuste d’affirmer que les Députés ne paient pas leurs impôts, recadre-t-on dans le communiqué. À l’avènement de la 12e Législature, au 30 juillet 2012, l’Assemblée nationale restait devoir, dans ses écritures, au titre dudit prélèvement, un montant de 120.809.722 (cent vingt millions huit cent neuf mille sept cent vingt-deux) francs CFA. Au nom du principe intangible de continuité du service public, ce montant a été apuré progressivement et, à ce jour, soldé. »
Donc selon la direction de la communication de l’Assemblée nationale, non seulement le passif de la précédente législature a été soldé, mais une bonne partie des impôts des députés a été reversée depuis le début de la législature en cours. « Au total, la XIIe Législature, qui a commencé le 30 juillet 2012, a effectué des versements d’un montant de 174.162.810 (cent soixante-quatorze millions cent soixante-deux mille huit cent dix) francs CFA. Tous les justificatifs, c’est-à-dire les quittances de paiement et les cachets des services de recouvrement ont été dûment établis et apposés. Aujourd’hui, la situation laisse apparaître un montant complémentaire de 142.768.473 (cent quarante-deux millions sept cent soixante-huit mille quatre centres soixante-treize) francs CFA, en cours d’ordonnancement pour être payé. »
Malgré tout, signale-t-on dans le communiqué, l’administration fiscale a adressé à l’Assemblée nationale un redressement pour la période 2010-2013. Une procédure « qui n’intègre pas les paiements déjà effectués et détaillés ci-dessus. Ce redressement fait l’objet d’un contentieux en voie de règlement par une réconciliation des chiffres en cours entre les deux parties. »
« Voilà la stricte vérité de la situation fiscale de l’Assemblée nationale, au titre desdits prélèvements sur les salaires des Députés et des Personnels », conclut la direction de la communication de l’Assemblée nationale. Qui ajoute : « Sous l’éclairage de ces données, il est évident que l’Assemblée nationale ne peut devoir la somme de deux milliards sept cents millions de FCFA (2.700.000.000) à la Direction générale des Impôts et Domaines. La procédure et la base de calcul sont contestables. Il n’y a pas lieu de revenir sur la question de pénalités de retard qui seraient imposées, en guise de sanctions, à l’encontre de l’Institution parlementaire, qui est un démembrement de l’État. En tout état de cause, en matière de fiscalité, l’État sénégalais possède les mécanismes et les procédures à même de résoudre les contentieux. »
Et Amadou Ba confirma Sonko« Je le dis très clairement. Aucun député ne doit de l’argent. Ce que le député perçoit, nous ne le considérons pas comme un salaire. Ils subissent une retenue à la source. Si un député nous doit des impôts, cela veut dire que tous les fonctionnaires nous en doivent. L’idée selon laquelle les députés doivent des impôts n’a pas de sens. Je voudrai vous rassurer. Les députés ne doivent pas aux Impôts et Domaines de l’argent. Cette affaire relève un peu d’une incompréhension », dit-il, avant d’ajouter : » C’est une situation regrettable découlant d’une mauvaise utilisation de l’information sur les dettes fiscales des agences et structures autonomes assimilées, annexées dans le Document de programmation budgétaire et économique pluriannuelle (Dpbep) de l’année dernière 2016-2018″.
Source: seneleaks.com