Le Cameroun est devenu champion d’Afrique pour la cinquième fois dimanche soir en battant l’Égypte (2-1) à Libreville. Claude Le Roy, l’ex-sélectionneur des Lions Indomptables, a savouré la victoire de son ancienne équipe, laquelle, selon lui, a totalement mérité sa victoire face à un adversaire trop frileux.
Jeune Afrique : Il y a un mois, l’hypothèse de voir le Cameroun devenir champion d’Afrique relevait de la pure divagation…
Claude Le Roy : C’est vrai. On en faisait au mieux un outsider. Cela me rappelle 1988, quand j’étais sélectionneur et que nous étions devenus champions d’Afrique. Plusieurs grands anciens n’étaient plus là, des nouveaux les avaient remplacés et le Cameroun n’était pas favori, et pourtant… Cette équipe du Cameroun 2017 a montré une chose essentielle : on devient champion d’Afrique à 23 ! On a vu qu’il y avait une grosse solidarité, un excellent état d’esprit et des joueurs motivés. Regardez Nkoulou et Aboubakar : ils n’étaient pas titulaires au coup d’envoi. Nkoulou rentre après la blessure de Teikeu, Aboubakar parce que Hugo Broos décide d’apporter de la puissance en attaque après la première période. Deux joueurs qui n’avaient pas énormément joué alors qu’ils font partie des anciens. Et ce sont eux qui marquent les deux buts des Lions…
Comment expliquez-vous cette première mi-temps compliquée des Lions ?
Ils étaient timides, pas à l’aise. Cela se sentait. Ils craignaient Mohamed Salah. Il y a eu la blessure de Teikeu… Mais je suis persuadé que le but égyptien a permis aux Camerounais de se libérer en seconde période. Ils n’ont plus calculé, ils ne pensaient plus à Salah. Les Camerounais ont une immense qualité : leur force mentale. Ils ne doutent pas, ils ont confiance en eux. Leurs adversaires peuvent considérer cela comme une forme d’arrogance, mais ce n’est pas cela.
Les choix de Broos, le sélectionneur belge des Lions, ont été décisifs. Il y a un peu plus d’un mois, il était confronté aux défections de plusieurs joueurs et aux critiques venues d’un peu partout, par rapport à certains de ses choix…
Broos fait un vrai travail de sélectionneur. Il connaît ses joueurs, il connaît son groupe. Il bosse, il est souvent au Cameroun, et on sent qu’il a créé quelque chose avec ses joueurs. Il a certes fait des choix, mais ceux qui étaient au Gabon, même si certains évoluent au Danemark, en Slovaquie ou en Ligue 2 en Espagne ou en France, sont de bons footballeurs. Il a certes fait rentrer Aboubakar, mais il a aussi fait permuter Bassogog et Moukandjo, et cela a aussi été décisif.
C’est un titre qui arrive très tôt pour cette nouvelle génération camerounaise…
Oui, mais les titres ne viennent jamais trop tôt. Il va bien sûr falloir le digérer, essayer de confirmer, lors des qualifications pour la Coupe du Monde 2018, où le Cameroun n’est pas spécialement bien parti (deux points en deux matches, ndlr). Mais pour le pays qui va organiser la prochaine CAN, en 2019, cette victoire est un crédit formidable.
Un mot sur l’Égypte, encore une fois très défensive, mais qui a vu son propre piège se refermer sur elle ?
Sincèrement, c’est une bonne chose pour le football que l’Égypte ne soit pas championne d’Afrique. Son attitude est trop défensive. Le foot, ce n’est pas ça. Il y a des joueurs de talent, une vraie qualité collective, une organisation défensive solide, mais quand on a un joyau comme Mohamed Salah, on l’utilise autrement. Il est esseulé devant… Je ne vais pas trahir un secret en vous disant que dimanche soir, j’étais supporter des Lions. La fête au Cameroun va être incroyable !