Recentrons le débat s’il vous plait !…
Depuis quelques jours, la presse se fait l’écho de plusieurs commentaires relatifs à des propos qu’aurait tenu le Président Abdoulaye WADE dans le cadre d’une réunion privée, celle du Comité directeur du Parti démocratique sénégalais (PDS).
Lorsque certains de ces commentaires sont le fait de personnes en âge de puberté politique, on en sourit et l’on se dit : ça va leur passer.
Lorsque d’autres commentaires émanent d’une personnalité dont la si longue carrière politicienne socialiste n’a été véritablement consacrée qu’à l’avènement du Président libéral Abdoulaye WADE, on en rit et l’on se dit: en voilà un qui a perdu une bonne occasion de se taire! Lorsqu’un tout jeune, mais déjà ancien Ministre, se permet d’interpeller de manière cavalière un ancien Chef de l’Etat qui pourrait-être, à tout le moins son grand-père, on se dit qu’il serait peut-être temps de tirer la sonnette d’alarme au vu de l’affaissement de nos valeurs culturelles et sociales. Mais, last but not least, lorsque le Président du Conseil scientifique du prochain Sommet de la francophonie fait irruption dans ce concert dissonant de commentaires incongrus (alors même qu’il aurait dû avoir d’autres chats à fouetter à moins d’un mois de l’échéance !) et que le Garde des Sceaux profère des menaces à peine voilées, on mesure l’urgence de recentrer le débat.
De quoi s’agit-il?
Le Secrétaire Général National du Parti démocratique sénégalais, premier parti de l’opposition livre des informations au Comité Directeur de son parti sur deux dossiers, à son avis préoccupants, quant à la bonne gestion des intérêts de notre pays: le dossier Arcelor-Mittal/Etat du Sénégal et celui relatif à la gestion de nos ressources pétrolières.
Où est le problème ?
Le Secrétaire Générall National du PDS n’est-il pas dans son rôle de patron de la nouvelle opposition issue des élections de Mars 2012 ? Qui peut lui contester cette légitimité ?
Certains disent » il est vieux, il devrait prendre sa retraite ». À ceux-là je souhaite, tout simplement, d’atteindre son âge et de garder sa forme physique et mentale.
Rappelons tout de même quelques données à tous ces commentateurs zélés: le Secrétaire général National du PDS, est la seule personnalité politique sénégalaise qui, lors des élections passées, a fait la démonstration qu’il pèse TOUT SEUL 36% des suffrages valablement exprimés. Aucune autre personnalité politique sénégalaise actuelle, prise individuellement, ne lui arrive à la cheville. Tant sous ce rapport que sous celui de l’ensemble de sa carrière politique, Maître Wade est dépositaire d’une légitimité certaine pour être le porte-voix de millions de sénégalais. Il reste, par ailleurs, un exemple à méditer: Sauf erreur ou omission, il est le seul leader politique du Sénégal postindépendance à avoir créé un parti politique de A à Z et à l’avoir porté au pouvoir après vingt-six ans d’opposition. Patience, détermination et combativité, des valeurs qui devraient être magnifiées. Puis, il a exercé le pouvoir pendant douze années et, suite au verdict des urnes, est retourné dans l’opposition dans le respect scrupuleux des règles de la démocratie pour laquelle il s’est battu dans des conditions alors extrêmement pénibles. On ne le dit pas assez. Le nom de Maître Abdoulaye WADE est donc indissociable du processus de la construction et de la consolidation du modèle démocratique sénégalais. C’est ainsi, d’ailleurs, que la plupart des leaders politiques du Sénégal d’aujourd’hui, à commencer par le Président de la République actuel, sont sortis de son école. À cet égard, il mériterait la reconnaissance de la Nation à défaut de celle des principaux intéressés.
Cela étant dit, quelle est cette tendance qui consiste, dans une démocratie majeure, à empêcher les citoyens de s’interroger sur des soupçons de deal (Dossier Arcelor-Mittal/ Etat du Sénégal) ou de collusion (dossier pétrolier) ? Les organisations de la Société civile devraient s’engouffrer dans la brèche pour demander des éclaircissements. Les partis politiques et les syndicats aussi. Ainsi vit la démocratie: le contrôle de ceux qui gouvernent par les gouvernés! Le débat reste donc ouvert…
Pour dire qu’il serait temps de civiliser le débat public dans notre pays. Que les arguments s’opposent aux arguments. Mais aussi que ceux qui veulent manifester le fassent. Dans le strict respect des lois et règlements. Le principe de manifester étant lui-même prévu par la loi et soumis à simple déclaration.
À ceux qui, pour justifier leurs commentaires tendancieux, comparent Abdoulaye Wade à ses prédécesseurs Léopold Sedar Senghor et Abdou Diouf, il suffit de dire qu’il n’est ni l’un ni l’autre. Question de tempérament et de parcours. Abdoulaye Wade a combattu l’un et a défait l’autre. Contrairement à eux deux, il a fait le choix de rester à la tête de son parti et dans son pays pour consolider l’héritage qu’il compte laisser à la postérité. Parce qu’il l’a créé et fait corps et cœur avec lui, Abdoulaye Wade reste le dépositaire de l’âme du PDS. N’en déplaise à ceux qui aimeraient effacer jusqu’à son souvenir de la mémoire des sénégalais.
Au total, rappelons aux uns et aux autres que, ni l’impertinence ni l’insolence ne sont signe de courage. Tout au plus des signaux faibles d’ardeur militante, voire de témérité juvénile. Le temps et les épreuves de la vie se chargeront d’y mettre bon ordre.
En vérité et par-delà cette fébrilité injustifiée, il serait plutôt temps de rendre à Abdoulaye WADE l’hommage qu’il mérite maintenant que le nuage de fumées…verbales qui voilaient son bilan impressionnant s’estompe. Maintenant que les masques sont tombés et que l’on découvre la face cachée des preux chevaliers, prétendument défenseurs des valeurs de la bonne gouvernance et de la transparence, gardiens autoproclamés et exclusifs de la vertu. Et puis quoi encore? Suivez mon regard…
Il n’est jamais trop tard pour bien faire
Par Amadou Tidiane Wone (photo)