Affaire Lamine Diack : l’e-mail compromettant de Nick Davies ex-porte-parole de l’IAAF à Pape Massata DIACK.

Affaire Lamine Diack : l’e-mail compromettant de Nick Davies ex-porte-parole de l'IAAF à Pape Massata DIACK.

En 2013, année des championnats du monde de Moscou, plusieurs passeports biologiques d’athlètes russes étaient apparus anormaux.

Voilà une nouvelle affaire qui vient encore épaissir la pile déjà bien fournie de dossiers embarrassants que doit gérer Sebastian Coe, le président de la fédération internationale d’athlétisme (IAAF). Le Monde a pu consulter un courriel montrant que l’actuel bras droit de M. Coe, Nick Davies, directeur de cabinet du nouveau président de l’IAAF depuis septembre, était au courant des cas de dopage couverts par l’IAAF dans l’athlétisme russe depuis 2013 au moins. Surtout, cet e-mail montre comment M. Davies, ancien porte-parole de l’IAAF, a tenté d’élaborer une stratégie de communication afin que ces cas, gênants pour l’athlétisme mondial, aient le moins de répercussion médiatique possible.

Le message en question, versé au dossier judiciaire de l’enquête actuellement en cours sur la corruption à l’IAAF, est adressé le 29 juillet 2013 à 16 h 11 à Papa Massata Diack. Soit à quelques jours des championnats du monde d’athlétisme de Moscou (du 10 au 18 août). Papa Massata Diack, fils de Lamine Diack, l’ex-président de l’IAAF, est à l’époque consultant en marketing pour la fédération internationale. Des fonctions qu’il n’occupe plus depuis fin 2014. « PMD » est soupçonné d’être au cœur de l’affaire de corruption sur fond de dopage, qui ébranle actuellement l’IAAF.

« Ceci doit rester très secret », précise d’emblée Nick Davies. A la lecture de l’e-mail, on comprend la prudence de l’ancien porte-parole de l’IAAF. « J’ai besoin de m’asseoir pour parler avec le département antidopage et comprendre exactement quels sont les “cadavres” russes que nous avons toujours dans le placard, en ce qui concerne le dopage », explique M. Davies.
Minimiser les révélations

A cette époque, plusieurs passeports biologiques d’athlètes russes sont apparus anormaux. « Je pense que les cas des différents athlètes auraient dû être dévoilés il y a longtemps et que nous devons maintenant être intelligents, poursuit M. Davies. Ces athlètes, bien sûr, ne devraient PAS faire partie de l’équipe de Russie lors de ces championnats du monde et il faudrait mettre la pression sur Valentin [Balakhnichev, le président de la fédération d’athlétisme russe] pour s’assurer que c’est le cas. Si les coupables ne participent pas à la compétition, alors nous pourrions bien attendre que les championnats se terminent pour annoncer les cas. Ou nous en annonçons un ou deux MAIS EN MEME TEMPS que des athlètes d’autres pays. »

L’objectif de Nick Davies semble très clair : il s’agit de minimiser les révélations de cas de dopage dans l’athlétisme russe. « Nous pouvons aussi préparer un dossier sur les tests antidopage de l’IAAF, explique-t-il, qui montrera que l’une des raisons qui expliquent le fait que beaucoup de Russes se révèlent positifs est qu’ils se font beaucoup contrôler !!! Dans le même sens, nous pouvons souligner le fait que le laboratoire de l’Agence mondiale antidopage [celui de Moscou, très probablement] relève de la responsabilité de l’AMA et que si l’AMA décide qu’il y a vraiment un problème, nous avons un plan B pour réaliser les tests à Lausanne (Gabriel m’a confirmé cela hier). »

Le « Gabriel » mentionné est le Dr Gabriel Dollé, alors responsable du département antidopage de l’IAAF et aujourd’hui mis en examen pour « corruption passive », dans l’enquête ouverte le 1er octobre par le parquet national financier, aux côtés de l’ex-président de l’IAAF Lamine Diack et de son conseiller juridique personnel, Habib Cissé.
Le rôle de Sebastian Coe

A moins d’un mois des Mondiaux de Moscou, le porte-parole informe son interlocuteur qu’il veut mettre en place, « officieusement », une « campagne RP [relations presse] pour s’assurer que nous évitons des scandales médiatiques internationaux liés aux championnats de Moscou, notamment dans la presse britannique, d’où viennent les pires articles. » Afin de remplir cet objectif, Nick Davies précise envisager « d’utiliser CSM ». « CSM » pour Chime Sports Marketing, une agence spécialisée dans le marketing sportif, dont le directeur général s’appelle… Sebastian Coe – qui, en 2013, était vice-président de l’IAAF.

Nick Davies évoque d’ailleurs le rôle que pourrait jouer son compatriote et ami : « Nous pouvons aussi profiter de l’influence politique de Seb au Royaume-Uni. C’est dans son intérêt personnel de s’assurer que les championnats du monde de Moscou soient un succès et que les gens ne pensent pas que les médias de son propre pays ne sont pas en train de chercher à les détruire. Nous pouvons travailler fort pour arrêter toute attaque planifiée par la presse britannique à l’égard de la Russie dans les semaines à venir. »

Dix jours après le message de Nick Davies, le 29 juillet 2013, Papa Massata Diack adresse un e-mail à son père, intitulé « strictement confidentiel », comme l’a révélé Le Monde, vendredi 18 décembre. « PMD » écrit que Valentin Balakhnichev l’a sollicité « pour intervenir en interne auprès du personnel de l’IAAF qui lui a été antagonique dans le processus de gestion de ce dossier depuis septembre 2012 et à cette fin, un travail de lobbying et d’explication a été fait […]. » Contacté par Le Monde en fin de semaine dernière, Nick Davies avait démenti « fermement cette allégation. Malheureusement, je crois que la tactique de ceux qui sont accusés est d’essayer de démontrer que d’autres personnes sont impliquées dans leurs plans. Je les ignorais complètement. »

Joint à nouveau par Le Monde, cette fois-ci à propos de son e-mail, Nick Davies a fait savoir dans un communiqué, dédouanant le président de l’IAAF :

    « Mon e-mail adressé moins d’un mois avant le début des Championnats du Monde de Moscou au consultant marketing de l’IAAF d’alors, Papa Massata Diack, consistait en un échange d’idées au sujet de possibles stratégies liées aux relations presse en vue de sérieux challenges rencontrés autour de l’image de la compétition. Aucun plan n’a été mis en place suite à cet e-mail et il n’y a absolument aucune possibilité qu’une stratégie ou un plan média/relations publiques puisse interférer avec la procédure antidopage. Je n’ai pas abordé ces idées avec CSM et il n’y a jamais eu aucun d’accord entre l’IAAF et CSM pour mettre sur pied une campagne de relations publiques. CSM n’a jamais travaillé pour l’IAAF en quelque capacité que ce soit depuis que Sebastian Coe en est membre. »
Senegal7.com

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