Le phénomène du riz « en plastique » n’est pas prêt de s’estomper au Sénégal. En fait, cette histoire ne s’appuierait sur aucune preuve scientifique et serait un canular. C’est du moins, l’avis des spécialistes qui se sont prononcés sur la question.
« La première interrogation que j’ai, c’est sur l’effectivité de cette rumeur-là. Parce que du riz en plastique, pour moi, c’est impossible. Quand on parle de riz « en plastique », c’est peut-être, pour moi, un sosie du riz, quelque chose qui ressemble à du riz, de boulette en plastique.
Et nous, en tant que scientifiques, nous prenons toujours des gants quand nous opérons, c’est-à-dire, nous prenons nos précautions. Nous n’avons pas fait d’analyse pour savoir si c’est du riz ou du mauvais riz, mais le plastique et le riz vraiment, c’est deux choses qu’il ne faut pas mélanger, nous n’avons pas vu le riz incriminé » a précisé le chimiste, Modou Fall.
En tout cas, toutes sortes d’histoires circulent également pour détecter si nos grains de riz sont faits de plastique ou non. Par exemple, on suggère d’immerger les grains de riz dans un bol d’eau. Si ces derniers flottent, il s’agit de faux riz. « Quand on a du plastique, il fond si on le chauffe. Mais quand on le met dans une marmite par exemple, où il y a beaucoup d’eau, ça fait que la température est peut-être limitée à 100 degrés.
Il y a certains plastiques qui résistent à cette température, mais il y a d’autres qui ne résisteraient pas à cette température. Il est clair que ce n’est pas la même chose que de le mettre directement sur le feu, parce que si on l’y met, les températures peuvent être plusieurs centaines de degrés », a relevé le professeur Fall qui précise que « si c’est dans l’eau, la température est limitée à 100 degrés. Donc, scientifiquement parlant, je trouve cette rumeur infondée ».
De son côté, Dr Fallou Sarr, responsable du service céréales et légumineuses de l’Institut de technologie alimentaire (ITA), apporte son éclairage scientifique. « Ce qu’on peut dire, c’est que ces échantillons sont un peu nombreux sur le marché. Personnellement, ce que j’ai vu, c’est du riz qui n’est pas du plastique. Le plastique ne peut pas donner du riz. Le plastique, c’est de la matière minérale synthétique, alors que le riz, c’est une matière organique qui est cultivée », a souligné M. Sarr.
Pourquoi donc les gens font le rapprochement entre riz et plastique ? C’est parce qu’il parait que ceux qui ont lancé pour la première fois l’idée, pour démontrer leurs propos, ont montré une vidéo où un asiatique produisait, à partir du plastique, des granulats. « Et ces granulats ressemblaient à du riz. Mais les granulats qui sont produits à partir du plastique, servent à faire du polystyrène. Ce sont des graines qui vont subir une opération pour donner cette matière que vous pouvez voir à chaque fois que vous déballez le carton d’un appareil électroménager. Il sert à amoindrir le choc en cas de chute », a précisé le Dr Fallou Sarr.
Babacar Niang, un Sénégalais habitant en Chine, dans une vidéo publiée sur le net, a tenu à lever toute équivoque sur ce riz en plastique dans le marché sénégalais. « Ces granulés de plastique proviennent du pétrole, on l’achète souvent en Arabie saoudite ou dans les pays pétroliers. On le fabrique avec une machine que tout le monde peut acheter pour recycler le plastique et le revendre aux sociétés qui exploitent la matière. C’est un business que le Sénégalais ne connaît pas encore mais si on a une idée de la rentabilité de ce business, aucun déchet plastique ne traînerait dans les rues », a souligné Babacar Niang.
Il précise que les granulés de plastique recyclé valent plus cher que le riz. Car dit-il, le prix du tonnage varie entre 1000 et 2000 dollars (500 000 et 1 000 000 F Cfa), alors que le prix de la tonne du riz ne dépasse pas 350 000 F cfa. « Ça veut dire que le plastique recyclé vaut au moins deux fois plus cher que le riz. Donc, cette rumeur n’est pas fondée. Le plastique, on ne peut pas le préparer. C’est juste une stratégie de déstabilisation des produits chinois ou de l’économie chinoise. On sème juste le doute dans la tête des gens, c’est de l’intox », a insisté Babacar Niang.