Dans un courrier daté du 4 septembre, l’Autorité de régulation de la commande publique (Arcop) demande à l’Agence sénégalaise de l’électrification rurale (Aser) de s’expliquer à propos du différend qui l’oppose à Aee Power Sénégal. Cette entreprise sénégalaise a saisi le Comité de règlement des différends (Crd) de l’Arcop pour dénoncer le changement des termes du marché d’électrification rurale dans les régions de Kaffrine, Saint-Louis, Kédougou, Louga et Tamba. Celui-ci fait l’objet d’un nouveau protocole d’accord signé entre l’Aser et la société espagnole Aee Power Epc, le 27 août dernier.
Saisi le 29 août par Aee Power Sénégal, qui s’estime flouée, le gendarme des marchés publics demande à l’Aser, en plus de donner sa version des faits, à l’instar de la société plaignante, de fournir «tous les documents pertinents disponibles, y compris copie du protocole d’accord signé avec Aee Power Epc afin de pouvoir statuer au fond sur les violations alléguées par le requérant».
Violations en série présumées
D’après plusieurs journaux consultés par Seneweb, Aee Power Sénégal estime que le nouvel accord liant l’Aser, sous la houlette de son nouveau directeur général, Jean-Michel Sène, et Aee Power Epc viole à la fois l’accord tripartite initial, le Code des marchés publics et le Code de la Cima (Conférence interafricaine des marchés d’assurance), regroupant 14 pays (Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad et Togo).
Aee Power Sénégal déclare être à la base du projet de 91 milliards 833 millions 980 mille francs CFA, avec 60% des parts. Au moment de formuler son offre spontanée, renseigne Le Témoin, la société de droit sénégalais a conclu un accord avec Aee Power Epc, chargée d’apporter les garanties financières requises pour obtenir le marché.
Sur la base d’un «contrat de prestation de services et de fournitures de poteaux électriques», Aee Power Sénégal est désigné «mandataire et prestataire autonome d’Aee Power Epc», selon la même source. Les problèmes surviennent lorsque l’Aser ordonne à Santander, la banque partenaire du projet, de verser à l’entreprise espagnole 36,4 milliards de francs CFA, représentant l’avance de démarrage des travaux.
Faux-bond d’Aee Power Epc
Au lieu de reverser le montant à son partenaire sénégalais, comme demandé par celui-ci, Aee Power Ecp bloque les fonds avant de remettre en cause le contrat qui les liait, d’après le récit du Témoin. Saisi par Aee Power Sénégal, le Crd de l’Arcop pose, le 3 juillet dernier, son véto sur ce revirement des Espagnols.
Ces derniers ne sont pas pour autant ébranlés. Aee Power Ecp a non seulement ignoré l’opposition de l’Arcop, d’après Le Témoin, mais elle a en plus boycotté la réunion de conciliation organisée par le gendarme des marchés publics et à laquelle ont pris part les autres parties du marché (ministères de tutelle, Aser, banque Santander, Aee Power Sénégal). S’engouffrant dans la brèche, l’Aser a renégocié le contrat en question avec l’entreprise espagnole. Des préoccupations de rationalisation et de redimensionnement du projet, avec plus de villages à électrifier, sont invoquées.
Aee Poxer Sénégal ne l’entend pas de cette oreille. Par l’intermédiaire de ses avocats, la société sénégalaise saisit à nouveau l’Arcoo, l’invitant à mener «une enquête approfondie pour garantir l’exécution conforme du marché».
La requête sera entendue. Le gendarme des marchés publics ayant demandé à l’Aser de fournir sa version des faits et les documents relatifs au marché en question, notifiant sa décision à la plaignante, à l’Aser, à la Direction centrale des marchés publics (Dcmp) et aux ministères de tutelle (Finances et Énergie).