Macky Sall va se rendre en Arabie saudite cet après midi sur invitation du roi. Certainement, le président de la République va s’enquérir de la situation des ouvriers sénégalais dans ce royaume. Ces braves gens qui étaient partis chercher fortune vivent l’enfer dans ce pays. Ils sont sans salaires depuis plusieurs mois et sont trimballées de chantiers en chantiers. Leurs conditions de vie sont pires que celles des prisonniers de Rebeus. L’un d’entre eux s’est adressé à l’émission Les Observateurs de France 24 pour décrire leur calvaire. Il s’appelle Amath B
» Au Sénégal, j’étais électricien à mon compte, mais c’était vraiment difficile de trouver un boulot dans le pays, je n’arrivais pas à nourrir ma famille. J’ai sept enfants et je vis avec mes frères et sœurs. Dès que j’arrivais à avoir un job journalier, je pouvais gagner 5 000 francs CFA [7euros]. Mais ce n’était pas tous les jours.
Un jour, j’ai rencontré un rabatteur qui travaillait pour la société Saudi Oger et qui proposait des visas pour l’Arabie Saoudite. Il m’a expliqué les conditions et ça m’a paru très intéressant : j’allais être nourri, logé et on m’offrirait un travail sur un chantier. Je n’arrivais plus à joindre les deux bouts dans mon pays, j’ai donc accepté de partir avec un ami. Nous avons payé 1 million de francs CFA chacun pour obtenir notre visa [2000 euros]. C’est une somme importante, mais les garanties nous semblaient vraiment intéressantes. C’est seulement une fois sur place que nous avons compris que l’Arabie Saoudite est loin d’être un eldorado.
Pour beaucoup, nous sommes venus ici pour pouvoir gagner de l’argent et l’envoyer à nos familles au pays. Normalement, j’envoie de l’équivalent d’un salaire, environ 3 mille rials saoudiens [environ 700 euros], à ma famille tous les deux mois. En ce moment, c’est impossible… Il y a beaucoup d’étrangers ici : certains viennent du Sénégal, d’autres des Philippines, de France, du Liban…Un ami sur le chantier m’a raconté que ses enfants l’appellent tous les jours pour lui demander l’argent. Ils risquent d’abandonner l’école s’ils ne reçoivent rien.
Ce désespoir en pousse même certains à se donner la mort. Un travailleur philippin s’est pendu dans un atelier la semaine dernière. Faute d’argent, sa femme malade n’avait plus de quoi se payer ses médicaments… L’idée de ne pas réussir à aider sa famille a dû le pousser à en arriver là…Un drame similaire avait déjà eu lieu au début du mois de février sur mon chantier et nous avons peur que cela devienne de plus en plus fréquent : les travailleurs sont très déprimés.
« Je suis trimballé de chantier en chantier, sans avoir le choix »
En plus de ne pas être payés, on est exploités et on vit dans de mauvaises conditions. Tous les jours, je me lève à 4 heures du matin pour aller au chantier et je rentre seulement vers 19h le soir. Pour gagner un peu plus d’argent, on nous propose de travailler en soirée, mais au final, on voit rarement la différence sur nos fiches de paie.
En plus, on fait de toi ce que l’on veut. Moi, on m’a d’abord mis sur un chantier de construction d’un « centre d’archive « à Damman, puis on m’a envoyé à Ryad pour autre chose pendant quelques mois et après je suis revenu à Damman. Je n’ai pas vraiment eu le choix, je suis trimballé de chantier en chantier.Pareil pour nos logements, c’est une catastrophe. Nous dormons dans des préfabriqués. Dans ma chambre nous sommes deux, mais un de mes amis est dans une chambre de 5 personnes ! C’est minuscule et surtout on a toujours peur de se faire voler quelque chose.
« Je ne peux pas repartir, je n’ai pas assez d’argent, et certains n’ont même plus de papiers »