Alors que les Sénégalais se sont réveillés, ce 15 décembre 2021, stressés par les hausses des prix des denrées de première nécessité, la Société africaine de raffinage (Sar) et la Société des pétroles du Sénégal (Petrosen) ont plongé le pays dans un psychodrame judiciaire parti pour aggraver le mal-vivre de nos compatriotes.
Ces deux entités, de connivence autour d’une gestion catastrophique du secteur pétrolier au Sénégal, ont attrait en justice, pour abus de minorité, Locafrique, actionnaire de la Sar opposée à une vaste escroquerie drapée sous les habits d’une recapitalisation de cette entreprise.
De quoi s’agit-il ?
D’un cas typique de gestion tropicale qui sacrifie l’intérêt de l’entreprise pour bourrer les poches de ses dirigeants.
Au cours de l’exercice 2020, la Sar a réalisé une perte de 59 milliards de fcfa, et des fonds propres négatifs de l’ordre de 53 milliards de fcfa découlant d’une mauvaise gestion.
Ce bilan catastrophique impose la nécessité de renforcer les fonds propres de cette entreprise stratégique pour la marche du pays.
Au cours de l’assemblée générale extraordinaire du 1er décembre 2021, les mêmes qui ont coulé l’entreprise ont proposé sa recapitalisation à travers l’injection dans sa trésorerie de… 350 milliards !
Locafrique, actionnaire, soucieuse d’éviter des risques colossaux aux autres actionnaires et aux deniers publics, a proposé mieux: la réévaluation des actifs de la société, dont un terrain de 92 hectares qui vaut aujourd’hui 115 milliards de fcfa.
Le besoin de fonds propres de la Sar culminant autour de 60 milliards, la seule réévaluation de ce bien immobilier suffit à corriger les fonds propres négatifs et à établir un solde positif de fonds propres de l’ordre de 61 milliards.
Mais c’est sans compter avec les inconditionnels de l’augmentation numéraire soucieux de commissions et d’intérêts occultes.
Ils sont revenus à la charge et, pour faire payer à Locafrique son opposition, l’ont attraite en justice pour… abus de minorité.
Le tribunal du commerce, qui a examiné le litige ce matin du 15 décembre 2021, doit, pour rendre son délibéré prevu pour le 22 décembre, répondre à cette question: Doit-on, pour répondre à un besoin de financement réel de 60 milliards, contraindre des associés et les deniers publics à supporter 350 milliards qui risquent, pour une grande part, de se retrouver dans les poches de quelques véreux ?
Cheikh Yérim Seck