« Rien ni personne ne me fera changer d’avis. Je vais délocaliser le stade Me Babacar Sèye à Ngallèle. Je ne mettrai pas de l’argent ici. »; tels sont les propos discourtois du maire de Saint-Louis suite aux avis contradictoires face à son désir de délocalisation du stade Me Babacar Sèye ( ex Wiltord).
Voilà un prétexte qui nous sert de support pour nous pencher encore sur la légimité et le rôle des maires au Sénégal au moment où beaucoup d’entre ces derniers sont en train de souffler le chaud et le froid.
Cette lancinante question de la légitimité des maires au Sénégal se pose encore, si l’on sait que leur mandat a expiré depuis 2019. Et jusqu’à présent, ils continuent à présider aux destinées des localités pour lesquelles ils avaient été élus pour cinq (05) années. Deux ans après l’expiration de leur mandat, ils continuent malheureusement à prendre des décisions, décisions qui le plus souvent vont à l’encontre de la volonté populaire.
À Saint-Louis par exemple, les autorités municipales font fi des vœux des populations. Nous ne reviendrons même pas sur cette bourde qui consistait à vouloir donner le nom de l’actuel Président de la République à l’avenue Général de Gaulle ( ce qui est inconcevable dans une démocratie digne de ce nom); ce qui avait suscité un tollé où des intellectuels de la trempe du Professeur Mary Teuw Niane et bien d’autres s’étaient prononcés pour opposer un niet catégorique à cette décision. Dernièrement, c’est la délocalisation du stade Me Babacar Sèye qui est sur toutes les langues. En effet, les autorités municipales se sont mis en tête de transformer l’actuel stade en centre d’affaires, ce que la quasi-totalité des populations refuse. Mais, contre toute attente, l’édile de la ville tricentenaire, dans une vidéo parue sur le net, dit à qui veut l’entendre, que personne ne le fera changer d’avis, et qu’il allait délocaliser le stade. Là, une question cruciale se pose: Les maires, doivent-ils imposer aux populations leur volonté ? Quel doit être le rôle des conseillers municipaux?Si nous nous basons sur la manière de procéder du premier magistrat de la ville de Saint-Louis, l’on est tenté de croire que ce dernier est omniscient et omnipotent. Eh oui, toute décision émanant de sa volonté est appliquée à la lettre, sauf si le Président de la République y interfère. Il oublie sans doute qu’il est devenu maire par la seule volonté des populations. À quoi nous servent aussi nos conseillers municipaux qui n’osent pas le contredire? Quels intérêts défendent-ils? Ceux de la population ou le leur? Déjà, en 2017, le maire, en compagnie du ministre des sports M.Matar Bâ, avait annoncé en grandes pompes la rénovation du stade Me Babacar Sèye, maquette à l’appui. Ce jour-là, ils avaient annoncé la disponibilité des fonds pour cela, au grand bonheur des populations saint-louisiennes. En plus, lors de l’inauguration de Dakar Arena, le Président de la République l’avait réitéré. Aujourd’hui, on nous parle de sa délocalisation et de la transformation de l’actuel site en centre d’affaires, et ce, sur un ton de défiance.
Alors là, il est plus que temps de rappeler à M.le Maire qu’il est là pour les populations et non le contraire! Les décisions qu’il prend, si elles ne sont pas voulues par les populations, doivent être jetées à la poubelle. Nous sommes tous pour un stade aux normes internationales, c’est une décision salutaire si on sait que le Sénégal n’en dispose pas. Cependant, dire que personne ne peut rien face à sa volonté de refondre l’actuel stade relève de l’utopie car, contre la volonté populaire, il ne le pourra pas! Et c’est le véritable problème de beaucoup de gens: il suffit qu’on les mette sur un piédestal qu’ils se croient tout permis. Un maire doit réfléchir sur comment mettre ses administrés dans d’excellentes conditions, ce en accord avec les populations concernées. Les affidés du maire de Saint-Louis ne cessent de se vanter de l’éclairage public; ils ne se sont pas sans doute rendus à l’avenue Macodou Ndiaye où, si ce n’était pas grâce aux chefs de familles qui, par souci de sécurité ont éclairé la devanture de leur maison, allait se trouver dans une pénombre indescriptible et ainsi inciter les délinquants à accomplir leurs forfaits. Ce n’est pas parce que les quartiers de Ndiolofène et Balacoss sont hyper éclairés que tout Saint-Louis l’est! Nous ne parlons même plus des caniveaux d’évacuation des eaux qui sont dans un piteux état. S’il y a un combat à mener, c’est dans ce sens et non dans un stade qui ne fournira ni sécurité, ni éclairage, encore moins un cadre de vie sain aux populations.
Encore une fois, personne n’est contre la construction d’un nouveau stade aux normes internationales à Saint-Louis; mais il se trouve que la quasi-totalité de la population est contre le fait de raser l’actuel stade pour en faire un centre d’affaires. La justification servie est laconique: l’emplacement du stade créé des embouteillages. Que nenni! Les matchs de football ne durent pas une année entière, alors qu’un centre d’affaires va fonctionner 365 jours/365. Qu’est-ce qui va le plus créér des embouteillages ?
Ce qui dérange encore plus les populations, c’est le « wax waxète » dont font montre les autorités municipales. Il s’y ajoute le fait qu’il y a un langage qu’une autorité ne doit pas tenir, qui plus est une personne à qui l’on a confié une tâche. Tenir certains propos discourtois équivaut à considérer les populations comme un troupeau qui emprunte le sentier voulu par le berger. Administrer une commune, c’est travailler exclusivement pour les populations y résidant. C’est aussi réfléchir sur comment résorber le gap économique, redonner de l’espoir à sa jeunesse en la formant et en mettant en œuvre les axes de son insertion socioprofessionnelle, sécuriser les populations, assainir la ville.
Ce n’est nullement faire du forcing pour ériger des infrastructures qui, au final, ne vont bénéficier qu’au millième de cette population. Pourquoi un centre d’affaires alors que les gens n’ont pas de formation, de boulot? Pourquoi vouloir délocaliser un espace mythique de l’histoire sportive de Saint-Louis pour ériger à sa place un espace qui ne va profiter qu’à une très infime partie de la population? Y aurait-il anguille sous roche? Pourquoi appeler à des concertations lorsque les décisions sont déjà actées? Les conseillers municipaux doivent-ils travailler pour le maire ou pour les populations?
Ces questions interpellent tout un chacun. Voulons-nous que notre chère Saint-Louis soit administrée de la sorte? Souhaitons-nous que nos avis soient balayés d’un revers de main? Ou voudrions-nous être des pantins à la solde d’un groupuscule qui va décider à notre place? Il est plus que temps que nous prenions les choses en main. Saint-Louis appartient aux Saint-Louisiens. Il nous appartient de veiller à ce que notre ville soit ce que nous voulons qu’elle devienne et non ce qu’une seule personne veut qu’elle soit!