En effet, M. Bakhoum reste convaincu que l’essentiel de la famille libérale, «ce n’est pas des “has been“», parce qu’il y en a qui étaient hors du Pds, depuis longtemps. «En matière de libéralisme, il y a des gens qui sont au Pds et se considèrent comme les vrais libéraux. Parce qu’en termes de libéralisme, jusqu’à nouvel ordre, on ne peut pas en parler sans Wade. Le reste, ce sont des particuliers qui sont allés chercher ailleurs», a-t-il indiqué. Mieux, il estime que ceux qui sont en train de rejoindre le pouvoir n’y vont pas «comme des militants du libéralisme».
Les nominations dans le nouveau gouvernement de l’ancien Premier ministre Idrissa Seck, non moins président du parti Rewmi et d’Oumar Sarr, ex-Secrétaire général national adjoint du Pds remet en orbite le débat sur les retrouvailles de la famille libérale. Et pour cause, beaucoup d’observateurs de la scène voient dans cette arrivée au sein de la mouvance présidentielle la prémisse de l’accomplissement de cette prophétie de l’ancien président de la République, Me Abdoulaye Wade sur les retrouvailles de la famille libérale pour une conservation du pouvoir pendant les cinquante prochaines années.
D’ailleurs, depuis cette date, des supputations autour du ralliement de ces deux anciens camarades libéraux au camp du pouvoir pour y rejoindre d’autres à l’image de Souleymane Ndéné Ndiaye, Modou Diagne Fada, Abdoulaye Baldé, Thierno Lô pour ne citer que ceux-là, ne cessent de polluer le débat public. Interpellé sur cette question, Dr Momar Thiam, spécialiste en communication politique et Directeur de l’école des Hautes études en information et en communication (Heic) ne semble pas être tout à fait d’accord avec cette idée.
Et pour cause, explique-t-il, « les retrouvailles de la famille libérale ne peuvent se faire sans Me Abdoulaye Wade et le Pds ». «Si le Pds ne fait pas partie de ces retrouvailles, je ne pense pas que cela puisse prospérer pour la bonne et simple raison que le Pds originel représente beaucoup en terme électoral alors qu’on ne sait pas encore ce que pèsent Oumar Sarr et ses camarades qui ont préféré quitter le navire libéral pour créer leur propre parti sur les flancs du Pds », a-t-il ajouté tout en faisant remarquer que le retour d’Idrissa Seck dans l’attelage gouvernemental suscite des questions autour de deux hypothèses.
Ainsi, pour ce qui est de la première hypothèse, il souligne que celle-ci devrait porter les motivations de cette décision. « Si la réponse porte sur les prémisses des retrouvailles de la famille libérale, on peut penser alors que cela puisse être et je dis bien puisse puisque je ne peux pas dire peut être. Donc on peut penser que cela puisse être parce qu’ils sont quand même deux mastodontes de la famille libérale même si en termes idéologiques, les étiquettes ont plus ou moins disparues surtout du côté du parti au pouvoir, l’Alliance pour la République constitué plutôt des gens qui viennent de la gauche, des trotskistes… » a-t-il laissé entendre.
Avant d’assimiler dans le cadre de sa deuxième hypothèse ces retrouvailles Macky Sall-Idrissa Seck à plutôt un jeu d’échec qui risque de tourner en la faveur du président Sall. « Si cette alliance s’est fondée sur un deal entre eux (Macky et Idy) comme certains le disent bien que moi je n’y crois pas trop, je dirais que c’est peine perdue pour la bonne et simple raison, comme je l’ai déjà dit, que c’est un jeu d’échec dès le départ qui suscite de ma part également deux hypothèses ».
Dans la foulée, il a souligné au sujet de sa première hypothèse que « Macky Sall veut maitriser davantage politiquement l’opposition et pour se faire, il commence par le candidat arrivée deuxième de la présidentielle, ce qui est bonne prise ». Et de l’autre côté, ajoute-t-il encore, toujours dans le cadre de cette hypothèse, « Idrissa Seck se dit de son côté qu’il faudrait que je retrouve l’appareil gouvernemental pour être plus visible et plus lisible en terme politique sinon, je risque d’être enterré politiquement. Dans ce cas, pourquoi ne pas prendre ce risque ? Donc, il a accepté le poste de président du Cese même s’il avait décrié cette institution, parce qu’il compte l’utiliser comme un instrument politique pour être présent sur la scène politique surtout de manière médiatique parce que le Cese n’émet que des avis ».
Toutefois, dans sa conclusion Dr Momar Thiam soutiendra qu’il ne parie pas sur un compagnonnage à longue durée de ces deux mastodontes politiques. «Je n’écarte pas également qu’à un moment donné, il (Idrissa Seck) va faire des recommandations ou propositions et si celles-ci ne sont pas acceptés, il pourrait dire que j’étais venu pour donner des propositions pour l’intérêt du Sénégal, ce n’est pas accepté, je pars. Cependant, à ce niveau, je dois préciser que celui qui détient vraiment les clés, c’est le président Macky Sall puisque c’est lui qui l’a nommé par décret et il pourrait anticiper pour le révoquer. Donc, dans les deux cas, il y a toujours un suspens qui semble plutôt favorable au président de la République ».
Jean Michell DIATTA et NANDO CABRAL GOMIS