Alors que l’Organisation mondiale de la Santé conseille aux gouvernements de « se focaliser » sur les cas cliniques, le Comité national de gestion des épidémies, par la voix du docteur Abdoulaye Bousso, a livré un autre avis. Son collègue, le Pr Moussa Seydi, reste fidèle à sa feuille de route, malgré les alertes de l’OMS sur l’hydroxychloroquine. Mieux, celui qui coordonne la prise en charge des malades de la Covid-19 a émis un avis qui tranche d’avec l’interprétation de l’étude publiée par l’instance sanitaire sur la contagiosité des asymptomatiques. Trois dissonances…
Rares sont les personnes asymptomatiques qui contaminent réellement d’autres, selon la cheffe du département des maladies émergentes et des zoonoses de l’OMS. Suffisant pour Mme Maria Van Kerkhove de conseiller aux gouvernements « de se focaliser sur les personnes infectées présentant des symptômes ».
En demandant ainsi de les « isoler et tracer au plus vite leur circuit », afin de mettre en quarantaine les contacts. « C’est ce sur quoi nous devons concentrer nos efforts : les cas cliniques de la Covid-19. Si nous suivons, avec prudence et efficacité ces cas-là, si nous parvenons à les mettre en quarantaine et à retracer les personnes avec qui ils ont eu des contacts et que nous isolons, à leur tour, ces sujets, nous pouvons radicalement freiner l’épidémie », renseigne une étude de l’OMS.
C’est exactement ce que les autorités sanitaires sénégalaises font, depuis le recensement du premier cas de Covid-19, le 2 mars dernier. Mais, le Comité national de gestion des épidémies ne veut pas s’en arrêter là et a souhaité passer outre les recommandations de l’OMS, en allant plus loin. À leur risque et péril.
Le Dr Abdoulaye Bousso a même pris le contre-pied de Mme Kerkhove, représentante de l’OMS. Le Directeur du Centre des opérations des urgences sanitaires a assuré dans le quotidien national Le Soleil que le Sénégal ne compte pas changer sa stratégie de prise en charge des personnes infectées de la Covid-19.
Priorité aux cas cliniques (selon l’OMS), le Sénégal pas prêt à changer de stratégie
Toutes les personnes testées positives, dit-il, seront prises en charge, y compris celles qui ne présentent pas de symptômes du nouveau coronavirus. Les recommandations de l’instance sanitaire ne rassurent pas, à ses yeux. Elles n’ont pas une base scientifique, selon lui.
Donc, se focaliser uniquement sur les cas cliniques de la Covid-19, c’est se tirer une balle dans le pied, a semblé dire le Directeur du Crous. On ne change pas une formule qui (pourrait) gagner.
Dans un de ses rapports publiés récemment, l’Organisation mondiale de la Santé indiquait que « les patients sans symptômes ne seraient pas vraiment dangereux ». « Même si la contamination par patients asymptomatiques est possible, ce n’est pas le vecteur de propagation le plus important du virus », lit-on dans le document..
Le professeur Moussa Seydi a apporté des précisions sur cette étude scientifique en lien avec la supposée non transmission du coronavirus par des asymétriques. En émettant un avis qui tranche explicitement avec l’interprétation de l’étude publiée par l’instance sanitaire.
Le Chef du service des maladies infectieuses de l’hôpital Fann a ouvertement regretté le fait que l’Oms ne tient pas compte d’une publication parue dans le VOL 30 du NEJIM (Journal de la médecine basée à Londres). Dans cette étude, l’auteur avait signalé la transmission du virus d’une personne asymptomatique à un homme d’affaires allemand.
« Les asymptomatiques transmettent la maladie, mais à un degré moindre. Ce n’est pas parce qu’on n’a pas de signes cliniques ou qu’on n’en a plus après traitement, qu’on n’a pas de virus dans son organisme » argumentait-il, en allant plus loin.
Vendredi 22 mai 2020, The Lancet avait clairement affirmé que l’usage de l‘hydroxychloroquine pour traiter le Coronavirus « exposait les malades au risque de décès et d’arythmie cardiaque ».
L’étude de la revue scientifique britannique avait porté sur 96 000 patients au sein de 671 hôpitaux du monde entier, dont plus de 15 000 ont été traités sur la chloroquine ou de l’hydroxychloroquine, associée ou non à un antibiotique.
Elle en arrive à la conclusion qu’elle est « incapable de confirmer un bénéfice,» de l’une ou l’autre des deux molécules et révèle que ces traitements sont, à l’inverse, «associés à une baisse du taux de survie à l’hôpital».
Le Sénégal reste fidèle à hydroxychloroquine associé à l’azithromycine, malgré les alertes de l’OMS
L’Organisation mondiale de la Santé (Oms) avait poursuivi le « diagnostic » annonçant ainsi la suspension de ses essais cliniques portant sur l’hydroxychloroquine. Jusqu’à ce que « les données » recueillies par les essais « soient examinées ».
Malgré ces alertes, les médecins sénégalais chargés de la gestion de cette pandémie, continuent à traiter les malades du Covid-19 avec l’hydroxychloroquine. Les membres du personnel médical promeuvent en effet le protocole qui fait encore des miracles.
Pas question d’y renoncer. D’autant que ceux qui bénéficient de ce traitement (à cause des contre-indications) ont un temps de séjour hospitalier plus long. Ceux qui en bénéficient guérissent vite, selon le directeur du Cous.
Ce dernier a fait l’éloge de ce protocole fidèle au professeur Didier Raoult. Il disait : « Le traitement avec l’hydroxychloroquine va continuer au Sénégal, l’équipe du professeur Moussa Seydi maintient son protocole thérapeutique ».
Le Chef du service des Maladies infectieuses semble plus concentré sur les urgences de l’heure, à savoir la prise en charge médicale des patients et la sécurisation des stocks de chloroquine. Même si en France, Emmanuel Macron a signé un décret abrogeant l’usage de l‘hydroxychloroquine.