Communication par le silence, les bons points de l’attitude d’Idrissa Seck

Encore une fois, le silence du leader du parti REWMI s’invite dans les débats depuis la dernière sortie du journaliste Cheikh Yérim Seck qui a voulu expliquer les raisons de ce mutisme. Depuis l’élection présidentielle de février 2019 où il est arrivé deuxième, Idrissa Seck ne sort que lors des grands évènements et ne s’exerce pas dans les déclarations solennelles. Sur les questions économiques et sociales qui font jaser de partout, lui ne semble pas ébranlé. Cette communication silencieuse, même si elle est décriée par bon nombre de Sénégalais a ses raisons d’être. Et à tous points de vue, l’ancien Premier ministre du Sénégal semble avoir raison de garder cette posture face à l’exigence d’un peuple qui préfère se nourrir de paroles au lieu d’actes.

« Si la parole est d’argent, le silence est de l’or ». Cet adage est connu de tous et des équivalents existent dans toutes les langues. Par exemple, en wolof, on dit souvent que « ku noppi mucc » (celui qui se tait est sauvé). Voilà pourquoi le silence d’Idrissa Seck, pourtant un as réputé de la communication, est bien calculé et vaut son pesant d’or. Contrastant avec le leader de PASTEF avec ses sorties intempestives, le deuxième meilleur à la dernière présidentielle s’est mis au retrait des questions politiques et sociales et se garde même d’attaquer les décisions du président Sall et de ses proches. Sur la question brûlante de l’électricité par exemple, Idy ne réagit pas même si au fond de lui tout porte à croire qu’il s’inscrit en faux contre ces mesures impopulaires.

Le silence stratégique d’Idrissa Seck est décrypté par bon nombre de personnes comme un amollissement ou plutôt une connivence avec Macky Sall. En tout cas les spéculations ne s’estomperont, même pas après une sortie de l’ex maire de Thiès. Entre ces « sûrement » et « peut-être », ces hypothèses tirées des cheveux pour expliquer l’omerta de M. Seck, ces conditionnels dont raffolent certains journalistes, il y a des vérités qui peuvent suffire à justifier cette attitude qui n’exprime en rien une indifférence aux problèmes qui secouent le pays.

Moins d’un an après la dernière élection, s’ériger en donneur de leçons à un régime à qui le peuple souverain vient de donner 58,26% de voix ne semble pas bien commode pour un politique qui veut faire chaque chose en son temps. Même après l’élection de 2012, le président de REWMI n’avait commencé ses « punchlines » contre le régime dont il était, qu’après un an d’exercice. Son fameux « doxagul » qui a précipité sa sortie de la coalition gouvernementale n’avait été prononcé qu’à l’occasion de la célébration de l’an 1 de Macky Sall en 2013. Dans sa zone de confort qui se trouve être le silence, l’homme se plaît à observer et à faire languir le peuple qui, comme s’il l’avait élu, lui demande toujours de parler. La dernière fois qu’Idrissa Seck avait obéi aux caprices de ce peuple plaintif, il en avait récolté des vertes et des pas mûres avec son énorme boutade sur Makka et Bakka. Chat échaudé craint l’eau froide, dit-on !

La deuxième raison pour laquelle le peuple doit se garder d’inviter Idy à la prise de parole est que lorsque ce dernier a sollicité ses voix, il a préféré tomber sous les charmes du candidat Macky Sall. Le temps le plus opportun à la parole étant la période de campagne électorale, l’actuel président du conseil départemental de Thiès avait fait le procès du régime sortant et mis en garde les Sénégalais contre tout renouvellement de son mandat. Mieux, il les invitait à lui faire confiance pour « redresser le pays ». Alors, ce serait vraiment manquer de respect à ce peuple souverain que de continuer de critiquer son choix tout juste après qu’il a fait avec toute la mesure de ses responsabilités. Lui laisser aussi goûter à l’amère saveur de son choix n’est pas qu’une possibilité mais une attitude républicaine.

La troisième et non moins importante explication de ce silence réside dans le fait que le temps des autres politiciens n’est pas forcément le temps d’Idrissa. Lors de la présentation du programme 1-3-15-45 de la coalition « Idy 2019 », Abdourahmane Diouf alors porte-parole de REWMI déclarait : « nous sommes les maîtres de nos propres horloges ». Cette phrase était prononcée en pour rassurer les militants par rapport aux autres chefs de partis de l’opposition qui ne cessaient d’occuper l’espace médiatique dans le but de surfer sur leur côte de popularité. C’est cet état d’esprit qui a toujours prévalu chez Idrissa Seck depuis qu’il est dans l’opposition contre Macky Sall : laisser le temps faire son travail.

C’est pourquoi flairer un deal entre le président Sall et Idrissa Seck, bien qu’en politique tout soit envisageable, me semble impertinent. Il faut se résoudre à accepter qu’on ne peut tout simplement pas demander à quelqu’un de parler alors que lui voulait avoir le mandat d’agir. De ce point de vue, le chef de REWMI n’a aucun compte à rendre sur son mutisme, lui-même devant demander des comptes à Macky Sall, comme tout autre citoyen.

Admettons même qu’il fasse une sortie sur la situation du pays, qu’est-ce que cela changerait si l’on sait que les différentes manifestations engagées par « Aar linu Bokk » n’ont jusqu’ici engendré aucune conséquence positive. Dans le silence d’Idy donc, et qui n’est pas nouveau, il n’y a vraiment pas de quoi fouetter un chat. Et le débat installé depuis quelques temps relève plus d’une diversion que d’autre chose.

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