Faire soulever la CAN au Sénégal pour la première fois de son histoire était son ultime objectif. Mais Sadio Mané, trop impuissant et sûrement épuisé par une saison à rallonge, a buté sur une Algérie vaillante et méritante.«Je suis prêt à échanger une Ligue des champions contre une CAN», assénait, en juin dernier dans France Football, un Sadio Mané conquérant. Défait par l’Algérie et sa baraka écrasante en finale de la CAN 2019 (0-1), le Red aura malheureusement besoin de ce type de troc illusoire pour assouvir son rêve de titre continental. Au moins pendant les deux prochaines années. Après une saison royale sous le maillot liverpuldien, Mané a vécu une finale frustrante, entre menace persistante et amer impuissance.
Impuissance, car Mané n’a même pas eu le temps de toucher la quille et de se mettre en évidence qu’une tentative lointaine de Bounedjah, contrée par un tacle malheureux de Sané, finissait avec bonne fortune dans le petit filet d’un Gomis circonspect (0-1, 2e). Menace, car il n’en fallait pas moins pour que Mané actionne le mode guerrier et se montre accrocheur sur Feghouli (5e). Son jeu de feinte lui permettait ensuite de se retrouver face au jeu, comme sur cette prise de risque devant Guedioura qui obligeait Bensebaini à faire faute (6e). Feghouli aussi était obligé de le stopper irrégulièrement (10e). Dans une rencontre charcutée par trop d’agressivité mal placée, l’ailier de 27 ans gratifiait le public d’un enchaînement crochet sur Zeffane et double contact derrière le pied d’appui pour éviter le retour de Mahrez (16e). Mais c’était réalisé dans son propre camp, trop loin de la zone de vérité. Et quand l’opportunité s’est présenté, après une percée de Ndiaye, il décalait trop tôt et trop mal Sabaly pour mettre le latéral bordelais en situation idéale de centre (18e).
Éreinté par une saison à rallonge
Pourtant, comme depuis les premières joutes du tournoi, le Sénégal donnait le sentiment que seule sa superstar pouvait faire la différence. Les hommes de Belmadi l’ont bien compris et ont cerné – souvent irrégulièrement, mais efficacement – le principal danger adverse. À l’instar de cette énième feinte et de cette énième percée stoppée par une énième faute de Bennacer (26e). Mais le jeu penchait étrangement à droite et offrait trop peu d’occasions à Mané de porter le danger pendant une bonne trentaine de minutes de jeu. Difficile à comprendre quand votre arme principale évoluait couloir gauche… Alors, comme à son habitude, le co-meilleur de Premier League en 2018-19 se réaxait après la pause pour aimanter les ballons et animer des coéquipiers trop imprécis et brouillons – sauf peut-être Sarr dont les fulgurances ont porté les principaux dangers vers les cages. Néanmoins, l’ancien Messin manquait lui aussi d’inspiration dans ses choix (55e), de vivacité dans ses premiers appuis (72e) et de justesse dans ses décalages pour croire en l’égalisation. Et manquait également à ses responsabilités lorsque l’arbitre accordait un penalty aux hommes de Cissé et que Niang prenait en main le ballon pour le frapper (59e). Finalement annulé par la VAR, ce coup de pied de réparation a toutefois témoigné de la perte de confiance dans l’exercice du leader des Lions de la Teranga, suite à deux manqués contre le Kenya et l’Ouganda. En fin de match, alors que tout un peuple ne comptait plus que sur lui pour trouver une brèche dans la forteresse verte, il semblait ereinté, sans jus. Compréhensible après une saison de treize mois et tant d’efforts accomplis. Compréhensible aussi tant les Algériens, bien en bloc et inusables, n’ont rien laissé à Mané, auteur d’une seule tentative (non cadrée) dans la rencontre. Tout au long de la compétition, le puissant Lion n’a pas toujours fait briller sa belle crinière mais sa combativité et sa générosité pour tenter d’emmener le Sénégal sur la route d’un premier titre sont à louer. Dans des possibles rêves de Ballon d’Or France Football 2019, cet échec en finale pourra aussi compter. Nul doute qu’on le verra revanchard en 2021, date de la prochaine CAN, affamé par trop d’années de disette.