Comme Icare qui a volé très haut et s’est approché du soleil, Me Abdoulaye Wade s’est brûlé les ailes. Comme s’il n’a pu tirer les leçons de 2012, en ne se doutant jamais que cet autre « fils putatif » qu’est Macky Sall était encore plus doué politiquement que l’autre qui l’avait réclamé publiquement.
Jamais dans ses rêves, le Président Abdoulaye Wade ne pouvait imaginer que le Chef de l’Etat Macky Sall pouvait se montrer comme étant son adversaire le plus coriace et le vaincre aux urnes à l’issue de l’élection présidentielle de 2012. Et que, le Président Macky Sall était capable de ruser face à l’adversité la plus farouche, de manœuvrer pour pouvoir, obtenir à nouveau le suffrage nécessaire auprès des Sénégalais pour un second mandat.
Pourtant de 2012 à 2019, le Président Macky Sal a su tellement user de manœuvres, de coups pour se défaire de tous ses adversaires qui pourraient se montrer coriaces dans son chemin et l’empêcher d’obtenir un second mandat. Le chemin a été parsemé d’embûches. Macky Sall aura su le traverser. Son second et dernier mandat en poche, qu’est-ce qu’il lui fallait encore ? Montrer aux Sénégalais qu’il n’est mû que par l’intérêt de la nation, quitte à la jouer en douce pour baliser le terrain au dauphin qu’il s’est choisi, en mettant encore en touche les adversaires qui tomberaient dans son piège. Et pan, dans le mille.
Dans sa longue et si riche carrière, Me Abdoulaye Wade avait jusqu’ici démontré qu’il restait un fin politicien, capable de dérouter l’adversaire. L’ancien Président de la République, feu Léopold Sédar Senghor n’avait pas tort en le surnommant ‘’ndiombor’’ (lièvre). Aussi que quand, il a été dans l’opposition que quand il a été pouvoir, jusqu’à sa chute en 2012, Me Abdoulaye Wade s’est affirmé en bête politique. Seulement, il a un faible. Son idée obstinée de faire un jour Karim Wade, son « fils biologique » Président de la République du Sénégal.
Parce que Karim Wade a toujours maille avec la justice, ce qui l’oblige dans un « exil forcé » au Qatar, et le rend inéligible, Me Abdoulaye Wade voit rouge et perd toutes ses raisons. Ce 28 mai, alors que les Sénégalais, dans toutes leurs diversités, sont tombés au moins d’accord sur la nécessité de se retrouver avec le Président Macky Sall pour un dialogue national, lui Me Abdoulaye Wade a dit non. Exigeant d’abord l’amnistie de son fils ainsi que la grâce pour Khalifa Ababacar Sall avant de s’asseoir à la table. Karim Wade n’aurait pas eu des déboires avec la justice, Me Abdoulaye Wade ne se serait sans doute jamais préoccupé de ce qui serait arrivé à Khalifa Sall.
Que cela aurait pu être facile pour lui et l’aurait grandi dans l’épreuve, si Me Abdoulaye Wade avait accepté de participer au dialogue national, et en ce moment parmi les points essentiels soulevés, réclamer l’amnistie pour Karim Wade, la grâce pour Khalifa Sall. Ce jeudi 28 mai, c’est l’obstination de Me Abdoulaye Wade qui a fini par lasser tout le monde, y compris dans les rangs de son propre parti le Parti démocratique sénégalais (PDS) qui ne sortira indemne de cette épreuve. Des ténors du PDS, comme son secrétaire général adjoint, Oumar Sarr, des ténors de la trempe de Cheikh Tidiane Sy, Cheikh Sadibou Fall, Ibra Diouf Niokhobaye ont su lui dire non et rejoindre le dialogue national. A n’en pas douter, Me Abdoulaye Wade, sur ce coup, a perdu et s’est lui-même isolé.
Et, lors des échanges qui ont lieu lors de la cérémonie officielle du dialogue national, les participants qui ont compris qu’il fallait prendre au mot le Président de la République Macky Sall, si tant ses intentions sont sincères, sa volonté d’instaurer un climat apaisé est réelle, c’est d’amnistier Karim Wade, de faire libérer Khalifa Sall. Macky Sall n’a plus aucun autre choix, lui qui a déclaré solennellement hier, qu’il fera appliquer toutes les conclusions issues du dialogue national, que d’accepter que Karim Wade et Khalifa Sall soient libres de toutes poursuites judiciaires.
Une victoire à mettre dans l’actif de ceux qui ont accepté d’aller à ce dialogue national. Me Abdoulaye Wade ne pourra jamais accuser de « traîtres » ceux qui dans son camp, et contre sa volonté, ont participé au dialogue national. Car, ce sont eux, qui finalement ont trouvé la stratégie la plus payante. Ce n’est d’ailleurs pour rien de voir Oumar Sarr faire cette déclaration sur sa participation au dialogue, en souhaitant qu’il « aboutisse à la libération de Khalifa Sall et le retour de Karim Wade au bercail ».
Il ne faut pas se voiler la face. Cette divergence dans les rangs du PDS va entraîner fatalement une autre déchirure dans ce parti. Une déchirure que Me Abdoulaye Wade aurait pu éviter, s’il ne s’était arc-bouté dans la position radicale qu’il a adoptée. Malgré monts et marées, le dialogue national se tient.