Pont de la Sénégambie : entre continuité territoriale et rupture économique

Les présidents Adama Barrow de la Gambie et Macky Sall du Sénégal procèdent ce 21 janvier 2019 à l’inauguration du pont de la Sénégambie long d’un peu moins d’un kilomètre et financé à  hauteur de 90% par la Banque africaine de développement pour un coût de  prêt de 50 milliards francs Cfa. L’ouvrage permet désormais de relier  la région sud du pays sans être obligé de perdre des heures voire des journées pénibles dans cette partie du territoire gambien (Farafenni). Ainsi la continuité territoriale est assurée pour le Sénégal et les sénégalais. Mais du coté du peuple gambien, cette continuité est synonyme de rupture d’une activité économique florissante qui faisait vivre de milliers d’entre eux  à l »endroit exact où se tient le pont de la Sénégambie qui entre dans le cadre de l’intégration sous régionale via le corridor Dakar, Banjul, Bissau, Cotonou, Abidjan et Lagos.

En effet, le « ferry » de Farafenni, les usagers de la transgambienne en partance pour le sud du pays ou vice versa sont unanimes à reconnaître les multiples tracasseries dont ils sont confrontés à l’étape du bac. Les acteurs économiques vous diront tout simplement que c’est infernal et même risqué de transporter de la marchandise via le bac de Farafenni. « Les pertes sont énormes en terme de temps et de gains. Nos produits pourrissent sous nos yeux sans qu’on puisse réagir. Nous sommes soumis au diktat du ferry. Ils nous arrivent de passer plusieurs nuit à la belle étoile en attendant de pouvoir traverser le fleuve » s’est plaint un usager de la transgambienne sur les ondes d’une radio sénégalaise.

« C’est parce que tout simplement il y a un grand deal organisé par les agents qui travaillent autour du ferry. Il faut juste voir la personne qu’il faut et payer la somme qu’il faut pour être épargné d’une longue attente. C’est une raquette tenue au fil des ans par ces agents » s’est-il plaint avant de conclure en ces termes: « le deal est fini maintenant. »

Les récriminations des gambiens interrogés sur cet aspect de la question ne font que confirmer la chute d’une activité commerciale très lucrative qui s’est développée au fil des années au ferry de Farafenni. Des familles entières perdent ainsi leur source de revenus. Des piroguiers qui assuraient jadis la traversée moyennant quelques dalassi de préférence le Cfa sont soumis au chômage forcé. Le commerce des produits gambiens très prisés par les sénégalais qui empruntent le ferry va disparaître. A ceux-la, s’ajoutent les tenanciers des gargotes qui vont, de facto perdre une clientèle qui comptait sur eux pour les tenir compagnie et noyer la longue et pénible attente de la traversée du fleuve Gambie à Farafenni.

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