À la veille de son investiture, Bougane Gueye, leader de «Gueum Sa Bopp», l’optimisme en bandoulière, évoque la présidentielle de 2019, fait le procès de la classe politique et prend la défense du secteur privé national
Le 11 août dernier, le président du mouvement «Guem sa Bopp» mettait fin à un suspense longtemps entretenu en annonçant, à la surprise générale, sa candidature à la prochaine présidentielle. Mais pour être dans les starting-blocks au matin du 24 février, Bougane Guèye Dany avait lancé un défi à ses sympathisants qui devraient, selon lui, recueillir pas moins de 500.000 signatures en guise de parrainage. Après deux mois de collecte de parrains, il prépare activement son investiture prévue le 1er décembre prochain. A moins d’une semaine de cet événement et au cours d’échanges à bâtons rompus avec «L’As», le leader de «Gueum Sa Bopp», l’optimisme en bandoulière, évoque la présidentielle de 2019, fait le procès de la classe politique et prend la défense du secteur privé national. Il n’a pas manqué de décliner son programme articulé autour de 19 points.
BILAN DU PARRAINAGE A UN MOIS DE LA DATE DE CLOTURE DU DEPOT DES CANDIDATURES
La question du parrainage n’a jamais été un goulot pour Gueum Sa bopp. Dès l’entame de cette opération, nous avions déclaré que notre objectif n’était pas 52.000 ou 67 000 mais plutôt 500 000 à un million de signatures. De manière très claire, cela veut dire que même si nous sommes novices sur le terrain, nous avions des arguments à faire valoir et le projet de société qu’on a proposé aux Sénégalais était l’émanation d’une concertation nationale, d’une écoute attentive des populations à travers des tournées que nous avons faites un peu partout dans le pays. Cela dit, nous n’avons aucun problème sur le parrainage. Nous continuons de mener nos activités et partout où nous allons, nous arrivons avec notre discours ; on ne parle même pas de parrainages. Parce que ce sont les Sénégalais qui se sont levés d’une manière très volontaire pour parrainer la candidature de Gueum Sa Bopp, la candidature de Bougane Gueye. En vérité, nous n’avons jamais eu de problème sur la question du parrainage, même si c’est une sorte de filtre qui permet à l’organisateur d’être juge et partie en même temps. Ce sont eux (Ndlr : les tenants du pouvoir) qui fixent les règles du jeu et nous sommes obligés de nous y conformer. Défi de collecter 500.000 à 1.000.000 de signatures pour être candidat à la présidentielle Si nous disons que nous allons vers l’investiture, cela veut dire que nous avons beaucoup plus que 500.000 signatures. Si on avait moins de 500.000 parrains, on allait juste se contenter d’une déclaration. C’est dire de manière claire que nous sommes prêts pour jouer les grands rôles dans cette élection présidentielle du 24 février 2019.
FAITS MARQUANTS LORS DES TOURNEES A L’INTERIEUR DU PAYS
Je suis tout le temps sur le terrain, au contact des Sénégalais en milieu rural. Hier (Ndlr : l’entretien a été réalisé le vendredi 23 novembre), j’étais à Lambane Wilane dans la région de Louga. Depuis huit ans, le forage de ce village est en panne. Ils n’ont pas d’infrastructure sanitaire etc. A l’étape de Bono Ngedj (dans la commune de Mboro), quelqu’un m’a appris qu’on leur a installé, depuis 1980, des poteaux électriques, mais qu’ils n’ont pas d’électricité. Cela fait 38ans.
Dans la lettre que j’ai envoyée au président de la République, je disais que j’aimerais bien que le programme routier soit publié pour que les Sénégalais aient une idée réelle de ce programme que le gouvernement est en train de dérouler. A Lambaye, à Gawane, à Refane ; sur l’axe Baba Garage Keur Samba Kane, l’axe Baba Garage-Touba Toul, Baba Garage-Ngaye Mekhe ; les populations vivent dans des conditions extrêmement difficiles. On accède dans ces villages de manière extraordinaire. On se demande comment les populations font lorsqu’elles ont un malade la nuit entre 3h et 4h du matin. Il n’existe pas de voies de dégagement ni de routes praticables. A Andal et Thiamrouss, l’eau dite potable que boivent les populations ne devrait même pas être donnée à un cheptel. Pour se rendre à quel point le mal est tellement profond, on n’a même pas besoin d’aller hors de Dakar. Il suffit tout simplement de faire un tour à Malika, Keur Massar et Tivaouane Peulh pour constater que de nombreux quartiers n’ont accès ni à l’eau ni à l’électricité. Etant au contact des citoyens, j’ai compris leur désarroi et pourquoi ce sentiment de rejet qu’ils sont en train de nourrir par rapport à ce système et à la classe politique sénégalaise. Pourtant, les pouvoirs qui se sont succédé ont reçu énormément d’argent pour régler ces problèmes. Au moment où on parle d’émergence, je considère que le Sénégalais a d’abord besoin d’une autonomie. Œuvrons pour que le Sénégalais puisse vivre dans la dignité. Aujourd’hui, c’est cela le combat de Gueum Sa Bopp.
IMPOPULARITE ET CANDIDAT DES RESEAUX SOCIAUX
Il suffit tout simplement de regarder les images que nous faisons diffuser sur les réseaux sociaux et à travers des publireportages à la télévision, on se rendra compte de l’engouement populaire dont jouit Gueum SaBopp. Notre mouvement est en train de nourrir un immense espoir auprès des populations. Bougane Guèye et Gueum sa Bopp incarnent cette nouvelle voie pour développer le Sénégal. Presque 60 ans après les indépendances, le Sénégal est toujours dans le peloton des pays les plus pauvres, les plus endettés et les plus corrompus. Ce tableau noir doit être rectifié aujourd’hui par la jeunesse sénégalaise. Et c’est ce que nous sommes en train de faire. On me taxe de candidat des réseaux sociaux, mais je suis loin d’en être un, parce que ma présence est assez moyenne sur les réseaux sociaux. J’ai choisi de travailler sur le terrain, d’être au contact des Sénégalais, de les écouter pour comprendre leurs problèmes. Je vous rappelle que depuis 11 mois maintenant, nous avons visité au moins 2100 localités et parcouru plus de 85.000 kilomètres. Et aujourd’hui, on ne peut qu’être satisfait de l’engouement et de l’espoir que nous sommes en train de susciter au niveau des Sénégalais.
L’IMPUISSANCE DES PRIVES NATIONAUX FACE AUX MULTINATIONALES
Au Sénégal, l’Investissement Direct Etranger (IDE) représente 2,77% de notre PIB au moment où le Rwanda enregistrait en 2007 un bond de 41% pour près de 3 milliards de dollars d’investissement qui a permis d’avoir 33.000 emplois. En Ethiopie, c’est près de 275 entreprises qui se sont installées pour cinq milliards de dollars et cela a permis de créer 130.000 emplois. De 1960 à maintenant, qu’est-ce que les IDE ont créé chez nous. Nous sommes à moins de 30.000 emplois de 1960 à maintenant. Ces entreprises étrangères viennent gagner nos marchés par le truchement et l’appui de nos autorités locales pour ensuite transférer les fonds à l’étranger. Cela n’a rien à voir avec quelqu’un qui vient investir au Sénégal. Le secteur privé ne peut pas se développer par lui-même. Il faut qu’il soit encadré, supporté par la politique économique gouvernementale et privilégié. L’OMC prévoit des clauses qui permettent à des secteurs d’activités dans des pays donnés de dire que sur cinq ans, on protège telle filière. Et si on avait protégé la filière de la couture, on aurait eu des tailleurs milliardaires. C’est valable pour les autres secteurs d’activités. Rien ne nous empêche de le faire. Malheureusement, nous avons en face des gens qui pensent que les seules ressources disponibles dans un pays, c’est les impôts et la Douane. Et lorsqu’il y a une baisse des recettes douanières, ils pensent que c’est une catastrophe. On tape sur la table pour dire qu’il y a une baisse des recettes douanières. Et pourtant quand la douane est forte et puissante dans un pays, c’est le déluge et la catastrophe.
LES RAISONS DE SA DEMARCHE SOLITAIRE ALORS QUE L’ERE DES MESSIES EST REVOLUE
Je suis là pour combattre le système. Tous ceux, qui ont touché, servi ou permis à ce système d’être ce qu’il est aujourd’hui, sont des gens à combattre. Tous ceux qui ont eu à entretenir ce système sont à combattre. Cela dit, je déclare que je ne suis pas dans une logique de soutenir quelqu’un au deuxième tour, parce que j’y serai. Actuellement, je réfléchis sur ceux qui devraient pouvoir me soutenir. Je suis plutôt dans cette logique. Donc, j’ai dit que je serai au deuxième tour.
A L’ORIGINE DE SON ENGAGEMENT
Le déclic de mon engagement a été l’affaire de la vente des migrants. Dès que j’ai appris cette histoire, je me suis dit voici des jeunes qui, certainement, n’ont pas bénéficié de partage d’expérience. D’autant qu’avec la somme de 400.000 FCFA pour effectuer un voyage, il y a des gens qui ont réussi au Sénégal et qui sont devenus aujourd’hui des milliardaires. Certains ont commencé avec 75.000 FCFA et moins que cela et qui ont réussi. J’ai décidé de partager ma petite expérience. Je n’ai pas encore réussi, mais je suis sur la voie. Si je partage cette expérience avec des jeunes Sénégalais, cela leur permettra d’économiser deux, trois, voire quatre années de leur vie. Car l’expérience, c’est la somme des erreurs commises. Dans la vie, les jeunes doivent comprendre de manière très claire que si on veut réussir, il faut d’abord échouer. Dès l’instant qu’on a peur de l’échec, on ne réussira jamais. La peur de l’échec traduit quelque part le niveau de réussite… A notre avis, il faut désormais ouvrir de nouvelles perspectives et une nouvelle orientation pour ce pays. Le train du Sénégal n’a pas de problème de vitesse, mais plutôt d’orientation. Cas de violence dans les couples Je crois qu’il serait bien de poser cette question à un sociologue qui pourra répondre de façon plus approfondie. Je n’ai peut-être pas le recul nécessaire. Mais ce qui est important, c’est que dans certaines situations, les gens doivent avoir un tout petit peu de réserve. Avec la prolifération des réseaux sociaux, ça amplifie les choses à un niveau extraordinaire. Il urge de prendre des dispositions. Il faut éradiquer la violence quelle qu’en soit la forme. Pour y arriver, il faut mettre en place des dispositions règlementaires et sécuritaires. On a vu ce qui s’est passé dans la banlieue dakaroise, à Keur Massar et à Tivaoune Peulh. Si vous prenez ces deux localités, c’est plus d’un million d’habitants pour deux casernes de Gendarmerie qui ne font même pas 40 gendarmes. C’est quand-même dramatique. Et dans notre programme, dans les 19 points, on a parlé des aspects sécuritaires.