Assurément, le 04 avril est une fête importante pour tous les Sénégalais. Elle est celle de l’Armée qui est une fierté pour toute la Nation, mais aussi de la jeunesse qui est notre espoir d’un avenir radieux.
C’est pour cela que lors de cette fête, les Sénégalais devraient être très excités tant elle est importante en symboles. Elle consacre aujourd’hui notre accession à la souveraineté internationale. Elle est notre volonté commune à vivre ensemble les moments de bonheur comme de malheur que nous réserve la vie.
Malheureusement, la fête passionne moins, aujourd’hui. Les temps ont changé, la fleur s’est fanée comme dirait le chanteur. La fête n’attire plus et ceux qui restent chez eux regardent à peine la télévision.
Ce désintérêt envers le 04 avril s’explique par de nombreux facteurs. Le premier est que l’indépendance tant chantée n’est qu’institutionnelle, formelle. Le drapeau, l’hymne, une Constitution, une Armée, etc. ne suffisent pas.
Notre pays a 58 ans aujourd’hui depuis son indépendance. Il devrait être autonome dans ses choix d’orientation politique, stratégique, sécuritaire, économique, social et culturel et sportif.
Malheureusement, dans bien des secteurs comme l’économie, nous sommes encore dépendants de l’extérieur, tant du point de vue de l’aide que du diktat de leurs multinationales qui ont réussi à envahir tous les secteurs stratégiques de notre économie.
Sur le plan militaire, nous ne sommes pas sûrs que les accords de défense signés çà et là, nous laissent une marge importante d’autonomie quant à notre capacité à assurer notre propre sécurité.
Il faut encore largement s’appuyer sur le renseignement d’autres pays dont les intérêts ne sont pas toujours les nôtres.
La conséquence de toutes ces politiques, c’est que la paupérisation avance à grands pas et les populations ont du mal à assurer leurs besoins primaires.
Les inégalités sociales, le caractère dispendieux des dépenses de l’Etat, l’excès de postes ministériels et d’institutions budgétaires, ont fini par convaincre les plus sceptiques de notre propre incapacité à assurer notre propre bien-être.
Si à ce tableau ainsi résumé il faut ajouter la restriction de certaines libertés, surtout de manifestations, l’emprisonnement d’opposants, la difficulté à organiser des élections transparentes, nous aurions alors tendance à rejoindre le tableau sombre des Etats africains à crise prolongée comme le Togo, la Guinée Bissau, etc.
C’est vrai que le Sénégal n’en est pas encore là, mais à force de trébucher sur la voie de notre propre rayonnement démocratique, nous aurons du mal à être encore cité en exemple.
Toutes choses et bien d’autres qui refroidissent bien des ardeurs. Les populations sont de plus en plus désabusées et heurtées par une élite politique devenue des professionnels de la politique au sens de la ruse, de la manipulation et de la dilapidation des fonds politiques. Pis, à ce tableau, il faudrait ajouter la maladresse des orientations et des actions menées, traduisant une incompétence notoire de nos dirigeants.
Quand nos jeunes préfèrent mourir que de rester chez eux, nos paysans n’arrivent plus à vendre leurs récoltes, que tous les secteurs sociaux sont en grève, qui aura encore le cœur à la fête ?
Nous avons en effet perdu notre propre capacité à rêver.
Il y a une rupture, un hiatus entre les dirigeants et les populations. Le fossé est devenu trop grand.
A force d’être déçu par des politiques inadaptées et dictées par d’autres, le Sénégalais a perdu son sourire. L’angoisse du lendemain incertain envahit une jeunesse en perte de repères et de références.
A ce propos, il est important que nos dirigeants sachent que l’important n’est pas de gérer le quotidien, mais d’impulser des dynamiques novatrices et catalyseurs d’espoirs.
Il faut une vision, de l’audace, du courage, de l’honnêteté et le sens de l’équité et de la justice.
Si nous n’avons aucun dirigeant qui répond à ce profil, nous devrions alors interroger notre conscience collective, notre substrat culturel.
Assane Samb