L’histoire du bad boy du football sénégalais reste passionnante, aussi bien sur les terrains que dans la vie en générale. Il a levé un coin du voile sur l’aspect relatif à ses relations avec son père. Poignant, son récit…
On est tenté de vous renvoyer un peu à votre enfance et vous demander de nous raconter comment vous l’aviez passée à Balacoss…
C’était vraiment dur pour moi, comme pour tous les enfants de Balacoss. Je suis né à Dakar, mais j’ai grandi, en effet, à Balacoss, à Saint Louis. On peut dire que c’est la plus grande ville du Sénégal.
C’était dur surtout pour mes grands-parents de nous faire vivre et subvenir à nos besoins. Vous étiez combien d’enfants?
Ma mère n’en a eu que deux là-bas. Mais nous vivions avec tous les cousins dans une même maison. Il y avait les enfants de mes oncles, de mes tantes et ceux de mes cousins. On était environ une douzaine ou plus dans la maison. C’était vraiment dur à gérer. Mais moi, je n’avais qu’une idée en tête : réussir dans le football. Comme je savais un peu taper dans un ballon, j’avais décidé de me concentrer sur le football pour aller le plus loin possible. Je voulais me faire plaisir, mais aussi à mes grands-parents qui faisaient tout pour nous voir réussir. C’était dur, vraiment dur. Vous savez, en Afrique, les riches resteront riches et les pauvres toujours pauvres. Mes grands-parents avaient tout fait pour nous rendre heureux et comme j’étais leur préféré, ils m’ont beaucoup aidé à réussir dans le football. J’ai donc tout tenté pour les rendre heureux à leur tour.
Votre père aussi était footballeur, non?
Oui, il était footballeur en effet. Mon père est quelqu’un que j’aime beaucoup, même si je n’ai pas grandi à ses côtés. En fait, il est parti très tôt pour faire aussi sa carrière…
Il est parti en vous laissant à vos grands-parents?
Oui, il m’a laissé, mais parce qu’il n’avait pas le choix, le pauvre !
Vous ne lui en voulez donc pas, c’est ça?
Non, je ne lui en veux vraiment pas. Je prends même ça comme une bonne chose, car je pense que le fait qu’il m’ait laissé a fait que je sois devenu plus fort mentalement. C’est cela qui m’a donné cette force mentale qui m’aide à vivre partout sans problème.
Avez-vous repris contact avec lui?
Oui, je l’ai vu il n’y a pas longtemps, quand on a rencontré le Sporting de Lisbonne. Il est toujours au Portugal et s’occupe de sa petite famille à Lisbonne…
Donc vous avez des demi-frères et des demi-sœurs…
Oui, j’ai deux sœurs portugaises et il a sa femme et ses amis là-bas.
Comment ont-elles vécu votre première rencontre?
Elles étaient contentes tout comme moi. En fait, je voulais emmener ma fille pour que mon père fasse sa connaissance. Il a vu ma fille aînée qui lui ressemble tellement et aujourd’hui je crois que c’est mon devoir de la lui emmener, parce qu’on ne sait jamais ce que la vie nous réserve tellement elle est courte. Je tenais tellement à lui présenter sa petite-fille.
Vous ne vous êtes pas revus depuis combien d’années?
On va dire quelque chose comme 22 ans. Mais on s’appelle, depuis, tous les jours pratiquement.
Ça devait vous peser, toutes ces années d’absence, non?
Oui, bien sûr, mais vous savez, nous les Africains, on est très forts mentalement. On sait encaisser les coups de la vie. On sait prendre les choses du bon côté malgré la dureté de la vie. Le fait que je ne l’ai pas vu, c’est vrai qu’au début, je me posais beaucoup de questions. Et je me disais même qu’un jour, je lui ferai regretter cela. Mais en grandissant, j’ai changé et mes pensées avec moi. On ne réfléchit pas comme lorsqu’on est gamin.
C’est votre côté altruiste et généreux qui prend le dessus à chaque fois…
Je dois remercier mes grands-parents pour m’avoir inculqué la notion du pardon. C’est quelque chose de très important dans la vie. Vous savez, si j’ai réussi, c’est parce que beaucoup de gens m’ont aidé. Pourquoi ne pas aider les autres à mon tour aujourd’hui?
En lisant cela, beaucoup de jeunes dans le même cas vont peut-être revoir leur copie en se disant qu’il vaut mieux pardonner au final. C’est magnifique ce que vous dites là…
Bien sûr qu’il vaut mieux pardonner, car après tout le problème s’est posé entre lui et ma mère. Ce n’était pas le mien. Il n’y a qu’eux qui connaissent le pourquoi et le comment des choses. Moi, tout ce que je sais aujourd’hui, c’est que j’ai un père et une mère qui m’ont mis au monde et je me dois de les respecter toute ma vie et leur obéir.