Jugés par la Chambre Criminelle de Dakar, ce que risquent Imam NDAO et Cie

Selon la nouvelle réforme judiciaire entrée en vigueur au Sénégal, le terrorisme est passible de peines pouvant aller jusqu’à la prison à vie. Des condamnations à temps de 5 à 10 ans sont aussi prévues par le Code pénal modifié.

Des sanctions encourues par la trentaine de présumés terroristes qui comparaissent mercredi prochain, avec possibilité de «circonstances atténuantes».

En matière de terrorisme, les peines d’emprisonnement peuvent aller jusqu’à la perpétuité (ou prison à vie), selon la nouvelle réforme judiciaire en vigueur au Sénégal. Des condamnations à temps sont aussi prévues. La «non dénonciation d’actes terroristes» et le «recel de terroriste» sont désormais criminalisés et punis d’une peine d’emprisonnement de 5 à 10 ans et d’une amende pouvant aller jusqu’à deux millions FCfa. Les délais de garde à vue sont de 96 heures renouvelables deux fois et peuvent aller jusqu’à 12 jours. Contrairement au droit commun ou ceux-ci ne peuvent dépasser 48 heures pour les délits et 96 heures pour les crimes, que sur autorisation du procureur de la République. Toujours selon la nouvelle loi, les perquisitions et les visites domiciliaires des policiers et des gendarmes se font de jour comme de nuit. Enfin, le délai de prescription en matière de terrorisme est de 40 ans, contrairement au droit commun où il varie entre un an (pour les contraventions), trois ans (pour les délits sauf le détournement qui est de 7 ans) et dix ans pour les crimes.

Ces sanctions font suite à la criminalisation du phénomène du djihadisme, à travers la modification des dispositions des articles 279-1 à 279-5 du Code pénal qui sont abrogées et remplacées par les articles 279-1 à 279-19 pour réprimer les actes de terrorisme et les actes assimilés. L’article 279-1 indique : «Constituent des actes de terrorisme punis des travaux forcés à perpétuité, lorsqu’ils sont commis intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but d’intimider une population, de troubler gravement l’ordre public ou le fonctionnement normal des institutions nationales ou internationales, de contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque par l’intimidation ou la terreur… ». Cette réforme judiciaire a ses forces tout comme ses faiblesses. Selon Me Assane Dioma Ndiaye, «avec cette loi, c’est presque tous les articles du Code pénal qui sont repris mais en y ajoutant que sont incriminés les actes commis dans le but «d’intimider la population». «Tout dépendra de ‘la perception’ que les maîtres de poursuites et les enquêteurs auront. Cela pose problème aux défenseurs des droits humains que nous sommes. Le terme terrorisme n’est pas défini de façon précise», relève le président de la Ligue sénégalaise des droits humains (Lsdh).

A en croire Me Ndiaye, cette loi peut dissuader les Sénégalais de participer à des manifestations pacifiques de peur de tomber sous le coup de l’article 279. Ce qui est une restriction d’une des libertés les plus fondamentales, à savoir la liberté de manifestation. «L’apologie du terrorisme demeure la plus grande problématique. Beaucoup sont poursuivis au Sénégal pour cela, mais le législateur devrait définir plus clairement cette notion», estime l’avocat. Il reconnaît, tout de même, que le terrorisme est un phénomène qu’il faut combattre, mais dans le respect des droits humains de la personne poursuivie. La Ligue sénégalaise des droits humains n’est pas la seule organisation de défense et de promotion des droits humains à exprimer des craintes par rapport aux nouvelles lois sur le terrorisme. La même position est partagée par l’organisation Amnesty international Sénégal pour qui «cette loi n’est pas compatible avec le respect des droits de l’homme». La positon est également celle de l’Association des jeunes avocats du Sénégal (Ajas) où ses membres parlent de «lois liberticides».

Du côté du ministère de la Justice, on justifie ce durcissement de la sanction par le besoin de sécurité des populations. «Le Sénégal a, depuis 2007, choisi le droit comme bouclier et arme contre le terrorisme. Avec la recrudescence du phénomène, le besoin s’est fait sentir de revoir la législation. Ainsi, deux lois ont été adaptées avec un accroissement des garanties de procédure et des palettes de sanction. A mon avis, la loi n’est pas antidémocratique. Mais elle sera jugée à l’épreuve de la pratique», soutient-on.

Avec Walf

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