Cinq ans de compagnonnage dans la coalition Benno Bokk Yaakaar: Les alliés entre déception et satisfaction

Le chef de l’Etat, Macky Sall, a réussi la prouesse de conserver sa coalition présidentielle, Bennoo Bokk Yaakaar, de 2012 à nos jours. Toutefois, force est de constater que dans beaucoup de partis politiques alliés, des voix se lèvent de plus en plus soit pour réclamer un bilan du compagnonnage qui a duré plus de 5 ans, soit pour demander tout bonnement un divorce avec ladite coalition à cause de «mauvais traitement» subi de la part du parti présidentiel. Une occasion choisie par Sud quotidien pour recueillir les avis des uns et des autres sur ce compagnonnage qui n’a vraisemblablement pas fait que des heureux. Extraits.

ZATOR MBAYE, ANCIEN DÉPUTE DE L’AFP : «Le bilan ne saurait être assimilable à un nombre arithmétique de postes de responsabilités»

Sur le bilan de Bennoo Bokk Yaakaar, il faut rappeler que le bilan ne devrait pas se mesurer à l’aune de postes de responsabilités pour les différentes chapelles politiques. Si non, on risquerait simplement de donner lieu à un dégoût des populations. Les populations ont élu le président Macky Sall pour que celui-ci puisse gérer le pays. Le bilan du compagnonnage devrait se mesurer à l’aune de réalisations physiques. Nous autres de l’Afp, c’est en ces termes que nous jugeons le bilan. Mais le bilan ne saurait être assimilable à un nombre arithmétique de postes de responsabilités ou de chaises.

Le bilan de ces cinq ans s’appelle Couverture maladie universelle. Avant 2012, ça n’existait pas au Sénégal. C’est un point positif. Le bilan s’appelle le Pudc qui n’existait pas et qui a pour mission quatre choses : l’électrification rurale, l’eau rurale, les pistes rurales, l’allégement des travaux des femmes. Le bilan se juge à la lumière des bourses de sécurité familiale qui n’existaient pas avant. Il pourrait être assimilé à cette santé économique. On a aujourd’hui un taux de croissance qui avoisine les 7% alors que, quand le président Macky Sall prenait les rênes du pouvoir, on était à 1,7%. C’est ça, les points essentiels du bilan. Mais, il faut éviter simplement, nous autres politiques, d’assimiler le bilan à un nombre mathématique. Cela pourrait amener les Sénégalais à être dégoutés de la classe politique. Je pense que ce n’est pas respectable, ce n’est pas sérieux. La politique devrait aller au-delà. Nous autres, en tant qu’associés à l’exercice du pouvoir, parce que le pouvoir est exercé par le président Macky Sall qui, de son propre gré, a associé les alliés à l’exercice du pouvoir. Ce qu’il a quand même réussi parce que la coalition vit depuis plus de cinq ans. Cela veut dire que, nous autres alliés, nous nous devons d’avoir un comportement d’efficacité, mais d’efficacité moins encombrante, moins visible. Parce que, quand on aide quelqu’un, je crois qu’on ne devrait pas prendre beaucoup d’initiative, encore moins tirer sur le bilan…Tout ce que le président de la République est en train de réaliser aujourd’hui est complètement dissout et absout par ces différentes sorties des chapelles politiques qui n’ont aucun sens. En tout cas, nous au niveau de l’Afp, nous pensons objectivement qu’il y a des choses qui ont été réalisés en 5 ans et que si le président Macky Sall continue et maintient ce cap-là, nous sommes persuadés qu’à l’horizon de 2024, au terme du second mandat du président, quand le Sénégal aura fini de voir son premier baril de pétrole exploité, le pays pourrait même, au delà même de l’émergence, avoir des ambitions d’un pays développé.

DR MELYAN MENDY, PORTE-PAROLE DU RSD SECTION ZIGUINCHOR : «Depuis 2012, nous partons ensemble, nous gagnons ensemble, mais nous ne gouvernons pas ensemble»

Je dirais que c’est une frustration parce que nous avons constaté une chose. Depuis 2012, nous partons ensemble, nous gagnons ensemble, mais nous nous ne gouvernons pas ensemble. Quand on prend le parti le Rassemblement pour le socialisme et la démocratie, dans la partie Sud du Sénégal, qui constitue une bastion, le fief de son Secrétaire général national Robert Sagna, nous avons constaté qu’il y a beaucoup de déceptions quant à notre compagnonnage avec l’Apr dans le cadre de Benno Bokk Yaakaar. De 2012 à aujourd’hui, lorsque nous regardons les nominations qui ont été faites au profit des responsables locaux de l’Apr, que ce soit à Ziguinchor ou à Bignona ou à Oussouye, en face nous avons un néant. Là où nous avons décompté à ce jour 28 nominations soit au niveau des ministères, des directions nationales, régionales, il se passe que le Rsd n’a aucune nomination. Pourtant, ce ne sont pas des cadres qui manquent à ce niveau. Dans tous les domaines possibles, il y a les cadres du Rsd, qui sont en Casamance, partout sur l’ensemble du territoire national, qui méritent sur le plan politique d’être écoutés, ces cadres-là sont laissés en rade. Ça, c’est une frustration.
La frustration est d’autant plus grande qu’au sortir des dernières législatives, là où nous avons mis le paquet pour véritablement faire triompher la liste de Benno dans la région de Ziguinchor, puisque que la coordonnateur régional de Benno se trouve être le Sg national du Rsd, le camarade Robert Sagna, nous avons constaté qu’après cette victoire, lorsque quelque part nous avons de forts espoirs que nous aurions un représentant dans l’attelage gouvernemental, au sortir de la liste des ministres, lors du dernier remaniement, nous avons été laissés en rade. Depuis ce jour, jusqu’au moment où je vous parle, toutes les nominations sont en train d’être faites lors des conseils ministériels les mercredis, aucune nomination n’a été faite au profit d’un responsable du Rsd, aussi bien au niveau de Ziguinchor, qu’au niveau de Bignona et d’Oussouye. Tous les postes électifs que nous avons eus, nous les avons obtenus avec d’âpres batailles au sein de la coalition pour pouvoir aujourd’hui dire que nous avons 2 députés, un à Bignona, une à Ziguinchor. Pis encore, entre 2012 et 2017, entre ces 2 législatures, nous avons perdu un poste. Le Rsd se retrouve aujourd’hui au niveau de l’Assemblée avec 02 députés au lieu de 3. C’est comme si nous sommes en train d’accompagner des gens qui ne viennent vers nous que lorsqu’ils ont besoin de nos voix pour gagner. Lorsqu’il s’agit de gérer ensemble, ces gens nous oublient et ils ne pensent qu’à eux. C’est vraiment une déception que nous pouvons constater lors de ces 5 dernières années dans le cadre du compagnonnage que nous avons avec le parti du président de la République et les autres partis dans le cadre de Benno Bokk Yaakaar. Nous sommes déçus. Nous ne perdons pas espoir puisque nous pensons et nous souhaitons que le président de la République corrige le tir. Mais, sachez que jusqu’au moment où nous parlons, la déception est parlante du coté de nos militants.

ZAHRA IYANE THIAM, MINISTRE CONSEILLER DE L’APR : «Au sortir de 5 ans de compagnonnage, il serait bon de s’arrêter et de revoir… le fonctionnement de notre coalition»

Je pense que le bilan du compagnonnage au niveau de Benno Bokk Yaakaar peut être analysé à deux niveaux : au niveau de la gouvernance et au niveau du fonctionnement même de la coalition. Je pense qu’au niveau de la gouvernance, nous avons un bilan globalement satisfaisant, puisqu’on ne peut pas avoir un satisfécit de 100%, ça n’existe nulle part. Mais, quand même, sur la base des critères qui sont établis, nous pouvons avoir une idée de ce que doit être le bilan. A ce niveau-là, sur le principe de solidarité, d’inclusion, d’équité, du gagner ensemble et gouverner ensemble, nous pouvons valablement dire que cela est globalement satisfaisant. Puisque la coalition est représentée au niveau du gouvernement, au niveau de l’Assemblée et au niveau des autres institutions.

Maintenant, au niveau du fonctionnement en tant que tel de la coalition, nous pouvons valablement dire qu’on peut mieux faire. Cela, sur la base des avis des alliés. Maintenant, ce qu’il faut garder à l’esprit, c’est que pour les alliés tout comme l’Apr chacun peut se réclamer valablement de certaines choses. Si nous voulons aller ensemble, il nous faut faire des sacrifices. Aujourd’hui, quand bien même certaines pensent que l’Apr étouffe ses alliés, je pense que nous avons une coalition de plus de 200 mouvements en plus des personnalités indépendantes. Je pense que le point fédérateur qui pourrait nous garantir une coalition solide, durable, qui traversera toutes les crises qui ne manqueront pas de nous rattraper dans le fonctionnement de notre coalition, c’est d’abord le fait de vouloir donner des résultats positifs dans les préoccupations de nos compatriotes. C’est également le respect et l’équité ne veut pas dire égalité. Il veut dire que chacun à hauteur de sa contribution puisse avoir un champ sur l’échiquier à l’échelle de la coalition. Maintenant, cela ne peut pas se définir par un seul parti ou une seule sous-coalition, mais au cours d’instance de Benno sur la base de concertations et d’échanges. Je pense qu’au sortir de 5 ans de compagnonnage, nous pouvons dire que nous avons traversé plusieurs élections gagnantes. Nous nous acheminons vers la perspective de 2019, il serait bon de s’arrêter et de revoir un temps soit peu le fonctionnement afin de l’aligner beaucoup plus sur les positions des uns et des autres.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici