L’ancien procureur adjoint auprès des Chambres africaines extraordinaires (CAE), Youssoupha Diallo, a plaidé mercredi à Dakar pour la mise en place du fonds d’indemnisation des personnes reconnues comme des victimes du régime de l’ancien président tchadien Hissein Habré.
« Une justice sans réparation est une justice avec un goût d’inachevé. Je pense qu’il faut qu’on aille vers la création d’un fonds qui va polariser toutes les indemnisations, et cela a même été prévu dans le statut’’ des CAE, a-t-il déclaré au cours d’une conférence de presse.
Cette rencontre avec les journalistes s’inscrivait dans le cadre d’une session de formation des journalistes ouest-africains sur la justice pénale internationale.
« Il y a des biens immobiliers à Dakar’’ appartenant à Hissein Habré « notamment deux maisons, et on a bloqué quelques comptes bancaires mais c’est loin du compte par rapport au montant des réparations’’, a indiqué Youssoupha Diallo.
Ces biens « ne pourront pas permettre de couvrir les 82 milliards’’ de francs CFA représentant le montant des réparations destinées aux victimes, même une évaluation n’en a « pas été faite », a ajouté l’ancien procureur adjoint des CAE, une juridiction créée au sein du système judiciaire sénégalais, avec l’accord de l’Union africaine (UA), pour connaître des crimes internationaux commis au Tchad du 7 juin 1982 au 1er décembre 1990, période correspondant au régime de l’ancien président Habré.
Revenant sur ce procès, il a dit qu’il y avait eu « plusieurs déplacements de la commission rogatoire à Ndjamena. Il était question de faire comparaître d’autres accusés mais le Tchad n’a pas totalement coopéré ».
« Il est question que les autres accusés soient transférés à Dakar, mais on ne leur a jamais notifié leur accusation, c’est un problème procédural auquel on a fait face », a fait observer le magistrat.
Au total 7396 victimes attendent d’être indemnisées à l’issue du procès de Hissein Habré, condamné le 30 mai 2016 à la prison à perpétuité pour « crimes contre l’humanité », « crimes de guerre » et « crimes de torture » commis durant sa présidence (1982-1990), une décision confirmée par la Cour d’appel de Dakar.
Sur cette base, la justice accorde à chaque survivante de viol et d’esclavage sexuel 20 millions de francs CFA, 15 millions CFA à chaque survivant de tortures et de détention arbitraire ainsi qu’aux anciens prisonniers de guerre.
Les victimes indirectes doivent pour leur part obtenir réparation à hauteur de 10 millions de francs CFA, sur un total de plus de 7 396 personnes éligibles aux réparations, sachant que 3 489 autres, n’ont « pas fourni de documentation suffisante’’ mais pourront s’adresser au fonds d’indemnisation des victimes créé par l’Union africaine (UA).