Plus de trois semaines après la disparition de l’aéronef de Sénégalair, ni les recherches et encore moins l’enquête n’ont permis de faire la lumière sur les circonstances véritables de cet accident. Mais certains éléments importants ayant précédé ce drame viennent gonfler le voile qui entoure cette affaire. Il s’agit principalement d’un rapport de l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique (ASECNA) sur l’état de navigabilité de l’aéronef qui aurait dû le clouer au sol.
Nos sources bien introduites dans le milieu complexe de l’aviation civile sont formelles. L’ASECNA, qui gère principalement la gestion des espaces aériens de ses pays membres, avait vu venir la catastrophe étant donné la non-fiabilité de certains instruments de bord de cet aéronef de Sénégalair.
Au-delà de ce constat, l’ASECNA a saisi l’Agence nationale de l’aviation civile et de la météorologie (ANACIM) dont les experts ont pu prendre connaissance du contenu des trouvailles de leurs collègues de l’ASECNA. Nos sources indiquent que ce sont surtout les problèmes liés à l’altimètre de l’aéronef qui inquiétaient déjà les experts de la navigation aérienne qui ont posé les yeux sur les conclusions de l’ASECNA. Presque tous s’accordaient sur le fait que cet appareil de Sénégalair deviendrait un danger volant s’il reprenait les airs.
L’argument de massue est qu’en réalité, l’aéronef en question signalait aux contrôleurs et aux autres appareils une position où il n’était pas. En clair, il pouvait bien voler à une altitude qui n’est pas la même que celle indiquée par les appareils de mesure. Si bien que les erreurs de calculs inhérents à cette défaillance de l’altimètre l’exposent à des risques plus qu’imminents de collision avec d’autres appareils comme cela semble avoir été le cas le samedi 5 septembre dernier.
D’ailleurs, bien que toutes les données analysées montrent que cet appareil a été bien pris en charge à son départ de Ouagadougou jusqu’à Bamako et ensuite par la tour de contrôle de Dakar, tous ces services aéroportuaires et l’armada militaire et civil mobilisés pour le trouver restent vains puisque sa dernière position exacte échappe à tous les calculs effectués jusqu’ici.
Et les mêmes questions qui se sont posées dès le début de l’accident restent jusqu’ici sans réponse, à savoir : « Qui a bien pu autoriser un tel appareil à prendre les airs, qui plus est, à transporter un malade, lui-même étant « dangereusement malade ? » « Dans un contexte mondial marqué par des mesures de sécurité aéroportuaires au sol et dans les appareils qui frisent parfois la paranoïa, comment en est-on arrivé à un tel laxisme au Sénégal? »
Aucun de nos interlocuteurs ne veut s’aventurer sur le terrain glissant que présentent les réponses potentielles à nos questions. Car, c’est un secret de polichinelle de dire que l’Agence nationale de l’aviation civile et de la météorologie (ANACIM) est compétente pour apprécier le niveau de sécurité à bord des vols signalés comme étant très éloignés des standards admis, surtout après l’alerte documenté de l’ASECNA. En effet, l’ANACIM est officiellement chargée de la gestion des activités de l’aviation civile et de la météorologie ainsi que de l’élaboration de la réglementation technique applicable, tout comme il lui échoit la supervision de la sécurité et de la sûreté de l’aviation civile au Sénégal.
C’est pourquoi nous avons joint M. Maguèye Marame Ndao, Directeur général de l’ANACIM, pour savoir s’il a bien reçu un rapport documenté de l’ASECNA alertant du danger que constitue cet avion de Sénégalair. Sa réponse est sans équivoque : « Je n’ai jamais vu un quelconque rapport de ce genre. » Et lorsque nous le relançons pour demander si l’ANACIM n’a pas reçu un document sur l’état de l’appareil de Sénégalair, la réponse de M. Ndao est la suivante : « Je ne peux me prononcer sur un quelconque rapport à la seule condition de le voir. Il m’est impossible de vous dire quoi que ce soit parce que vous avez eu vent d’un rapport. »
Puisque l’ombre épaisse qui plane sur cette affaire reste loin d’être élucidée, tous les espoirs des familles des victimes reposent sur les conclusions de l’enquête en cours avec l’assistance des techniciens français du Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA). Au demeurant, le rapport de l’équipage de Ceiba qui a frôlé l’aéronef de Sénégalair, provoquant sa chute, a déjà été épluché par les enquêteurs.
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