Le nombre pléthorique de listes qui seront dans les starting blocks pour briguer les suffrages des Sénégalais, inquiète les acteurs de tout bord.
En effet, 45 lots de bulletins seront dans les bureaux de vote, contre 25 en 2012, soit plus du double. Il se pose alors la question du temps que prendra chaque électeur pour voter. Si l’on sait que l’électeur a l’obligation de prendre tous les bulletins et une enveloppe pour ensuite se rendre dans l’isoloir, il lui faudra au moins 100 secondes pour prendre les bulletins et l’enveloppe.
Une fois dans l’isoloir il lui faudra au moins 60 secondes pour choisir son bulletin et le mettre dans l’urne.
45 listes, le double de 2012
Si la distance entre l’isoloir et l’urne fait au moins 10 m, ce petit déplacement coûtera à l’électeur environ 30 secondes. En somme c’est en moyenne 190 secondes, 3 mm 10 s par électeur qui doit accomplir son devoir. Pour un bureau de vote de 400 électeurs on aura donc besoins de 21 heures 11 mm pour faire voter tout le monde. C’est-à-dire que les bureaux de vote qui s’ouvrent 07 Heures et dont le vote démarre à 8 h, devront rester ouvert jusqu’à 5 heures du matin pour permettre à tout le monde de voter. En d’autres termes on votera jusqu’au petit matin et pour la première fois au Sénégal, le vote se déroulera sur deux jours. On comprend alors l’inquiétude des uns et des autres si on ne change pas les règles du jeu.
Certains ont évoqué récemment une loi d’urgence pour permettre aux électeurs de voter aux Législatives en un laps de temps. Il est vrai que dans le protocole de la CEDEAO, Section II- des Elections, en son article 2 il est dit qu’ « Aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les six (6) mois précédant les élections, sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques. »
C’est dire donc que si les uns et les autres le souhaitent vraiment, « une large majorité des acteurs politiques » doit sans difficulté aucune aboutir à un « consentement ». En effet, si la volonté politique est réelle, les tenants du pouvoir d’aujourd’hui et une autre bonne partie dans l’opposition qui avaient en son temps proposé et adopté le système du bulletin unique pour les élections (Assises Nationales ) devront facilement s’accorder.
16 milliards de francs CFA pour les élections
Donc en théorie et par respect des engagements pris, un consensus devant aboutir au bulletin unique devrait passer comme lettre à la poste. Et les avantages sont énormes. D’abord notre démocratie en gagnerait en transparence, surtout si l’on sait que dans beaucoup d’endroits du pays, le vote du citoyen est « acheté ». En outre, ces législatives risquent d’être les élections de tous les records. En effet, 45 listes c’est 675 millions F Cfa en caution, 351 millions de bulletins à imprimer. Ce ne sont pas moins de 16 milliards de nos francs qui seront consacrés à ces joutes électorales prévues le 30 juillet. Prévue dans le budget pour 5 milliards, l’enveloppe risque d’exploser.
La facture d’impression risque d’atteindre pas moins de 5 milliards 250 millions si le ministère pratique le prix habituel des 15 francs par bulletin. Il s’y ajoute que les enveloppes pourront connaître une facture égale à 3,5 milliards au minimum. Sans compter le budget d’organisation du Ministère de l’Intérieur qui doit payer le personnel de l’administration dédiée à cette tâche, le transport du matériel et les frais de fonctionnement des préfectures.
Pour près de 14 000 bureaux de vote, il faut compter que le président et ses assesseurs sont rémunérés et la facture globale va dépasser les 500 millions. Le budget interne du ministère risque de frôler les 3 milliards en charges. La CENA également qui envoie des superviseurs dans les tous bureaux de vote, devra disposer d’un budget au moins égal à 3 milliards pour faire face à ses charges.
Le CNRA aussi qui supervise la couverture médiatique devra également disposer d’une enveloppe au moins égale à 1 milliard pour couvrir tous les candidats avec la RTS. En tout une somme de près de 16 milliards risque d’être mobilisée pour ces élections. Pour un pays qui veut se mettre sur la voie de l’émergence, plus de 16 milliards c’est trop. Or le budget pour un bulletin unique tournerait autour de 90 000 000 F pour les impressions et 30 000 000 F pour les enveloppes. Si l’on y ajoute les frais obligatoires (organisation, CNRA et CENA) nous aurons une élection à moins de 8 milliards.
Pourquoi pas un bulletin unique?
Les détracteurs du bulletin unique évoquent très souvent l’analphabétisme de bon nombre de Sénégalais, surtout en milieu rural, mais ils oublient que tous les sénégalais régulièrement inscrits sur les listes savent au moins mettre une croix en guise de signature. Une bonne et très large campagne de sensibilisation de l’Etat, des partis politiques, de la société civile et des partenaires sociaux, pourrait permettre au citoyen de voter et de bien voter. Tout compte fait, pour des raisons de transparence, de fiabilité, de rapidité et de coût, pourquoi pas un bulletin unique ?