En cette période de choix des candidats à la députation, les chefs de partis politiques ou de coalitions sont constamment sous pression difficilement tenable. La quasi-totalité des responsables à la base, quel que soit leur niveau de responsabilité dans leurs partis, leurs parcours politiques, leur niveau intellectuel ou leurs professions sont candidats à la députation. Cela est vérifiable in situ dans les différents départements à travers le pays. Tous les moyens sont bons pour les candidats déclarés ou non pour se faire entendre par le chef : violence physique, verbale ou morale, intimidation, chantage, menaces etc.
Ce phénomène regrettable existe aussi bien dans la mouvance présidentielle que dans celle de l’opposition mais dans une moindre mesure. Si l’opposition rencontre actuellement autant de difficultés pour confectionner ses listes départementales et nationale c’est parce que tout le monde est en réalité candidat à la candidature. La mission d’un député à l’Assemblée Nationale est rarement prise en compte par les responsables qui déclarent leur candidature à la députation. Au niveau des coalitions, il est aussi rarement tenu compte de l’aptitude du prétendant à assumer la fonction de député à l’Assemblée Nationale. Ainsi, les futurs députés ne sont pas toujours investis parce capables de faire correctement le travail parlementaire. Cela est regrettable et a des conséquences sur la crédibilité du parlement et est à l’origine de l’impopularité des députés du Sénégal qui, pour l’écrasante majorité d’entre eux, ne connaissent pas leur mission de parlementaire. La 12ème législature a été, de l’avis des spécialistes et des députés eux même, la plus nulle depuis l’indépendance du Sénégal. La complexité du travail parlementaire, le niveau nécessaire pour maitriser les textes législatifs devrait nécessiter l’adoption d’un profil consensuel exigible pour être parlementaire.
Traditionnellement au Sénégal, la violence lors de la confection des listes de candidats députés est l’apanage de la mouvance présidentielle. C’est sans doute pour cette raison que le Président de BBY multiplie, depuis quelques temps, les appels à la raison et à la retenue pour bannir toutes formes de violence et d’indiscipline lors des investitures. On a encore en mémoire les violences verbales et injures grossières à Guédiawaye et les bagarres à Kaffrine et ailleurs. Le Président Macky Sall, Président de l’APR et de BBY, a condamné fermement la violence sous toutes ses formes et l’indiscipline dans nos activités politiques en cette période de confection des listes de candidats à l’élection législative du 30 juillet 2017. Très attaché à la non-violence et à la discipline dans la coalition BBY, le Président Sall semble prêt à sévir contre les contrevenants à ses directives.
Concernant l’opposition, elle a réussi la prouesse de former une coalition de dimension nationale mais le plus dur reste à faire. Les leaders de la coalisation affirment urbi et orbi que la coalition n’est pas mise en place pour le partage de postes de députés mais tout le monde sait que chaque parti membre de Manku va chercher à avoir le maximum de d’élus le 30 juillet 2017.
Les négociations seront donc rudes et l’éclatement de Manku n’est pas à exclure. Même si cette coalition de l’opposition arrive à confectionner ses listes sans dommages, il est probable qu’il y ait le 30 juillet 2017 un vote sanction en faveur de BBY. Pour les mêmes raisons, d’éventuels frustrés de BBY pourraient aussi voter pour Manku. Il y a donc un vrai casse-tête des chefs de partis ou de coalitions pour éviter les votes sanctions et les violences à l’occasion de la confection des listes de candidats à la députation. Chaque mouvance a ainsi intérêt à gérer au mieux ses responsables et militants à l’occasion de la confection des listes de candidats pour engendrer un minimum de frustrés et de violences. La concertation, la prévention, l’équité et la fermeté doivent être privilégiées par les coalitions pour arriver à un consensus surtout au niveau des départements.
En matière d’investiture au niveau départemental, l’APR de Birkelane a apporté une innovation qui ne manque pas d’intérêt pour les autres formations politiques ou coalitions de partis, qu’elles soient de l’opposition ou de la mouvance présidentielle.
Pour pouvoir choisir son candidat député départemental à temps, au début du mois d’avril 2017, l’APR de Birkelane a convoqué une Assemblée Générale (AG) pour recenser dans la démocratie, les candidats à la candidature. A la question qui est candidat à la députation, 39 personnes se sont manifestées spontanément.
Ce nombre de postulants très élevé a surpris tout le monde. Dans ce lot de 39 républicains candidats, on trouve tous les corps de métiers : instituteurs, professeurs de lycée, professeur d’université, agriculteurs, éleveurs, maçons, tailleurs, administrateurs civils, ingénieurs, banquiers, chefs d’entreprises, ménagère, restauratrices, aide-soignant, commerçants, opérateurs etc. Cette pléthore de candidats reflète pour certains une vitalité de l’APR dans le département, pour d’autres, une conséquence de la non structuration du parti. Pour gérer cette situation inédite, les responsables du parti ont proposé la création d’une commission départementale de classement des candidats permettant de réduire le nombre de prétendants à 10 puis à un et son suppléant. Cette idée géniale a été acceptée et validée par l’AG. Le travail a été ainsi confié à un groupe de sages présidé par le maire de Touba Mbella. Les 39 candidats ont pris l’engagement de s’approprier les décisions de la commission, qu’elle leur soit favorable ou non. Sur cette base, la structure départementale de APR a mis au point 20 critères de sélection qui ont été validés par les candidats après un débat animé mais courtois et serein.
Les prétendants ont été auditionnés dans les mêmes conditions par la commission puis classés par ordre de mérite sur la base des 20 critères. Suite à ce classement des prétendants, les 10 premiers de la liste ont été retenus comme candidats à la candidature de l’APR. Une réunion de restitution des travaux de la commission a été organisée pour informer les candidats et recueillir leurs observations. Au cours des échanges entre parties prenantes, dans une atmosphère conviviale, empreinte de fraternité et d’empathie, aucune violence ou excès de langage n’a été noté. Ainsi, avec une large majorité, le classement des candidats proposé par la commission a été accepté et validé. Ce classement incontesté des prétendants pourrait alors être utile au Président de BBY pour opérer le choix ultime du candidat à la députation du département de Birkelane.
L’innovation de l’APR de Birkelane est un moyen qui semble efficace pour éviter les violences et les excès de toute nature. Toutefois, le succès de la méthode dépend de la sagesse des membres de la commission et de l’impartialité avec laquelle le classement les candidats est fait.
L’innovation de Birkelane pourrait être utilisée partout où il n’y aurait pas de consensus sur les candidats à investir. Elle peut permettre d’éviter les violences et les frustrations post investitures pouvant engendrer des votes sanctions pour lesquels aucune coalition n’est à l’abri.