Alors que la Tunisie est confrontée à une grogne sociale croissante, le président Béji Caïd Essebsi a appelé, mercredi, l’armée à protéger les sites de production des mouvements sociaux susceptibles d’empêcher leur exploitation.
L’armée tunisienne protègera dorénavant les sites industriels des mouvements sociaux susceptibles d’empêcher leur exploitation, a annoncé mercredi 10 mai le président Béji Caïd Essebsi, alors que le pays est confronté à une grogne socio-économique croissante.
« Nous savons que c’est une décision grave mais elle doit être prise », a-t-il déclaré dans un discours très attendu, prononcé au Palais des congrès devant un parterre de personnalités. Il a expliqué que « l’État a le devoir de protéger ses ressources, les ressources du peuple tunisien (…). La démocratie, sa condition essentielle c’est l’État de droit ».
Entre les mouvements sociaux, le limogeage de deux ministres importants (Finances et Éducation) et la démission du chef de l’instance chargée d’organiser les prochaines élections municipales, en décembre, la Tunisie connait en effet des semaines agitées.
L’actuel gouvernement d’union de Youssef Chahed, à l’image de ses prédécesseurs, est confronté à des mouvements sociaux qui prennent régulièrement l’allure de sit-in bloquant des routes et les accès à certains sites de production. Et ce, en particulier dans les régions de l’intérieur du pays, dont celle de Tataouine (sud). « Il n’y aura plus de barrages, de routes coupées », a mis en garde Béji Caïd Essebsi.
« Toute personne voulant manifester peut manifester, dans le cadre de la loi (…). Mais si tu veux manifester et que la première chose que tu fais, c’est stopper la production de la Tunisie (…), si vous bloquez notre peu de ressources, où allons-nous? », a lancé le président.
« Agiter la rue »
Il a ajouté que, une fois que l’armée commencerait à protéger les sites, traiter avec elle serait « difficile ». « Je vous mets en garde dès maintenant », a-t-il prévenu.
Le président a par ailleurs critiqué les appels à manifester contre un projet de loi dit de « réconciliation » qu’il a proposé à l’été 2015, et qui est dénoncé par la société civile et certains partis comme une tentative de « blanchir la corruption ».
« Le président de la République, dans le cadre de ses prérogatives constitutionnelles, a pris une initiative. Bonne ou pas bonne, lui pense qu’elle est la solution. Mais le Parlement l’examinera (…), c’est la règle du jeu », a dit Béji Caïd Essebsi en accusant ses détracteurs d’ »agiter la rue ».
Mettre en doute « le pouvoir législatif, cela je ne l’accepte pas », a-t-il martelé en se posant en garant des institutions.
Si la Tunisie, unique pays rescapé du Printemps arabe, a réussi jusqu’à présent sa transition politique, elle n’arrive toujours pas à relancer son économie, six ans après la chute de l’autocrate Zine El Abidine Ben Ali.
Tandis que le déficit public continue de se creuser, la croissance a plafonné à 1 % l’an dernier. Tunis espère un taux d’environ 2,5 % en 2017.
Avec AFP- FRANCE 24