Portrait. Brigitte Macron n’est jamais très loin de son mari. Portrait de la nouvelle première dame.
«Cela fait 20 ans que je suis prête à tout avec lui!» Nous sommes au tout début du mois d’octobre 2016. La campagne en est à ses balbutiements. Emmanuel Macron n’a pas même encore officialisé sa candidature. Cette petite phrase, lâchée par Brigitte Macron aux journalistes intrigués par son omniprésence, prend aujourd’hui une saveur toute particulière. La voilà Première dame.
«Je ne me projette pas», n’a cessé de répéter l’épouse du candidat au cours de la campagne. «J’ouvre les portes les unes après les autres», nous avait-elle ainsi confié au creux de l’hiver. Une certitude, toutefois, l’aventure serait quoi qu’il arrive hors normes. «Elle savait, en épousant Emmanuel, que c’était un garçon extrêmement brillant et qu’il ne resterait pas haut-fonctionnaire toute sa vie», glisse Juliette Bernard, une amie du Touquet. En les mariant, Léonce Deprez, le maire de la cossue station balnéaire, où le couple passe week-ends et vacances, n’avait-il pas prévenu? «Un bel avenir vous attend», a-t-il alors soufflé aux jeunes époux, ne songeant pas seulement à la vie maritale… Prémonitoire.
«Capable de citer le Rouge et le Noir dans le texte»
Hors normes, leur histoire l’est depuis ses prémices. Lorsqu’elle rencontre son futur époux, Brigitte Macron est professeur de français au lycée La Providence, à Amiens. C’est l’une des héritières de la famille Trogneux, chocolatiers réputés. Elle est mariée, mère de trois enfants. Dans les couloirs de l’établissement jésuite, l’enseignante est appréciée. «Elle était charmante, toujours de bonne humeur, très nature. Mes deux filles l’ont eue comme prof. Elles étaient impressionnées», se souvient son ancien collègue, Arnaud de Bretagne, alors professeur d’Histoire-Géo, d’un certain… Emmanuel Macron. «Très cultivée», aux dires de ses amis, «capable de citer le Rouge et le Noir dans le texte», c’est aussi une maman et une grand-mère poule, «très attachée» à sa famille.
Le destin de Brigitte Auzière (son nom de femme mariée) bascule lorsqu’elle accueille ce jeune élève aux cheveux mi-longs, de 24 ans son cadet, dans sa classe de théâtre. Arnaud de Bretagne ignore, à l’époque, tout de cette romance. Mais avec le recul, il reconnaît que le tabou ne dut pas être évident à briser. «Imaginez la situation…» Des années plus tard, Emmanuel Macron lui rend cet hommage, dans son livre «Révolution» : «Le vrai courage, ce fut le sien.»
Au soir du premier tour, il remercie encore Brigitte, «toujours présente et encore davantage, sans laquelle je ne serais pas là». La conquête de l’Elysée, c’est ensemble qu’ils l’ont menée. Brigitte Macron est de tous les déplacements. Comme son mari, elle prend soin de serrer les mains qui se présentent, a un mot pour chacun. Il lui arrive aussi d’organiser ses propres visites. Au premier rang des meetings, elle prend parfois des notes. L’ex-prof est soucieuse de la réception des discours par le public, tout comme du costume de rechange ou de la retouche maquillage. Et bien sûr, de l’agenda du candidat.
«C’est du ciment»
Son omniprésence fait parfois grincer les dents des élus qui soutiennent son mari. Notamment, après la diffusion du documentaire «Macron, la stratégie du météore». Car, elle est… partout, y compris dans les réunions. D’autres, en revanche, apprécient qu’elle mette «de l’humour dans tout ça». Qu’elle soit l’une des rares à pouvoir «mettre un taquet» à son candidat de mari. Ou à lui passer la commission, lorsqu’il est trop pris pour répondre au téléphone. Certains lui reprochent son côté people. Car s’ils attirent la lumière, les Macron savent aussi en jouer. Comme un argument de campagne supplémentaire… Ils sont, en la matière, conseillés par Michèle Marchand, patronne de l’agence Bestimage et «papesse de la presse people». Leurs vacances et leurs sourires s’étalent en Une des magazines.
Surjoué? «Ce que l’on voit sur les photos, c’est le reflet de la réalité. Ils ont toujours été comme ça. Ils sont à deux en permanence», défend leur amie Juliette Bernard. Au Touquet, tous parlent d’un couple «fusionnel», d’un «duo» inséparable. «C’est du ciment. C’est superbe, comme couple!» s’enthousiasme leur amie Line Renaud. Laurence Campion, dont la cabine de plage voisine depuis 30 ans celle de Brigitte Macron, l’assure, «ce n’est pas elle qui va gouverner, mais elle sera derrière lui». La part non-négociable du nouveau président.
«Ce ne sera pas une potiche»
Emmanuel Macron l’a assuré dès le début du mois de mars, Première dame, son épouse ne sera «pas dissimulée, pas derrière un tweet ou une cachette». Grinçante allusion aux déboires des compagnes de son prédécesseur, François Hollande… «Le but, c’est que les règles soient très claires pour nos concitoyens, parce qu’il faut de la transparence, nous confiait le futur président à la veille du second tour. Elle ne sera pas rémunérée, elle n’aura pas de fonction officielle, mais il faut en détailler les moyens.» Ceux-ci, promet-il seront «notifiés de manière claire, dans un document public et accessible aux gens».
Pour le reste… «Ce ne sera pas la potiche de service!» prédit son amie, Juliette Bernard. «Elle le dit souvent, c’est une prof dans l’âme. Elle considère qu’un bon accès à la culture, c’est un accès à la liberté. Je pense qu’elle va jouer un rôle très important sur les questions d’éducation, de formation», confie également Line Renaud, qui relève au passage : «C’est une sacrée maison à tenir, l’Elysée. J’ai vu Madame Chirac à l’oeuvre, il faut être une très bonne maîtresse de maison.» «Elle fera remonter ce qu’elle peut à Emmanuel», parie son amie Laurence Campion.
Quant à la dureté de l’épreuve qui l’attend… «Elle a la carapace pour encaisser les coups, avance Juliette Bernard. Elle en a déjà pris pas mal…» Il lui faudra effectivement être armée pour endosser ce costume qui n’existe pas vraiment. Brigitte Macron le sait, les statuts de cette fonction aux contours flous, «c’est la Pampa».
P.Th.
leparisien.fr