Son silence assourdissant depuis vendredi quand les attaques contre sa personne ont commencé à fuser, avait intrigué. Tant le Ministre Secrétaire d’Etat à la Communication, Yakham Mbaye, n’est pas réputé être un homme qui se laisse faire. Le voilà qui réagit et de manière surprenante, via les réseaux sociaux, au moyen d’une lettre adressée à un de ses amis et compagnons politiques, René Pierre Yehoume.
Comandante ! Je mesure et sens ta rage au cœur, depuis vendredi et cette «Edition spéciale» de 2Stv faite d’insultes dédiées à ma personne. Une rage sans doute amplifiée par le silence téléphonique volontaire que j’ai opposé à tes multiples interpellations.
Comandante ! J’ai aussi senti, toute la journée, à travers tes sms auxquels je n’ai pas répondu, en lisant les post des débats Facebook dans lesquels tu t’es engagé, que tu doute, tu es sur la défensive, relativement à la supposée minceur de mon Cv.
Redresse-toi guévariste !
Le Bac ? A mes 21 ans, en 1991, si ça ne relevait que de ma volonté, je ne l’aurais pas eu. Je n’en pensais pas moins que Pierre Desproges, qui n’avait pas encore commis «Fonds de tiroir» : «Les diplômes sont faits pour les gens qui n’ont pas de talent. Vous avez du talent ? Ne vous emmerdez pas à passer le bac.»
Ça m’enquiquinait ! Mais, l’autorité parentale exercée par PYM, mon frère aîné, qui avait pris le relais de mon père rappelé à Dieu onze années plus tôt, avait été plus forte que ma volonté. Après ma razzia en Première ponctuée par un Prix d’Excellence remis par Djibo Kâ, alors Ministre de l’Education nationale, pour PYM, «mon père», je devais et j’allais passer mon Bac. Mes préoccupations «anormales», c’était le cadet de ses soucis. Et il tenu à quitter Paris, pour rallier Dakar. Me fit escorter jusqu’à l’établissement Notre Dame où je «subis» les épreuves, sous l’étroite surveillance d’une connaissance de PYM qui montait la garde à la porte de l’établissement. Je l’eus d’office. Comme «candidat normal» et non «libre».
Mais, je l’avoue, ce fut à la surprise de tous ! Singulièrement mes camarades de classe au lycée Lamine Guèye, qui avaient constaté ma disparition des salles de classe de Terminale, en février 1991, juste après le premier semestre, au terme duquel j’avais été pourtant classé premier. Comme à l’accoutumée.
Au Bac, en dépit d’un zéro récolté aux épreuves d’éducation physique et d’un quatre en mathématiques – ce n’était pas un hasard, car ces deux matières et l’anglais n’étaient pas ma tasse de thé –, un double quinze aux épreuves anticipées (orale et écrite) de français, un double quatorze en philo et en histo-géo me sauvèrent. Un exploit ? Non ! Le résultat d’une contrainte parentale, plutôt. Cependant, aujourd’hui, je me bats, imitant mon frère aîné, pour que Fallou, à qui je me garderai de raconter mon «anormalité», ne suive mon exemple. Le Bac, ça a du bon !
«Seulement, voilà», pour reprendre un terme cher à l’un de mes formateurs en journalisme à L’Info7, Mamadou Albert Sy, en ces années, les études, elles m’aimaient, moi, elles m’enquiquinaient. Et davantage durant les trois années qui ont suivi le Bac, en France, en Fac de Droit, à Reims. Cependant, en ce pays de culture, j’eus le suprême privilège de mieux vivre et cultiver mes deux passions, peut-être mes drogues, encore à ce jour : la lecture et l’écriture.
Ce furent des occasions heureuses, comme celle d’une remise en cause fondamentale de mes convictions marxistes (sans prétention) forgées une dizaine d’années plutôt (précoce, me diras-tu) : lorsque je finis, à l’été 1993, de parcourir «Jenny Marx, ou la femme du Diable» de l’inégalable Françoise Giroud. Mais, cette apostasie ne m’a cependant pas conduit à renier «l’être humain le plus complet de son époque» pour reprendre Sartre parlant du Che.
Comandante ! J’ose croire que te voilà édifié. Mais, garde-toi de consumer ton énergie dans cette défense acharnée que tu déploie à contrer ceux qui s’évertuent à me dénigrer : l’un avec une méchanceté bête et assumée ; les autres, tes co-débatteurs de Facebook, avec un humour acide et sournois, en somme lâche.
Comandante ! Ne crois pas une seule seconde que mon silence est celui d’un froussard désarmé. La charge de mes fonctions oblige la perte d’une part importante de la liberté de dire et de faire, favorise l’entrée à la dure école de l’humilité au sein de laquelle les matières dispensées ne sont pas toutes à la portée d’un ancien journaliste.
Guévariste, ne souffre pas des mots de ceux qui me collent l’étiquette du dénonciateur, hier, de la «Dynastie Faye-Sall», pour mieux mettre en exergue un caractère d’opportuniste qui serait mien. J’assume toutes les séquences de mon compagnonnage avec notre leader : engagement, lorsque ce fut incertain ; désengagement, aux premières heures du pouvoir ; réengagement, enfin.
Comandante ! Hier, je me serais laissé aller à répliquer à cet homme de presse qui m’avait qualifié de «male astrosus» ou malotru ou mal né, les Sénégalais auraient appris deux vérités. Ils m’auraient reproché la divulgation de la première : c’est lui le mal né d’hier. Ils auraient été choqués par la deuxième : l’implication et l’arrestation, puis la relaxe en catimini, de cette tête d’œuf dans une insoutenable affaire de mœurs. Que dis-je, un crime !
Comandante ! Aujourd’hui, je me laisserais aller à exhumer les séquences des années 90 de la vie de cet autre personnage qui me dénie le Bac, on me le reprocherait.
Comandante ! Aujourd’hui, à ce journaliste aux manières de lama, je me laisserais aller à rappeler ses six mois de prison avec sursis pour délits de destruction de biens d’autrui, fuite, conduite en état d’ébriété et blessures involontaires, on me le reprocherait.
Idem, si je me mettais à entretenir les Sénégalais de cette mouche du couche, habitué à faire le mur, comme celui de l’arène de lutte pour entrer par effraction dans la presse.
Comandante ! En somme, le tableau ou le rideau qui masquent le véritable état de la presse dans notre pays, qui est louable, sont sans nul doute peu reluisants. Ivrogne sursitaire, avorteur échappé etc. tiennent le haut du pavé, insultent et dénigrent à tout va, réinventant la vie des gens, le mensonge en bandoulière.
Alors, que faire ?
Moi, je n’ai pas le choix. Je ne peux détourner le regard. Ils n’en ont pas fini avec moi. Leurs insultes ne m’arrêteront pas. Parce qu’il en va désormais de l’impérieuse nécessité d’une veille permanente et vigilante, pour contrecarrer et combattre les menées d’une caste d’énergumènes qui se moque de la liberté de presse, veut instituer la liberté de pression jusqu’à saper la paix sociale et la sécurité nationale. On les entend beugler qu’ils nous attendent de pied ferme ! Eh bien, qu’ils récidivent !
Par contre, toi, tu as le choix. Qu’il te plaise de faire tiennes les réflexions de trois grands journalistes et intellectuels. Je me fais un plaisir de les mixer pour toi : «La télévision n’exige du spectateur qu’un acte de courage, mais il est surhumain : c’est de l’éteindre» (Pascal Bruckner), car elle «est une invention qui vous permet de faire entrer dans votre salon des gens que vous n’aimeriez pas recevoir chez vous» (David Frost) et sa «grande vertu est de donner leur chance aux imbéciles, mais, elle n’en laisse aucune à vos enfants, puisqu’elle les leur inflige» (Chritian Combaz).
Comandante ! Je vais finir par un aveu : nous sommes tous faits de chair, ressentons tous la peine que peut provoquer la méchanceté de l’humain, surtout lorsqu’elle s’exprime comme celle d’un primate. Ces derniers jours, je n’ai pas échappé à cet état amplifié par la solitude. Tu m’en as extirpé. En m’obligeant à une de mes passions : écrire. Sois en remercié.
Hasta siempre !
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