Washington (AFP) – Les chefs du renseignement américain ont informé Donald Trump la semaine dernière de l’existence d’informations compromettantes qui auraient été recueillies pendant des années par la Russie sur le milliardaire républicain, et rassemblées dans des notes confidentielles circulant à Washington.
Le Kremlin a rejeté en bloc ces accusations, assurant ne pas posséder de « dossiers compromettants » sur Donald Trump ni même sur sa rivale à la présidentielle, la démocrate Hillary Clinton.
« La fabrication de tels mensonges est une tentative évidente de faire du tort à nos relations bilatérales » avant l’investiture de M. Trump, favorable à un rapprochement avec Moscou, a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
Quelques heures plus tôt, le président élu des Etats-Unis avait réagi de manière lapidaire sur Twitter aux informations de la presse américaine: « Fausses informations – une chasse aux sorcières totale! ».
Le président sortant Barack Obama a dit de son côté sur la chaîne NBC qu’il ne « commentait pas les informations classifiées ».
Des médias américains ont rapporté mardi l’existence d’un document de 35 pages, composé d’une série de notes datées de juin à décembre 2016 et rédigées par un ancien agent du renseignement britannique, jugé crédible par le renseignement américain, pour le compte d’opposants politiques à Donald Trump.
Selon ces médias, dont CNN et le New York Times, les chefs du renseignement américain ont présenté au président élu un résumé de deux pages de ce document, en même temps qu’ils lui détaillaient leur rapport, partiellement déclassifié vendredi, récapitulant l’ensemble des opérations russes de piratage informatique et de désinformation.
Le fait que ce résumé ait été présenté à Donald Trump, Barack Obama et plusieurs responsables du Congrès souligne l’importance accordée à ces documents par les chefs espions.
– Chantage –
Les 35 pages ont été publiées mardi par le site d’information BuzzFeed, qui a cependant précisé qu’il n’était pas en mesure de les authentifier. Leur contenu n’a pas plus été certifié par des sources officielles. Les notes, qui circulaient parmi les milieux politiques et médiatiques à Washington depuis plusieurs semaines, détaillent notamment:
– des informations présentées comme compromettantes sur Donald Trump, comme l’existence alléguée d’une vidéo à caractère sexuel impliquant des prostituées, filmée clandestinement lors d’une visite à Moscou en 2013 par les services russes dans le but d’en faire un moyen de chantage;
– des informations sur des échanges de renseignements supposés pendant plusieurs années entre Donald Trump, ses proches et le Kremlin, dans les deux directions.
« Ce ne sont que des sources anonymes », a rejeté sur NBC Kellyanne Conway, conseillère du républicain.
Michael Cohen, avocat du milliardaire et vice-président de l’organisation familiale, a rejeté les notes qui évoquent à plusieurs reprises et de façon détaillée un voyage de lui-même à Prague fin août ou début septembre pour y rencontrer des interlocuteurs russes. « Je ne suis jamais allé à Prague de ma vie », s’est-il défendu sur Twitter.
– ‘Explosif’ –
Ces informations, malgré les zones d’ombre, ont provoqué le trouble à Washington, et notamment au Congrès.
« Si ces allégations d’une coordination entre la campagne de Trump et des agents russes sont avérées, et les allégations selon lesquelles les Russes ont compromis l’indépendance du président élu Trump, ce serait vraiment choquant. Ce serait explosif », a réagi sur CNN le sénateur démocrate Chris Coons.
L’existence de liens entre l’entourage de Donald Trump et le pouvoir russe avait déjà fait l’objet de rumeurs pendant la campagne électorale, notamment via le rôle trouble d’un conseiller en politique étrangère proche de Moscou, Carter Page.
L’ex-chef de file des sénateurs démocrates, Harry Reid, qui avait accès à des informations classées secrètes, s’en était publiquement alarmé à mots couverts auprès du directeur du FBI en août et en octobre, exigeant le lancement d’une enquête.
– Inimitié personnelle –
Mardi, le directeur du FBI, James Comey, interrogé au Congrès, n’a ni confirmé ni démenti l’existence d’une telle enquête.
Le consensus des services de renseignement américain est que Vladimir Poutine a ordonné une campagne d’influence aux Etats-Unis en piratant notamment des emails de responsables démocrates afin de discréditer Hillary Clinton, envers qui il nourrirait une inimitié personnelle depuis qu’elle a été chef de la diplomatie américaine (2009-2013), et afin de doper les chances de Donald Trump.
Le successeur de Barack Obama, élu en novembre, a longtemps refusé d’accepter la conclusion de l’administration actuelle sur l’ingérence russe.
Après avoir reçu le rapport des services de renseignement vendredi dernier, il a admis que la Russie, parmi d’autres acteurs étatiques et privés, avait lancé des cyberattaques aux Etats-Unis, notamment contre le parti démocrate.
Moscou a toujours démenti ces accusations d’interférence qu’elle qualifie d’ »hystérie » et « non étayée par la moindre information ni preuve ».
Ces développements devraient occuper une partie de la conférence de presse que Donald Trump doit tenir mercredi matin à New York, sa première depuis son élection.