DISCOURS DE SEM MACKY SALL, PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE DU SENEGAL, AU DEBAT GENERAL DE LA 71eme SESSION DE L’ASSEMBLEE GENERALE DES NATIONS UNIES

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Monsieur le Président de l’Assemblée Générale,
Chers Collègues,
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames, Messieurs,

Monsieur le Président, la délégation sénégalaise remercie votre prédécesseur et vous adresse ses meilleurs vœux de succès dans l’exercice de votre mandat.
Nous sommes à nouveau rassemblés pour vivifier les idéaux fondateurs des Nations Unies : promouvoir la paix, favoriser le progrès et cultiver entre les peuples l’esprit de tolérance et de compréhension mutuelle.
Jamais, pourtant, le monde n’a été aussi violent et dangereux qu’en ces temps où des innocents, dont le seul tort est de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment, sont tués sans raison, laissant derrière eux des familles entières plongées dans le deuil et le chagrin.
Aucune cause, encore moins religieuse, ne peut justifier la violence. Et le comble de la lâcheté, c’est de s’en prendre à des prêtres et à des imams, jusque dans des lieux de culte.
Le Sénégal, terre de diversité culturelle et religieuse, où 95% de musulmans vivent en harmonie avec leurs compatriotes chrétiens et de religion traditionnelle, rejette et condamne fermement la violence sous toutes ses formes et manifestations.
De la même manière, nous rejetons les amalgames faciles et injustes. Ni l’islam, ni les musulmans ne sont en cause.
Nous refusons que les actes insensés d’une minorité sans foi ni loi servent de prétexte pour stigmatiser plus d’un milliard de musulmans et leur religion.
Quand des Imams sont tués et des mosquées attaquées, y compris aux Lieux Saints de l’Islam, ce sont les musulmans qui sont atteints dans leur chair et leur foi. On ne saurait par conséquent reprocher aux musulmans des actes dont ils sont eux-mêmes victimes. Il est temps d’arrêter l’acharnement et les dérives islamophobes.
Le Sénégal est préoccupé chaque fois que des mesures sont édictées pour cibler des communautés et des pays musulmans, en violation des droits humains et des règles qui gouvernent les relations entre Etats.
Verser dans une islamophobie déraisonnée, c’est ajouter de la souffrance à la souffrance ; c’est attiser le feu des antagonismes et exacerber le choc des civilisations dont rêvent les extrémistes de tous bords.
Face à la menace terroriste globale qui nous concerne tous, le bon sens commande plutôt de coopérer pour vaincre le mal par une réponse globale, solidaire et concertée.
Les valeurs qui nous rassemblent et font que chacun de nos peuples se sente de la famille des Nations Unies tiennent au fait que toutes les civilisations, toutes les cultures sont d’égale dignité. En conséquence, puisque nous sommes des Nations Unies, traitons avec le même engagement et la même diligence tous les défis devant nous.
De la Syrie à la Libye, du Soudan du Sud à la Somalie, du Nord Mali aux pays affectés par les activités criminelles du groupe terroriste Boko Haram, accordons la même priorité à toutes les menaces à la paix et à la sécurité internationales.
Trouvons enfin une solution juste et équitable au lancinant conflit israélo palestinien ; une solution qui consacre le droit légitime du peuple palestinien à un Etat, vivant en paix avec celui d’Israël, chacun à l’intérieur de frontières sûres et internationalement reconnues.
Traitons avec le même respect et la même humanité tous les migrants, réfugiés et personnes déplacées, quelle que soit leur origine.
Redressons l’injustice historique qui fait de l’Afrique le seul continent à n’avoir aucun siège permanent au Conseil de Sécurité ; alors qu’elle fournit près d’un tiers des membres de l’Organisation, et que les dossiers qui la concernent occupent l’essentiel des travaux du Conseil.
Le Sénégal poursuivra son mandat au Conseil en restant attaché à la position africaine exprimée dans le consensus d’Ezulwini et ouvert au dialogue avec d’autres groupes d’opinion.
Monsieur le Président,
L’année dernière, nous avons adopté le programme de développement durable à l’horizon 2030 et conclu l’Accord de Paris sur le climat. Avec le thème de la présente session, qui nous invite à un effort universel pour transformer notre monde, l’occasion se présente à nouveau de traduire nos engagements en actes.
Pour nous, pays africains, la question de l’énergie reste un enjeu vital, parce qu’il ne peut y avoir  d’industrialisation et de développement sans accès à l’électricité à des coûts compétitifs.
L’Afrique ne peut continuer à éclairer les autres continents grâce à ses ressources en restant elle-même dans l’obscurité.
L’Afrique ne peut continuer à servir de réservoir de matières premières transformées ailleurs au détriment de sa propre industrialisation.
L’Afrique ne peut continuer à être le continent le plus affecté par le changement climatique, alors que sa contribution aux émissions de CO2 liées à l’énergie demeure la plus faible ; devant atteindre seulement 3 % en 2040.
L’Accord de Paris que nous avons signé ici en avril dernier nous engage à travailler ensemble pour que les pays en développement, africains en particulier, n’empruntent pas le même schéma pollueur que les pays aujourd’hui industrialisés.
A cette fin, l’Union Africaine a initié en juillet dernier un Fonds d’appui à l’électrification de l’Afrique logé à la BAD pour mobiliser le financement de projets d’électricité dans le cadre d’un mix énergétique.
Au nom du NEPAD dont le Sénégal préside le Comité d’Orientation, je salue le soutien de la France à cette initiative. J’invite tous les partenaires bilatéraux et multilatéraux à contribuer au financement du Fonds, conformément aux engagements convenus dans l’Accord de Paris en matière de financement des mesures d’atténuation et d’adaptation.
De plus, j’appelle à une autre vision des enjeux du développement en Afrique.
Laissons de côté les clichés d’un passé révolu.
Regardons plutôt l’Afrique non comme une terre d’urgence humanitaires et un réceptacle d’aide publique au développement, mais comme un continent en construction, un pôle d’émergence et de progrès.  C’est l’Afrique des routes et des autoroutes, des ponts et des chemins de fers ; l’Afrique des barrages et des centrales électriques, des parcs industriels et des fermes agricoles.
Voilà notre ambition pour nos pays. Cette  ambition, nous la réaliserons non par l’aide mais par des investissements massifs et urgents dans les secteurs qui portent la croissance et le développement.
Nous voulons d’abord compter sur la mobilisation de nos propres ressources, par une meilleure efficacité dans la dépense publique, la valorisation et la juste rémunération de nos matières premières, une fiscalité maîtrisée et une lutte plus soutenue contre les flux financiers illégaux.
Voilà pourquoi le Sénégal soutient le projet de lutte contre l’Erosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfice (BEPS), initié par l’OCDE et le G20, avec l’appui de la Banque Mondiale et du FMI.
J’invite, en même temps, à la mise en œuvre diligente de l’Initiative CONNEX du G7 sur le renforcement de l’aide à la négociation de contrats complexes, en particulier dans le domaine des mines et des hydrocarbures.
Nous voulons des contrats justes et équitables, qui protègent à la fois l’intérêt de l’investisseur et les droits du pays d’accueil.
J’appelle, enfin, tous les partenaires, publics comme privés, à ne pas surestimer le risque de l’investissement en Afrique.
L’Afrique a fait des progrès significatifs en matière de bonne gouvernance et d’amélioration du climat des affaires. Le risque n’y est pas plus élevé qu’ailleurs.  Et de toute évidence, pour une économie mondiale aujourd’hui essoufflée,  l’Afrique ne présente pas des risques mais offre plutôt des opportunités de relance et de croissance partagée.
Travaillons alors à la réforme de la gouvernance financière mondiale pour assouplir les conditions d’accès au crédit pour le financement du développement.
C’est dans la foi en cette Afrique nouvelle que nous poursuivons depuis deux ans la mise en œuvre du Plan Sénégal Emergent à travers de grands projets structurants, notamment des centrales électriques, un nouveau pôle urbain, des infrastructures routières dont une deuxième autoroute à péage, et le lancement prochain d’une ligne de Train Express Régional reliant Dakar à notre nouvel aéroport international en cours de finition.
Monsieur le Président,
Je voudrais, pour conclure, remercier le Secrétaire général Ban Ki Moon pour tous ses efforts au service de l’Organisation en ces temps difficiles.
Je rends hommage au Président Barack Obama pour sa contribution à l’agenda international au cours de ses deux mandats.
Le parcours du Président Obama, par le choix de la Nation américaine, est un message de l’histoire ; un message universel, qui invite chacun à surmonter les ténèbres de ses propres préjugés pour embrasser la lumière de la sagesse ; un message d’humanité, qui rappelle ces merveilleuses paroles du Révérend Martin Luther KING, il y a 53 ans, devant le Lincoln Memorial : chacun doit être jugé non sur la couleur de sa peau, mais sur la valeur de son caractère.
Et ce qui est valable entre les hommes, l’est aussi entre les Nations.
Il n’y a pas de grandes et de petites Nations. Il y a des Nations Unies. Et si nous sommes des Nations Unies, toutes les voix doivent compter quand nous délibérons sur nos affaires communes.
Je souhaite plein succès aux travaux de l’Assemblée générale et vous remercie de votre attention.

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