Times24.info : Son tout premier défilé s’est déroulé à Paris (en France) lors de la Black Fashion week, organisée par la célèbre styliste Sénégalaise Adama Paris. De son vrai nom Alia Baré Maïnassara bientôt 35 ans, fille de feu Ibrahim Baré Maïnassara, ancien président de la République du Niger, est la créatrice de la marque Face to Faith lancée sérieusement en novembre 2015. La styliste nigérienne présente à la 14eme édition de la Dakar Fashion Week 2016 où elle a fait (re)découvrir ses belles modèles surnomméesSarraounia (reine amazone), a accordé un entretien exclusif à Times24.info. Après avoir abandonné les banques, ce monde de chiffres qu’elle n’aime pas, la patronne de Face to Faith, a un grand privilège de pouvoir suivre la lignée de mon père spirituel Alphadi (styliste nigérien et organisateur du Fima, Festival international de la mode africaine), revient sur son amour pour la créativité, la beauté, l’imaginaire etc. sans compter ce qui « touche » son pays, le terrorisme. Entretien
Times24.info : Pourquoi « Face to Faith» ?
Alia Baré : Alors «Sounou» (en haoussa) m’est venue dans la mesure où nous sommes tous confronter à des choix dans la vie. Je suis venue d’un cursus de la banque. En travaillant à la banque au paravent, j’ai toujours eu cette passion de faire de la mode. C’était très dur pour moi d’affronter les gens ou de les regarder. J’ai tout plaqué tout, mon master, pour retourner faire mes études… Et la seule chose qui m’a guidé, c’est la foi en moi. Personne ne vivra la vie à ma place ! Je devrais faire ce qui est importante pour moi. Faire face à sa foi ! Sa foi en Dieu ! Sa foi en soi-même ! Sa foi en sa famille ! C’est un message à travers cette marque ! Elle n’existerait pas si, je n’avais pas une foi en moi.
Times24.info : Est-elle devenue un phénomène parce qu’on a vu aussi Adama Paris, quitter un poste dans une banque, pour se lancer dans la création de mode ? Que se passe-t-il au sien des banques, d’aujourhui ? Y-a t-il un problème dans le secteur bancaire ?
Alia Baré : Non ! À vrai dire, la banque a une image de brasure d’argent et de tout. Mais lorsqu’on travaille dedans, c’est un monde assez froid. Il y a aucune place pour la créativité. Il faut vendre et il y a aussi des objectifs à atteindre. En fait, c’est un monde de chiffres ! Moi, mon monde n’est pas fait de chiffres. Il est fait de créativité, de beauté, d’imaginaire etc. La banque, ce n’était pas mon image. J’ai fait le choix d’aller voir ce qui me ressembler de plus.
Times24.info : Vu la menace de Boko Hram qui sévit au Niger, comment se porte aujourd’hui la mode dans ce pays de l’Afrique de l’ouest?
Alia Baré : C’est vrai que c’est assez difficile pour moi de parler à ce niveau, dans la mesure où j’ai préféré m’installer au Sénégal où il y a une meilleure ouverture… c’est une plateforme beaucoup plus grande en termes de mode. Les menaces qu’il y a au Niger, sont vraiment dures surtout dans les frontières avec le Nigéria. C’est quelque chose qui nous touche. Des créateurs tels qu’Alphadi avec le Fima qui a perduré, était une image qui se diffusait partout à travers le monde. Nous sommes obligés de mettre un tel événement enstandby (en attente) à cause de cette menace là. J’espère vraiment que dans l’avenir, nous pourrons enfin retrouver un Niger serein où la paix et la sécurité règnent.
Times24.info : Vos créations sont-elles importables ?
Alia Baré : Pour moi, la mode est assez universelle. Mon but est que mes vêtements puissent parler à n’importe qui que se soit, en Europe ou aux Etats-Unis. Qu’une femme puisse porter une robe de moi. Qu’on puisse voir cette inspiration africaine, mais que ça ne fasse pas : « ethnique ou de rebelle ». Qu’elle affirme ses racines africaines. La mode africaine peut avoir de la haute couture. Elle peut avoir de l’inspiration, du raffinement avec des touches qui montrent qu’on est fier de notre identité. Donc, c’est quelque chose d’assez classique avec un petit twiste. Je souhaite également qu’on voit aussi, ce qui s’est passé dans ma vie. Vu que j’ai vécu en Inde et en Singapour pendant de longues années. Je dois avoir quelque chose d’éclectique qui se mélange. Qu’on puisse voir cette inspiration africaine, asiatique, européenne. Que ça puisse parler à tout fan du monde.
Times24.info : Es-ce que le gouvernement nigérien accompagne financièrement les créateurs de mode dans votre pays ?
Alia Baré : A vrai dire, après que j’ai quitté le Niger. Il y a de nombreuses années. Je ne sais pas ce qu’il en est aujourd’hui. Mais je sais par exemple – la première édition du Fima qui a été quelque chose d’extraordinaire, avait eu un soutien ineffectif de l’Etat. Si non, sans l’aide de l’Etat, ça n’allé pas eu lieu et Alphadi l’a souvent soulevé. Je connais le Président (de la République) de l’époque (Ibrahim Baré Maïnassara mort le 9 avril 1999 à Niamey au Niger) qui est un membre de ma famille (son père) qui avait également participé… Et donc clairement, c’est sûr que les choses ne peuvent pas se passer si l’Etat n’aide pas. C’est un milieu assez dur et cela demande tellement de moyens de mobiliser tous ses gens, venus à travers le monde. C’est la moindre des choses ! Surtout pour l’image qui ressort pour un pays. L’art s’est le premier langage universel, parlé à travers le monde ! Il n’y a pas de meilleur ambassadeur à l’heure actuelle que des initiatives tel que celle d’Adama Paris. Je pense qu’il est nécessaire que le gouvernement, peu importe sous quel Etat, si ce n‘est pas de l’argent – ça peut être également par des moyens pour faciliter des démarches etc. C’est possible ! Elle pourrait vraiment inciter les gens. Inspirer à aller de l’avant et d’aider cette industrie à mieux se supporter, parce que c’est un domaine très très dur.
Times24.info : Votre retour au Niger en tant que créatrice de mode, sera-t-il marquant ?
Alia Baré : Ben, Dieu seul sait ! J’attends avec impatience, espérant que le Fima se tiendra dans les mois à venir ou l’année prochaine. Nous verrons ! Mon plus grand plaisir et mon plus grand privilège serait de pouvoir suivre la lignée de mon père spirituel Alphadi qui a fait des choses extraordinaires qui pour moi est un exemple à suivre.
Par Zeina Gueye (Times24.info)
Face to Faith (en Iimages)