La Sénégalaise Fatma Samoura, 54 ans, jusque-là agent de l’ONU, est chargée de redorer le blason de la FIFA. Mais qui est vraiment la nouvelle secrétaire générale de l’instance mondiale de gestion du football?? Profil.
Rigueur militaire
La nouvelle secrétaire générale de la FIFA, la Sénégalaise Fatma Samba Diouf Samoura, était lundi dernier en visite au siège de l’organisation à Zurich, en Suisse. Elle a pris part à une réunion de la direction et s’est adressée pour la première fois depuis sa nomination au personnel de l’instance dirigeante du football mondial. Elle « a prononcé un discours passionné », peut-on lire sur le site de la FIFA où on la voit sur les photos de la cérémonie s’adresser à ses équipes avec entrain. Debout devant un pupitre dressé pour la circonstance dans une immense salle, elle paraît décontractée sous son tailleur-jupe bordeaux-bleu nuit et son foulard assorti négligemment posé sur son épaule.
Depuis sa désignation, le 13 mai dernier au congrès de Mexico, le personnel de la FIFA a entendu beaucoup de bien sur le compte de leur nouvelle patronne. Il a pu se faire une première idée de la personne lundi dernier en attendant d’être fixé sur ses qualités de manager dans les mois et années à venir. Mais déjà les agents de la FIFA ont peut-être compris qu’ils auront affaire à une dame de fer. « C’est une femme de caractère, prévient Adama Dia, secrétaire général adjoint à l’ONU, interrogé par la Radio télévision suisse qui lui a consacré un portrait vendredi dernier. Elle a grandi à Londres (sous l’aile de son père), un colonel de l’armée sénégalaise. Elle a la rigueur et la discipline militaires. »
Ses états de service pour le compte de l’ONU dans des zones de conflit sont éloquents : Tchad, Afghanistan, Sud Soudan, Madagascar et, aujourd’hui, Nigeria. À Madagascar, elle a fait l’objet de menaces de mort, mais ça ne l’a pas perturbée. Elle a tenu bon conduisant la transition jusqu’à son terme. « Elle a su faire preuve de détermination », glisse Adama Dia.
Diplomate polyglotte
Mais si le président de la FIFA, Gianni Infantino, a choisi cette femme de 54 ans, mère de trois enfants, c’est certes pour sa poigne, mais aussi pour ses talents de diplomate et son sens de l’organisation. Sur ces plans, l’Italien ne devrait pas être déçu. L’ancien journaliste de Jeune Afrique Francis Kpatindé acquiesce : « Elle sait organiser, elle est méthodique. Elle ne reste pas derrière. Elle aime aller au charbon, être au courant de tout, lire tout. Elle sait manager les hommes, elle sait également gérer l’argent. »
La preuve, au Nigeria où sévit Boko Haram depuis de nombreuses années, elle coordonne les actions humanitaires des Nations-Unies. « Elle est chargée de la gestion du budget, des ressources humaines ou encore de l’approvisionnement, détaille-t-on sur le site de la FIFA. Elle doit coordonner les activités d’environ 2 000 collaborateurs, mais aussi contrôler et évaluer la sécurité ainsi que la situation et les orientations socio -politico-économique du pays le plus peuplé d’Afrique. »
Infantino a croisé Fatma Samoura pour la première fois lors d’un dîner à Madagascar. Il était secrétaire général de l’Uefa et préparait la campagne de Michel Platini pour la présidence de la FIFA. L’Italien l’a contactée après son élection à la tête de l’organisation. Il souhaite qu’elle « apporte son expérience à la FIFA ». Qu’elle importe dans l’administration du football mondial ses méthodes de gestion basées sur les normes de bonne gouvernance et la transparence. Qu’elle mette en application les réformes en chantier et qu’elle gère les dissensions profondes qui minent souvent les rapports à la FIFA.
Ce dernier point ne devrait pas être un problème pour cette diplomate de formation. Qui parle le Wolof, mais aussi le Français, l’Anglais, l’Italien et l’Espagnol. Assimile la FIFA aux « Nations-Unies du football ». A fait des études supérieures à Lyon et à Strasbourg. A travaillé à Senchim, une filiale des Industries chimiques du Sénégal (Ics) avant d’entrer à l’ONU en 1995.
Fan de Rummenigge, amie de Roger Milla
Seule réserve émise : son manque d’expérience dans le développement du football. Un constat à nuancer : Fatma Samoura est une amatrice du ballon rond. Elle a assisté à beaucoup de matches de football lors de ses études supérieures à Lyon. Elle fut l’épouse d’un ancien footballeur professionnel, est très proche de Roger Milla et « voue une admiration sans bornes à Karl-Heinz Rummenigge ».
Toutefois, la première femme et non-Européenne secrétaire générale de la FIFA sera bien entourée pour conduire sa mission. Elle aura autour d’elle deux adjoints reconnus dans leurs domaines respectifs. Il s’agit de Marco Villiger et de l’ancien international croate et joueur du Milan Ac Zvonimir Boban, qui vont diriger les deux pôles de la gouvernance du football mondial. Le premier sera chargé des aspects commerciaux et administratifs et le second s’occupera du développement du football et de l’organisation des compétitions de la FIFA.
Au bout du compte, la successeure du Français Jérôme Valcke, licencié et suspendu 12 ans de toute activité liée au football, veut « que l’on soit fier » de la FIFA. « C’est la plus passionnante des missions et je suis ravie de me lancer dans cette grande aventure qui consistera à appliquer un calendrier chargé tout en participant au développement du football pour tous. Je souhaite contribuer à faire de la FIFA un lieu où il fait bon vivre », a-t-elle lancé au personnel de l’organisation dont l’image a été écornée ces derniers mois par une succession d’affaires de corruption et de détournement de fonds.
Gianni Infantino tient son meneur de jeu (« Je suis certain que ses idées auront un impact très positif sur l’ensemble de l’institution ») et peut-être son futur successeur à la tête de la FIFA.