Détention et santé mentale : «Je reçois des détenus qui ne savent pas qu’ils sont emprisonnés» (psychiatre)

efd711c15280974c4bdfb10caacda4f0016ea4d7«C’est au terme d’un examen, de plusieurs examens, qu’on peut déterminer si la personne est malade, si l’acte qu’il a commis est en rapport avec sa maladie et s’il est accessible à une sanction pénale. L’accessibilité à la sanction pénale, c’est le fait que la personne réalise qu’on est en train de la mettre en prison pour la corriger à cause de l’acte qu’elle a commis. Il y a des gens qui sont tellement malades que, lorsqu’on les met en prison, ils ne comprennent pas que c’est pour les corriger». Ces éclairages sont de Aïda Sylla, le psychiatre aux services externes de l’hôpital Fann de Dakar. Dans un dossier réalisé par Sud Quotidien sur la détention et la prise en charge de la santé mentale, elle évoque quelques difficultés du fait du désengagement des familles.

«Je reçois des malades en expertise qui viennent de la prison, mais ils ne savent même pas qu’ils sont emprisonnés. Il y a certains qui me disent : «depuis qu’on m’a mis dans un hôtel, je suis bien. J’ai beaucoup d’amis. On discute, on nous amène à manger. On ne nous fatigue pas». Celui-là, il ne sert à rien de l’emprisonner. Il mérite plus un traitement que d’aller en prison. Il mérite plus un traitement que d’aller en prison», rectifie le spécialiste de la santé mentale.

Quid de l’agressivité de certains malades mentaux ? 

«Elle est liée à la maladie, répond Dr Sylla. C’est la maladie qui perturbe soit les émotions soit le comportement, soit la pensée. Parfois, la personne peut être agressive parce qu’elle a des hallucinations. Elle voit une personne, mais à la place d’un humain, elle voit autre chose. Souvent, le malade mental entend des voix qu’il est seul à entendre.  Parfois, ce sont des insultes. Et s’il y a une personne à côte, il pense que c’est cette personne et il l’attaque. Ce qui caractérise un peu les actes posés par les malades mentaux, c’est que souvent, ils sont des actes sans raison. Par exemple : un délinquant quand il vole peut tuer la personne qui garde, ou bien une personne est en légitime défense, il se défend, et il le tue. Le malade mental quant à lui, parfois, il tue quelqu’un et sans raison aucune. Très souvent même, ils s’en prennent aux proches», explique encore Professeur Aida Sylla. 

Elle insiste sur l’implication des familles dans l’accompagnement des malades. Car note-t-elle, «Beaucoup de malades sont en état de détresse sociale parce que souvent, les familles ont baissé les bras alors il y a de cela des années, la situation n’était pas comme cela. Le malade avait toujours des gens autour de lui et qui l’accompagnaient dans les soins. Socialement aussi, les gens parvenaient à le garder quoiqu’il puisse se passer. Malheureusement, maintenant, tout est demandé à l’État qui, même s’il peut assurer les soins, peut difficilement se substituer aux familles». 

Le journal de noter le coût de la prise en charge dans les hôpitaux, un paiement journalier de 5000 FCFA auquel s’ajoutent les ordonnances qui coûtent cher. Le cas échéant, «la personne malade est obligée de passer quatre ou cinq mois dans un centre psychiatrique pour retrouver sa santé». Et «en cas de non-payement de la somme due, le traitement du malade est souvent  bloqué. C’est pourquoi, il faut maintenant une garantie financière avant que le personnel soignant prenne en charge convenablement le malade», préconise une source du journal.

D’où la nécessité de la prise en charge du traitement de la maladie mentale, par la Couverture maladie universelle, conclut Sud Quotidien.

 

Auteur: seneweb News

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