J’ai vu sur les réseaux sociaux les photos de ces trois bambins attablés devant des bouteilles d’alcool, posant avec le sourire pour la caméra dans une attitude on ne peut plus normale. Jusqu’à présent je tente de me convaincre que ce ne sont que des opportunistes qui sont venus s’incruster sur une table vide préalablement occupée par des adultes pour prendre la pose et donner l’impression à leurs amis qu’ils sont dans l’air du temps.
Que mon hypothèse soit vraie ou pas, cela donne quand même matière à réfléchir sur la signification des termes « être cool » ou « être branché » de nos jours.
La drogue, l’alcool, le sexe, l’argent facile sont devenus l’activité principale de cette jeunesse et l’école l’activité secondaire. La violence devient monnaie courante avec les microbes qui gagnent de plus en plus de terrain.
Je regarde cette jeunesse désœuvrée et je me demande à qui profite le crime. 15 ans en arrière c’était impensable de voir les dérives auxquelles on assiste aujourd’hui impuissant. On a laissé faire, on a laissé passer et force est de constater qu’on est débordé. La guerre a eu bon dos. On l’a prise comme prétexte pour déstresser avec le coupé décalé sans savoir ou en faisant semblant de ne pas comprendre que la cybercriminalité (et désormais la criminalité tout court) allait s’y greffer pour longtemps. On l’a utilisée pour instrumentaliser les jeunes, les recrutant et les pervertissant de plus en plus tôt afin de pouvoir mieux les manipuler. On est passé de la génération sacrifiée à la génération scarifiée, celle qui porte les stigmates des erreurs, de la négligence, des honteuses ambitions politiques des générations précédentes et qui ne semble pas possédée en elle une volonté suffisante pour se régénérer.
Aujourd’hui les réseaux sociaux sont incontestablement un miroir qui nous renvoie clairement le faciès hideux de notre jeunesse. Elle est là, livrant son corps en pâture en tenue indécente, l’injure et la vulgarité au bout des doigts, les fautes aussi d’ailleurs. Des filles à peine sortie de la puberté, qui recherchent des « secrets » pour attirer un homme, le garder, le rendre fou. Juste ciel ! Des adolescents qui n’ont même pas trois poils au menton, s’alliant à des puissances occultes pour obtenir de l’argent qu’ils seront heureux de lancer en boîte de nuit pendant que les DJ scanderont leur nom en rythme.
Voilà ceux qui prendront les rennes de notre pays demain. L’émergence peut-elle survenir sans des hommes qualifiés et de qualité ? Si oui elle sera factice et condamné à une mort programmée. Elle ne saurait être pérenne. Jamais.
Est-il encore temps de renverser la vapeur? J’avoue ne pas savoir. Ce que je sais avec certitude cependant, c’est que tant que la télévision continuera de prôner des faux modèles et d’offrir ses plateaux à des personnes porteuses de contre-valeurs, tant que la radio servira à distiller la vulgarité à forte dose, tant que les journaux se feront les griots de la dépravation, tant que les parents garderont les bras croisés sous prétexte qu’il n’y a plus rien à faire, tant que l’école ne retrouvera pas sa poigne d’antan, nous continuerons de nous enfoncer.
Car l’école non plus n’est plus ce qu’elle était. Dans certains établissements le professeur n’est qu’un épouvantail qui en plus ne fait même pas peur. Interdit de taper l’élève. Interdit de le mettre à genoux. Interdit de lui donner 0. Interdit de le mettre dehors s’il perturbe les cours. Tout ce qu’on peut faire c’est de lui demander de recopier X fois qu’il se taira en classe. Et s’il ne recopie pas, tant pis. Les parents convoqués ne viendront pas, trop occupés ou fatigués tout simplement.
Il faut une véritable synergie des efforts à tous les niveaux de la chaîne pour espérer sauver les meubles. Ne pas se contenter de donner à la masse ce qu’elle aime mais ce qui est bon pour elle.