Présidentielle 2012 : comment les querelles Niasse-Tanor ont ouvert la voie à Macky Sall

Macky Sall a remporté haut la main (plus de 65% des voix) la présidentielle de 2012. Son face-à-face avec Abdoulaye Wade au second tour n’était qu’une simple formalité. Avec l’engagement de tous les candidats de l’opposition, scellé en amont, de soutenir celui d’entre eux qui arriverait en finale, l’affaire était pliée face au Président sortant.

Ce qui était moins évident à l’époque, c’était la deuxième place de Macky Sall à l’issue du premier tour de la présidentielle. Le candidat de l’Alliance pour la République (APR) n’était pas, en effet, le plus attendu. D’aucuns voyaient plutôt Moustapha Niasse, voire Ousmane Tanor ou Idrissa Seck, défier Wade au final.

Dans ses mémoires, «Passion de Liberté» (Présence africaine), publiés récemment, Abdoulaye Bathily revient sur les tractations dans les rangs de l’opposition qui ont débouché sur la deuxième alternance démocratique au Sénégal. Il révèle dans des extraits repris par le journal Enquête, comment les querelles entre Ousmane Tanor Dieng du Parti socialiste (PS) et Moustapha Niasse de l’Alliance des forces de progrès (AFP) ont ouvert la voie du Palais à Macky Sall.

«Une motivation quasi mystique»

Abdoulaye Bathily était à l’époque secrétaire général de la Ligue démocratique/Mouvement pour le parti et le travail (LD/MPT, devenu Ligue démocratique, LD). Il était l’une des principales figures de la grande coalition de l’opposition dénommée Benno Siggil Senegaal (BSS) dont le programme de gouvernance devait puiser sa substance des conclusions des Assises nationales.

Les membres de BSS avaient pour ambition de présenter un candidat à la présidentielle de 2012. Ousmane Tanor Dieng et Moustapha Niasse étaient les mieux placés pour porter cette candidature. Malheureusement pour BSS, ni le patron du PS ni celui de l’AFP n’étaient disposés à s’effacer au profit de l’autre. «De toute évidence, participer à cette élection présidentielle semblait relever pour chacun d’eux d’une motivation quasi mystique», commente Abdoulaye Bathily dans ses mémoires.

L’auteur de «Passion de Liberté» explique : «Lui, Tanor, trahirait la mémoire de Senghor, fondateur du PS, s’il ne se présentait pas. Quant à Moustapha Niasse, il disait avoir exercé toutes les plus hautes fonctions administratives et gouvernementales. Il ne pouvait donc pas renoncer à briguer la seule qui ne fut pas inscrite à son palmarès, qui plus est la plus prestigieuse de toutes. Il ne pouvait se contenter d’un simple poste de Premier ministre, et encore moins de parlementaire.»

Bathily ajoute : «Rien ne put convaincre l’un de renoncer au profit de l’autre, pas même la nécessité d’un sacrifice pour l’intérêt supérieur de la nation.»

Macky Sall, «le troisième larron»

Beaucoup d’initiatives ont été prises pour trouver une solution. Parmi celles-ci, la mise en place d’un «groupe de facilitation pour la désignation de la candidature commune». Abdoulaye Bathily était chargé de sa coordination. Il reçoit Niasse et Tanor à son domicile, «en terrain neutre, pour leur permettre de discuter directement».

Après quatre rencontres, constat d’échec : «Chacun campa sur sa position», rembobine l’ancien secrétaire général de la LD/MPT.  Niasse ira de son côté avec l’étiquette BSS et Tanor prendra sa voie sous l’étiquette «Benno ak Tanor». Macky Sall s’engouffra dans la brèche pour arriver deuxième au premier tour, derrière Wade, avant de s’imposer au second.

«Pendant que les deux larrons se battaient, ‘arrive un troisième larron/Qui saisit maître Aliboron’, comme dit la fable», conclut Abdoulaye Bathily.

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