Depuis son départ de la Maison-Blanche, le 44e président des États-Unis mène une vie loin de la politique et partage désormais son temps libre entre l’écriture, les œuvres caritatives et de très lucratives conférences.
«Je ne m’arrêterai pas. Je serai là avec vous comme citoyen», avait-il lancé avant de quitter la Maison-Blanche. Fidèle à une tradition de réserve, selon laquelle l’ancien se garde de critiquer le nouveau, le citoyen Barack Obama s’est jusqu’ici tenu à l’écart du débat politique. À seulement 56 ans, le retraité mène une vie presque banale pour un ancien président des États-Unis. L’ex-«commander in chief» a d’ailleurs retrouvé fin octobre ses quatre prédécesseurs, George W. Bush, Bill Clinton, George H.W. Bush et Jimmy Carter, à l’occasion d’un concert de charité en faveur des victimes des ouragans Irma, Harvey et Maria. Son quotidien est désormais partagé entre la participation à des œuvres caritatives, l’écriture de ses Mémoires et la tenue de conférences lucratives.
Les huit années passées à la Maison-Blanche ont blanchi ses tempes et tirés ses traits. Aussitôt la Maison-Blanche quittée, Barack Obama et sa compagne, Michelle, se sont donc rapidement offerts des vacances au soleil. Le 44e président des États-Unis a aussi profité de ce temps libre pour s’atteler à l’écriture de ses Mémoires, s’appuyant notamment sur un journal qu’il aurait tenu durant les huit ans passés à la Maison-Blanche. L’éditeur Penguin Random House aurait mis 60 millions de dollars sur la table pour s’offrir en exclusivité les confidences de l’ex-président, d’après le Financial Times. Le contrat porte aussi sur un livre signé par l’ex-première dame. Car, pour l’éditeur, le succès est quasi assuré. Obama, qui n’a rien perdu de sa popularité, est déjà l’auteur de plusieurs livres. Les rêves de mon père (1995) et L’audace d’espérer (2006) s’étaient déjà écoulés à 3 millions d’exemplaires chacun.
En qualité de «commander in chief» à la retraite, Barack Obama jouit toujours d’un certain nombre de privilèges, prévus par le Former President Act de 1958. Pendant les dix prochaines années, il pourra bénéficier de la présence du Secret Service pour assurer sa protection. Il garde, avec ses proches, la possibilité de se faire soigner dans des hôpitaux militaires. Il percevra aussi une retraite de 150.000 dollars par an et dispose en parallèle d’un budget de 96.000 dollars pour payer des conseillers et autres assistants. Obama s’est entouré de fidèles pour gérer l’après. Anita Decker-Breckenridge, qui l’assistait déjà dans l’Illinois, est sa chef de cabinet. Eric Schultz, son porte-parole adjoint à la Maison-Blanche, fait office de conseiller spécial. Kevin Lewis, venu du département de la Justice, assume le rôle de porte-parole.
Le président n’est pas tout à fait à la retraite puisqu’il s’est trouvé un nouveau métier: conférencier de luxe. En septembre, il était l’invité de la banque d’investissement Cantor Fitzgerald à New York qui réunissait pendant trois jours le gratin du secteur de la santé. Sa participation a fait des remous, notamment chez les démocrates. Le discours de deux heures, dédié à l’Obamacare, lui aurait rapporté selon certaines sources la bagatelle de 400.000 dollars. Quatre jours plus tard, il était à Toronto pour une autre conférence. Depuis son départ de la Maison-Blanche, Barack Obama s’est fait rémunérer pour six autres interventions en Italie, en Allemagne, en Écosse, au Canada, en Indonésie et en Corée du Sud. Selon son porte-parole, ces discours rémunérés lui ont permis de contribuer à hauteur de 2 millions d’euros aux programmes de formation et d’aide à l’emploi pour les jeunes de milieux défavorisés à Chicago.
«Certains tentent délibérément d’attiser la colère, de diaboliser ceux qui ont des idées différentes pour mobiliser leur base (…).»
Barack Obama à l’occasion d’un meeting démocrate dans le New Jersey
Toutefois, Barack Obama n’a que peu abordé les questions politiques en public ou lors d’interview. Bien que confronté à un travail de démolition de son héritage, il a parfois dérogé à la règle selon laquelle l’ancien président ne critique pas le nouveau. Il a ainsi tenu à réagir, sans jamais visé nommément son successeur, aux tentatives républicaines de démantèlement des réformes qui lui tenait le plus à cœur : l’assurance maladie, la législation sur les jeunes sans-papiers ou encore l’accord de Paris. Il est dernièrement sorti un peu plus de cette réserve pour soutenir publiquement deux candidats démocrates à l’élection des gouverneurs de Virginie et du New Jersey. «Certains tentent délibérément d’attiser la colère, de diaboliser ceux qui ont des idées différentes pour mobiliser leur base parce que cela donne un avantage tactique à court terme», a-t-il à demi-mot critiqué lors d’un meeting à Newark.
Les Obama vivent toujours à Washington où ils prévoient de rester au moins jusqu’en 2019, le temps pour la cadette de la famille, Sasha, de terminer ses études secondaires. Mais l’ex-président et sa compagne restent profondément attachés à Chicago. Il y était encore début novembre pour participer au premier sommet de sa fondation. Barack Obama s’est ainsi fixé l’objectif, flou, d’encourager l’engagement civique et de faire émerger une nouvelle génération de décideurs.
«Notre mission est simple : nous voulons inspirer les gens qui veulent changer le monde», s’est contenté d’expliquer l’ex-président à cette occasion. C’est aussi dans le «Southside» de Chicago, où il possède toujours une maison, qu’il a choisi d’abriter son ambitieux projet de Presidential Center, dont le coût est estimé à près de 500 millions de dollars. Le centre, pensé comme un «espace de citoyenneté», abritera salles de classe, laboratoires, espaces extérieurs et de rencontre, ainsi que les bureaux pour la fondation Obama et un lieu où seront exposés des documents liés aux huit années de sa présidence. Le projet verra le jour en 2021.
En attendant, cette vie loin de la Maison-Blanche n’a pas entamé le capital sympathie dont il bénéficie dans l’opinion américaine. Plus d’un Américain sur deux rêve que le 44e président des États-Unis soit toujours en fonction, d’après une enquête Public Policy Polling publiée fin septembre.