ALLOCUTION D’OUVERTURE
DE MONSIEUR AMADOU BA, PREMIER MINISTRE
Dakar, le 16 février 2023
- Monsieur le Vice-Président de la Banque Mondiale, Directeur Général de la SFI ;
- Monsieur le Président du Groupe de la BAD ;
- Monsieur le Gouverneur de la BCEAO ;
- Monsieur le Président de l’Autorité des Marchés Financiers de l’UEMOA,
- Monsieur le Président de l’Association Professionnelle des banques et établissements Financiers du Sénégal
- Mesdames et Messieurs les représentants des Partenaires Techniques et Financiers,
- Mesdames et Messieurs les Directeurs Généraux des banques et institutions financières de l’UEMOA,
- Honorables invités, en vos rangs et qualités,
- Mesdames et Messieurs,
- Chers invités.
Monsieur le Président du CNP, Cher ami et frère Baïdy Agne, c’est avec un immense plaisir et une grande satisfaction que je préside, au nom de Son Excellence, Monsieur le Président de la République Macky Sall, les « Assises de l’Entreprise 2023 » du CNP.
La particularité de l’édition de cette année est qu’elle se tient après deux rencontres organisées à Dakar par le Président en exercice de l’Union Africaine, le Président Macky Sall, en relation avec la Banque Africaine de Développement sur la souveraineté alimentaire et sur le financement des infrastructures. Les conclusions de ces rencontres de haut niveau sont en droite ligne des thématiques de vos Assises.
Chers participants,
Mesdames, Messieurs,
C’est avec un grand intérêt et un plaisir certain que j’ai écouté les échanges de qualité qui ont eu lieu lors de ce panel introductif de haut niveau des Assises de l’entreprise du CNP. Ce moment fort sur le thème « Dakar, Place financière de référence » promeut le Sénégal comme une destination de choix pour les investissements et les financements, tout en mettant en avant les efforts que les pouvoirs publics ont entrepris pour ce faire.
Inscrit dans le Plan Sénégal Emergent, le développement d’un écosystème favorable à l’innovation en matière de services financiers, est une priorité nationale, portée par le Président de la République Macky Sall.
La conférence de ce jour nous donne l’occasion de faire le point sur une industrie qui navigue dans le changement et de forger un plan d’action pour lancer la prochaine vague de capital privé vers la reprise et la transformation des économies africaines en général, et du Sénégal en particulier.
Le Sénégal a pour ambition de faire émerger des champions, en attirant et en développant à partir de son territoire des investissements directs étrangers, qui, en partenariat avec notre secteur privé local, positionneront notre pays dans les chaines de valeur mondiales et favoriseront l’éclosion d’un tissu dense de PME à travers des filières compétitives.
C’est l’ambition exprimée dans la Stratégie nationale de Développement du secteur privé qui prévoit notamment, outre un soutien important aux entreprises nationales et le déploiement de stratégies de compétitivité filières, d’attirer et de développer des groupes mondiaux et régionaux.
Nous avons ainsi beaucoup investi dans la mise en place des infrastructures nécessaires pour devenir un leader dans la région et une plaque tournante pour le commerce et l’investissement. Cela a permis d’amorcer l’industrialisation nécessaire au rééquilibrage durable de notre balance commerciale avec des plateformes industrielles, un pari industriel pour créer un pôle industriel à haute valeur ajoutée et un pôle logistique intégrés.
Parallèlement, nous œuvrons à faire de notre pays, un centre de référence multiservices au niveau régional pour attirer d’importants investissements directs étrangers, et favoriser la création d’emplois hautement qualifiés, y compris dans le secteur financier.
Mesdames et Messieurs,
Nous sommes résolument déterminés à continuer cette marche vers l’émergence alors que nous continuons à faire face aux effets des crises multiformes récentes. Ainsi, en raison des contraintes qui pèsent sur les ressources publiques et de notre objectif d’attirer davantage d’investissements privés pour garantir une croissance durable à long terme, le secteur privé a été placé au cœur des politiques publiques.
Or, plusieurs freins grèvent son essor, dont l’accès au financement, alors qu’il est urgent de favoriser l’innovation, développer la compétitivité et la conquête des marchés extérieurs, dans un contexte de croissance à 2 chiffres dès 2023, avec le démarrage de l’exploitation des hydrocarbures au 4ème trimestre.
La BNDE joue un rôle important en apportant des réponses globales aux besoins financiers des PME-PMI. La Banque agricole n’est pas en reste en mettant un accent particulier sur le financement des différentes chaînes de valeur relevant de l’agriculture au sens large.
Toutefois, la vingtaine de banques et établissements de crédit présents au Sénégal ne financent que 25 % de l’activité économique et seulement 6 % de la population sénégalaise adulte détient un compte dans une institution financière formelle.
Dès lors, des instruments de financement plus innovants s’avèrent indispensables pour compléter les financements classiques, très utiles mais insuffisants, qu’il s’agisse du financement bancaire qui ne répond pas au besoin critique de renforcement des capitaux propres, ou de la microfinance, dont les taux sont beaucoup trop élevés et les délais trop courts.
A cet effet, l’Etat du Sénégal a déjà initié depuis 2 ans des réformes de fond de l’écosystème financier national, notamment dans le cadre du PAP-2A. Elles ont notamment trait au lancement de nouveaux fonds (fonds mezzanines à travers le FONSIS et fonds d’appui à la préparation de projets), à la restructuration du FONGIP et à la réforme du cadre juridique des PPP.
Avant cela, nous pouvons notamment nous féliciter de la mise en place de la DER/FJ pour le financement efficace de l’entrepreneuriat des jeunes et des femmes en vue d’une meilleure inclusion économique et financière.
Mesdames et Messieurs,
Des initiatives ont également été menées à l’échelle régionale pour faciliter l’accès des PME au financement bancaire comme le « Dispositif de soutien au financement des PME/PMI dans l’UEMOA» de la BCEAO qui vise à créer un écosystème favorable à la PME, notamment à son financement, à travers un meilleur accompagnement.
Parallèlement aux ambitions financières, notre pays vise à transformer numériquement l’économie, en s’appuyant sur les priorités antérieures et celles nées de la crise à travers la stratégie Sénégal numérique 2035.
En sus des mécanismes classiques de financement, d’autres outils sont de plus en plus développés par les Fintech pour répondre aux besoins des acteurs du secteur privé qui sont multiples avec différents stades de développement.
Des progrès significatifs ont été faits dans le domaine avec un taux de pénétration de l’internet de 95%, le dynamisme des opérateurs de monnaie électronique, des assureurs et de nombreux acteurs de la fintech, parmi lesquels nous comptons des licornes (Wave et InTouch).
Mesdames et Messieurs,
Comme vous le savez, le gouvernement met en œuvre depuis plusieurs années un ambitieux Programme de Réformes de l’Environnement des Affaires et de la Compétitivité grâce auquel le Sénégal a fait d’importants progrès en termes d’attractivité.
Avec l’évolution technologique combinée à un environnement favorable au développement des affaires et sa stabilité, « Dakar place financière de référence » s’inscrit absolument dans la logique de transformation structurelle de notre économie.
Toutefois, des avancées importantes restent à réaliser afin que notre capitale, à côté de Johannesburg, Cape Town, Lagos, Casablanca, Maurice et Kigali, joue sa partition dans une logique de complémentarité, pour promouvoir l’intégration financière africaine, saisir les opportunités de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) et valoriser le potentiel énergétique et minier du Continent.
Ainsi, les efforts ayant conduit à la création de « Dakar Finance Cluster » en marge du Groupe consultatif de Paris de 2018 méritent d’être poursuivis. Nous devons travailler à offrir depuis notre capitale une large palette de services autour des métiers de la banque, de l’assurance, de l’immobilier, du chiffre, du conseil ainsi que de l’économie sociale et solidaire d’où seront lancées des entreprises locales leaders qui rayonneront au-delà du Sénégal.
Je citerai en particulier :
- l’élaboration d’une stratégie ciblée de promotion des investissements ;
- l’installation d’un centre d’arbitrage de référence à Dakar ;
- la restructuration et la mise en cohérence des banques à capitaux publics ;
- la mise en place d’un cadre réglementaire et fiscal spécifique afin d’attirer au Sénégal des services d’exports internationaux et de faire émerger des acteurs locaux d’externalisation ;
- la mobilisation de l’épargne nationale
Et au niveau régional voire continental :
- l’allègement des règles d’admissibilité des PME au refinancement de la Banque centrale ;
- plus d’agilité dans la régulation des banques ;
- la diversification des produits d’assurance ;
- l’amélioration du ratio de la capitalisation boursière sur le PIB (qui est de 60% en Afrique contre 72% en Europe et 180% aux Etats-Unis).
Il est important que les réflexions menées durant cette rencontre puissent contribuer à co-construire des partenariats novateurs pour que Dakar soit une place financière de référence.
Mesdames et Messieurs,
Chers participants,
Permettez-moi, à présent de revenir sur les préoccupations, importantes, du reste, soulevées par le Président du CNP.
Monsieur le Président,
Cher Baïdy,
Vous l’avez souligné à juste raison, notre système fiscal est basé sur la stratégie de l’élargissement de l’assiette qui renforce l’équité et la justice fiscales. L’augmentation du budget, vous avez raison, ne signifie pas donc nécessaire une augmentation des impôts. Au contraire le yaatal pourrait même entrainer le waagni. Cette conviction, vous la partagez avec moi. Vous la partagez aussi avec l’ensemble des membres du Gouvernement. Le dispositif fiscal actuel y contribue.
Au demeurant, vous serez impliqués dans le conception et la mise en œuvre de l’important chantier de réforme du système fiscal qui va bientôt commencer. Comme dans le cadre de la précédente réforme, de larges concertations seront ouvertes, dans une démarche inclusive, pour associer l’ensemble des partenaires à la réflexion et à l’incubation de ce qui sera le nouveau dispositif fiscal.
Concernant la dette intérieure, vous n’êtes pas sans savoir que des efforts importants ont été consentis par l’Etat durant l’exercice budgétaire précédent. Ces efforts seront accentués pour conforter les équilibres budgétaires et financiers ; d’autant plus que la forte croissance projetée va permettre au Gouvernement de générer une marge de manœuvre budgétaire significative pour renforcer le développement du secteur privé.
Par ailleurs, vous n’êtes pas sans savoir que l’environnement des affaires constitue l’axe majeur de la politique d’attraction des investissements nationaux et internationaux.
Mesdames, Messieurs,
Le Président de la République Macky Sall, considère que l’industrie doit être la base économique et le fer de lance de notre politique de développement. Le Gouvernement soutient l’entreprise et de la production locales à travers sa politique d’industrialisation.
Mon cher Baïdy,
Je vous remercie, à mon tour, au nom du Président de la République Macky Sall, pour votre implication dans l’amélioration du Code des marchés. Vous l’avez dit et c’est vrai, l’Etat du Sénégal tient, à travers cette réforme majeure, à renforcer l’entreprise nationale dans le but de favoriser la création de champions nationaux. C’est pour cette même raison que 5% de la commande publique seront réservés à l’économie sociale et solidaire, c’est-à-dire aux femmes, aux jeunes et aux personnes vivant avec un handicap ; 2% seront réservés aux entreprises à actionnariat majoritairement féminin. Ce dispositif déjà opérationnel fera l’objet d’une évaluation périodique, et les ajustements nécessaires seront apportées progressivement pour parfaire notre règlementation en matière de commande publique.
Car, vous le savez, le Président de la République Macky Sall tient à faciliter l’accès des privés nationaux dans les projets « IPP », ainsi que d’infrastructures portuaires pétrolières et gazières. La loi sur le contenu constitue une matérialisation de cette volonté du Chef de l’Etat.
Vous savez également que la protection du pouvoir d’achat des Sénégalais est une préoccupation majeure du Président de la République. Nul n’ignore les efforts qu’il a fait prendre au Gouvernement à cet effet pour lutter contre les effets néfastes des crises internationales qui n’ont pas épargné notre pays. C’est ainsi que les salaires et les pensions ont été fortement valorisés durant l’année 2022.
Comprenant bien les contraintes qui sont les vôtres, l’Etat vous a été soutenu autant qu’il pouvait durant ces périodes de crise. Il vous sollicite à présent pour que dans un élan de solidarité, vous puissiez aussi améliorer les salaires de vos employés. Naturellement, le dialogue que nous cultivons, entre les différentes parties prenantes permettra d’y apporter des réponses adéquates.
Enfin concernant la paix sociale et le dialogue politique, vous savez le Président de la République Macky Sall y œuvre au quotidien. Il a demandé au Gouvernement de privilégier la concertation avec tous les acteurs.
Vous, Parti de l’Entreprise êtes en train de jouer votre rôle. Je vous demande de vous impliquer davantage pour que des réponses adéquates puissent être apportées aux difficultés et aux préoccupations de nos compatriotes.
Le Gouvernement vous apportera tout le soutien nécessaire pour faire triompher le dialogue social et le consensus politique.
Mesdames Messieurs,
Chers invités,
Je ne saurais clore mon propos sans remercier les membres du CNP pour toutes les initiatives qu’ils réalisent à côté du Gouvernement et les encourager à continuer à jouer le rôle majeur attendu en matière de création de richesse et d’emplois formels pérennes et décents.
En déclarant ouvertes les Assises de l’entreprise, je reste attentif aux recommandations qui seront issues des échanges.
Je vous remercie de votre aimable attention.