Macky Sall et ses collaborateurs : Une longue histoire d’allers-retours

À suivre les revirements qui caractérisent les démissionnaires ou les limogés de la Présidence, Thierno Alassane Sall ne devrait pas s’inquiéter. S’il nourrit l’envie de revenir.

Les initiales, TAS, sont utilisées avec parcimonie par la presse, pourtant si friande de raccourcis, pour le désigner. Certainement pour ne pas l’amalgamer avec l’autre Tas, le Tribunal arbitral du sport. Thierno Alassane Sall a opté pour un arbitrage pour le moins controversé sur la signature d’un accord sur le pétrole dont les finalités lui ont été fatales. Limogeage ou démission, le ci-devant ministre de l’Energie et des Energies renouvelables est encore sorti du gouvernement qu’il avait déjà quitté en juillet 2014 en tant que ministre des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement.

Le Cas Mimi Touré

Les rapports de Macky Sall avec ses collaborateurs sont emblématiques d’une révolution réussie qui dévore ses propres enfants. Ce deuxième congédiement de Thierno Alassane Sall de l’attelage gouvernemental est le plus actuel d’une série, qui fait suite à la défaite de hauts cadres du parti présidentiel aux élections locales du 29 juin 2014. Mettant sa menace à exécution de limoger tous ceux qui perdraient dans leurs circonscriptions, le Président Sall se sépare de son premier ministre, Aminata Touré dite Mimi, qui a mordu la poussière à Grand Yoff, face à Khalifa Sall. Moins d’un an après avoir été portée à la Primature, Mimi Touré plie bagage et cède sa place à Mahammad Dionne pour un troisième gouvernement. Le décret présidentiel la relevant de ses fonctions ne mentionne aucune explication sur son limogeage. La ministre de la Femme, de la Famille et de l’Enfance, Anta Sarr Diacko, a également connue le même sort. Victime collatérale des Locales puisqu’elle s’est affalée à la Sicap-Liberté, elle avait pris sa sortie du gouvernement avec beaucoup de philosophie : « Chaque mission est donc appelée à prendre fin un jour. Je me dis tout simplement que c’est le temps qu’il fallait que je fasse dans ce ministère et qui aujourd’hui est terminé », déclarait-elle au lendemain de son remplacement par Mariama Sarr qui a gagné Kaolack.

Le cas Alioune Badara Cissé

Le cas le plus symptomatique reste sans doute celui d’Alioune Badara Cissé. Compagnon de la première heure du « pestiféré politique » Macky Sall avant 2012, Directeur de cabinet et Secrétaire général du gouvernement de Macky Sall alors Premier ministre, ABC s’est vu trop beau dans les habits de numéro 2 de l’Alliance pour la République (APR) après le nouveau bail au Palais de l’Avenue Roume. Ministre des Affaires étrangères alors qu’il était pressenti à la Primature, cet avocat saint-louisien est remercié du gouvernement à la surprise générale sept mois après la seconde alternance, en octobre 2012. Un limogeage jusque-là inexplicable et inexpliqué puisque ni lui, ni le Président Sall ne s’en ouvriront.

Le cas Moubarack Lô

Quant à Moubarack Lô, le cas est un peu différent puisqu’il a démissionné de son poste de chef de cabinet adjoint du Président, le 31 octobre 2013. Ceci après que Macky Sall lui a enlevé sa charge de coordonnateur du Comité Projets Sénégal Emergent en septembre 2013. Dans une sortie épistolaire, destinée à contrecarrer la communication du Palais, Moubarack Lô s’est défendu avec véhémence. « La cause immédiate de ma démission, je l’ai dite, c’est la décision de M. Macky Sall de me retirer la présidence du Comité Projets Sénégal Emergent. La cause sous-jacente, c’est le choix présidentiel d’accepter qu’un groupe de Sénégalais établis à l’extérieur, et regroupés dans une structure dénommée « disso » dont l’ancien ministre de l’Economie et des Finances, Amadou Kane, était membre, avant mars 2012, joue un rôle prépondérant dans le projet Sénégal émergent, au détriment des hauts cadres de l’État. La cause profonde, c’est le style de management présidentiel, qui n’est pas très motivant pour un intellectuel, et la lenteur dans la mise en œuvre des réformes promises aux Sénégalais. »

Les cas de Mor Ngom et Benoît Sambou

Ces limogeages ou démissions ne sont qu’une manière pour le Président Sall de les faire entrer par la fenêtre après leur avoir fermé la porte. Les sanctions de Macky Sall s’abattent certes sur ses camarades de parti, limogés ou démissionnaires, mais leur reclassement s’ensuit aussitôt. L’ancien chef du gouvernement a été reconverti Envoyée spéciale du Président en 2015; Alioune Badara Cissé est rentré dans les grâces de Macky en tant que médiateur de la République en août de la même année. Anta Sarr Diacko nommée Déléguée générale à la protection sociale et à la solidarité nationale, et même le virulent Moubarack Lô est revenu à la maison, les prérogatives en baisse puisqu’il a réintégré la Primature où il est conseiller spécial du PM depuis août 2016.

Ces collaborateurs ou cadres « apéristes » n’ont pas été les seuls. Sous la pression de la realpolitik, le Président Macky Sall a réalisé qu’il ne pouvait pas se séparer de tous ses proches à cause de la purge électorale. Ainsi, Mor Ngom, ancien ministre de l’Environnement et du Développement durable, Benoît Sambou, ancien ministre de la Jeunesse, de l’Emploi et de la Promotion des valeurs civiques et Docteur Abdou Aziz Mbaye, alors ministre de la Culture et du Patrimoine sont recasés au palais de la République. A la faveur des décrets n° 2014-948, 2014-949 et 2014-950 en date du 1er août 2014, ils sont nommés au poste de ministre-conseiller personnel du président de la République.

Si Thierno Alassane Sall nourrit l’ambition de rejoindre le giron présidentiel, le futur est de bon augure pour lui comme il en a été pour ses devanciers.

 

Auteur: EnQuête – EnquetePlus

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