FUITES DE VIDÉOS OU D’HISTOIRES INTIMES DANS LES GROUPES WHATSAPP OU FACEBOOK : Comment on devient la risée du monde en un clic

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DE NOS JOURS, BEAUCOUP DE CHOSES ATTERRISSENT SUR LE NET. LES FUITES DE VIDÉOS OU D’HISTOIRES INTIMES DANS LES GROUPES WHATSAPP OU FACEBOOK ENTRENT DANS CE CADRE. QU’EST-CE QUI EXPLIQUE UN TEL PHÉNOMÈNE ? LA NOTION DE PUDEUR A-T-ELLE DISPARU DU CODE DE CONDUITE DES SÉNÉGALAIS ? DU FANTASME AU PÉCHÉ, COMMENT LES RÉSEAUX SOCIAUX FONT DE NOUS LA RISÉE DU MONDE. IMMERSION !

De victime, on passe très vite à coupable

Les fantasmes agrémentent nos vies. Et, parfois, on a envie de les partager avec notre cercle restreint. Un vice altruiste, parfois sa- lace et qui, hélas, vire au «drame». En un clic, on devient la risée de tout un monde. La toile est le facteur favorisant. Les fuites de vidéos ou d’histoires intimes dans les groupes WhatsApp ou Facebook sont devenus des faits très courants. Il ne se plus passe un jour sans qu’une personne ne soit l’objet d’une transgression. C’est soit des photos ou vidéos intimes destinées à son partenaire, entendez par là «petit ou petite ami (e), qui se retrouvent un bon jour sur les réseaux sociaux.
Si certains indexent des gens mal intentionnés qui diffusent ce qui se passe ou ce qui se dit dans un cadre purement privé, d’autres pointent du doigt la responsabilité des auteurs qui se permettent d’envoyer des choses intimes à leur partenaire. Ce n’est même pas prudent avec son mari, son épouse, encore moins son petit copain ou petite copine. C’est du moins la déduction qu’en fait une société hostile à ces genres de pratiques et intransigeante quand il s’agit de sanctionner les «victimes. Nuance. Souvent, ce sobriquet n’est pas la bonne appellation. Parfois, on est considéré comme coupable alors qu’en son for intérieur, on souffre le martyr. Quoi qu’il en soit, les Sénégalais sont divisés sur la question.

La toile, une mauvaise confidente

«On ne raconte pas sa vie à tout le monde. Un confident ne se choisi pas au hasard. Enfin, si on a peur de voir ce qu’on considère comme privé, devenir public», disait l’autre.
Pourtant, les groupes créés à par- tir de Facebook ou WhatsApp ne sont plus de simples espaces servant à évacuer le stress ou pour maintenir les liens d’amitiés. C’est plus que cela. Les gens y racontent leur vie de tous les jours et vont même jusqu’à partager leurs histoires intimes. Ce qui, quelque-fois, peut leur porter préjudice. Ici, les confidences virent à la trahison. Un cas similaire s’est produit il y’a moins d’un mois. C’est l’histoire de cette jeune fille qui a voulu satisfaire son petit ami en voulant lui envoyer une vidéo ou elle était toute nue. Comble de malheur pour elle, la scène a atterri ailleurs. Le récepteur n’a rien fait d’autre que la poster sur le net. Les ragots allaient bon train. «Beaucoup de gens n’ont pas la culture de l’internet», lâche Lamine Diédhiou, un fervent utilisateur de WhatsApp, qui est dans plusieurs groupes.
Pour lui, il incombe de poser le débat sur l’utilisation de cet outil qui, malgré son nom, ne rime pas toujours avec netteté. «Nous, on pense qu’on peut tout faire avec internet, qu’on peut raconter nos vies. Alors que c’est quelque chose qui sert à partager des informations, des thèmes, ainsi de suite. Ce qui est intime relève de la personne en tant que telle», dit-il. «Quand tu tiens vraiment à partager ces choses, au moins, prend la peine de le faire là où tout le monde n’a pas accès. C’est mieux que d’étaler ça sur le net», lance-t-il ensuite.
Aux yeux de Fatou Ka, étudiante en Licence 3 en Communication, les fuites du genre se justifient par une certaine dépendance vis-à-vis de ces outils. Ce qui fait que leurs utilisateurs ne sont plus conscients de ce qui peut leur arriver. Sinon, cette dernière ne peut pas concevoir qu’une fille se mette toute nue dans une vidéo pour l’envoyer à son copain. Encore qu’elle ne peut pas croire que ce soit juste un copain.
«A quel titre doit-on envoyer des photos à poils à un petit ami ? Où est la pudeur (kerssa, en wolof) : soubassement de la dignité de la femme dans la société sénégalaise ? » s’interroge-t-elle.
Cette journaliste voilée, la mine sérieuse se veut catégorique : «Le mot intimité ne doit pas perdre sa valeur, c’est risqué même d’en- voyer ces vidéos compromettantes à l’homme avec qui on est unis devant Dieu et les hommes, encore moins à un petit ami». Et de se rappeler de la vidéo de cette femme dont le mari avait oublié son ordinateur dans le taxi qui l’amenait à l’aéroport : «Quand les images ont été diffusées par un maitre chanteur, las de demander de l’argent en vain, le couple, déjà, n’était plus dans les liens du mariage. Mais la femme qui avait un autre mari entre temps a vu son ménage battre de l’aile.» Situant les responsabilités, elle note : «Les deux parties sont à la fois coupables. Envoyer des photos obscènes ne riment pas avec notre tradition, les divulguer au grand public, encore moins.» Soulignant en outre que c’est un réel problème qu’on voit presque tous les jours et cela devrait largement suffire pour que chacun, surtout les jeunes, puisse prendre des mesures.
«Il faut savoir que ce que l’on dit dans les vocaux ou ce que l’on écrit dans les commentaires peut- être enregistré par n’importe qui», a-t-elle averti. Aussi fait-elle remarquer que se laisser emporter par l’euphorie du net et la folie de la jeunesse ne doit point nous éloigner de l’idée selon laquelle, nous serons, plus tard, des ma- mans et des pères de famille.

«Une publication sur Facebook a failli me couter mon ménage»

Dans le même tempo, cette jeune demoiselle sous couvert de l’anonymat explique qu’elle a été une fois victime de ces faits. Pour avoir une fois publié dans un groupe sur Facebook que son mari devait épouser une seconde femme et qu’elle avait été choisie pour être la marraine. Dans le texte, elle a indiqué qu’elle ne voulait pas de cette faveur que lui avait proposée son mari mais qu’elle l’avait accepté. Elle est donc venue sur la page pour solliciter des conseils et des propositions de cadeaux qu’elle allait offrir à sa co-épouse le jour du mariage.
«Quelqu’un a capturé la publication et est allé le montrer à mon mari. Ce qui a failli me couter mon ménage. C’est dire qu’il ne faut pas faire confiance à ces groupes et il ne faut accepter d’y dévoiler sa vie. Avant d’intégrer un groupe, il faut d’abord s’assurer de connaitre les différents membres», tranche notre interlocutrice. Apparemment, les intentions ne sont pas les mêmes. Abondant dans le même sens, Abdou Mbaye considère que tout se résume en ce qu’on appelle la personnalité.
«Le culte de la personnalité, soutient-il, chacun de nous doit l’avoir parce que faire partie d’un groupe, vouloir faire rire les gens ne doit pas te pousser à basculer au ridicule, à faire des affirmations gratuites, dire des contre-vérités ou encore faire des choses qui ne sont pas bien du tout. Je pense que ceux qui le font manquent de caractère et de personnalité», croit-il savoir. Selon lui, il y’a un autre problème que les gens négligent : l’éducation de base.
«Tout ce que les gens font en ce moment dans les groupes, relève des conséquences d’un manque d’éducation de base. Car, si on est bien éduqué et issu d’une famille respectée, on doit se passer de certaines choses.»
A côté, analyse-t-il, «certains le font aussi pour se faire remarquer et le fait même que leurs vidéos se retrouvent sur le net ne les dérange pas du tout».
Par ailleurs, il pointe la responsabilité des administrateurs des groupes. «Comme dit l’adage, vivre heureux, c’est pouvoir s’organisé. Tant qu’il n’y a pas d’organisation qui suppose un certain nombre de règles, c’est la liberté qui s’en suit. Pour ce qui est de certains problèmes relatifs au sexe et autres choses indécentes, l’éducation doit commencer par soi-même. Rien ne nous oblige à montrer nos parties intimes ou à se défouler sur les réseaux sociaux car on n’y gagnera rien. C’est, à la limite, ridicule. On oublie souvent qu’on peut perdre le téléphone à n’importe quel moment. On ne doit même plus laisser certaines choses dans les téléphones, aussi sophistiqués soient-ils. Les conséquences que cela peut engendrer sont néfastes», a-t-il alerté.

«A cause d’une photo, j’ai coupé les ponts avec ma meilleure amie»

Cette jeune fille qui ne veut pas dévoiler son nom apprend qu’une simple photo a gâché 10 ans d’amitié. En effet, il s’agit d’une image pas du tout fameuse qu’elle a envoyée à sa meilleure amie. «J’avais l’habitude d’envoyer des photos drôles genre avec des grimaces à ma copine pour la faire rire», se souvient-elle. Cette fois-ci, elle est allée plus loin en lui envoyant une autre où elle était dans les toilettes, assise sur une chaise anglaise. Sa copine n’a rien fait d’autre que de la renvoyer dans un groupe sur WhatsApp.
«Je n’ai pas pu digérer cela. N’empêche que je lui ai pardonné depuis. Mais j’ai préféré qu’elle reste loin de moi pour toujours. Ça me fait mal mais c’est comme ça, elle l’a bien cherché», dit-elle la mine triste.

Des choses positives, il y en a dans les groupes WhatsApp ou Facebook …

Malgré ces coups bas vécus par de nombreux utilisateurs des réseaux sociaux, il y’a, à côté, des ondes positives. Mamy Keïta confirme qu’il lui arrive d’être toute seule chez elle et qu’elle allait s’ennuyer grave pour ne pas dire qu’elle allait devenir folle si elle n’était pas plongée dans les
discussions sur WhatsApp. «J’allais rester là à penser à n’importe quoi. C’est un bon compagnon», s’exclame-t-elle, martelant qu’elle discute de tout et de rien avec ses amis. Ce qui la réconforte beaucoup surtout dans les moments de détresse.
A travers ces groupes, il y’a des échanges d’idées, de recettes de cuisine entre femmes par exemple. «C’est super intéressant parce que chacun essaye de proposer un thème. De l’actualité aux faits divers. J’en vois souvent dans les groupes dont je fais partie et c’est vraiment important», révèle Mamy. De plus, note-t-elle qu’on peut également travailler à distance.
«Je peux même dire qu’il y’a plus d’aspects positifs que négatifs. Malheureusement, les gens s’en aperçoivent moins, regrette-t-elle pour le dénoncer. Ce qui est dommage. C’est un peu l’homme qui est comme ça. Tout le temps intéressé par cette version négative des choses.»

people.sn

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