Enquête-L’incroyable bamboula au FAISE

Enquête-L’incroyable bamboula au FAISE

Flambée des salaires, népotisme, injustices, distribution effrénée d’argent, voilà la nouvelle vie du Fonds d’Appui à l’Investissement des Sénégalais de l’Extérieur (FAISE). Rien, vraisemblablement, ne peut arrêter l’Administrateur de cette institution, Mme Nata Mbacké Samb.

Enquête-L’incroyable bamboula au FAISE

Une incroyable gestion népotiste qui foule aux pieds les règles administratives a cours au Fonds d’Appui à l’Investissement des Sénégalais de l’Extérieur (FAISE). Cet instrument sorti de l’imagination fertile de l’ancien président de la République, Me Abdoulaye Wade, a été créé par le décret n° 2008-635 du 11 juin 2008. L’idée à la base de sa création est de porter secours aux émigrés sénégalais. Wade dont la « générosité » est connue de tous n’avait malgré tout affecté au Faise que quelque 340 millions de FCFA. Aujourd’hui, le budget est de 3 milliards de FCFA. Jusque-là rien de répréhensible si ce ne sont les subites libéralités auxquelles se livre l’Administrateur du Fonds, Mme Sokhna Nata Mbacké Samb.

Sitôt nommée, fort d’un CV « imposant », fantaisiste, diront à tort ou à raison, les mauvaises langues, a entrepris une discrète opération d’autonomisation de sa structure. Elle qui a, selon une source proche de l’ancienne ministre délégué, Seynabou Gaye Touré, longtemps fait le pied de grue au bureau de Mme Touré. Première cible, la Dgse. La tutelle du directeur général des Sénégalais de l’Extérieur Sory Kaba, sans doute, trop encombrante, ne lui plaît guère. Elle clame haut et fort que son supérieur hiérarchique est le ministre Mankeur Ndiaye. Là, les textes lui donnent raison. Ragaillardie par ce succès, elle ouvre d’autres hostilités contre, tout d’abord, la Direction à l’appui aux investissements et aux projets (Daip) dont elle tiendrait à réduire l’influence. Impossible ! Le directeur de la Daip lui tient tête. Elle baisse la garde. Mais, elle remporte son combat contre le gestionnaire. Ce dernier était le financier du Faise du temps où Sory Kaba en était l’administrateur. Puis c’est au tour de l’assistante. La chirurgie est parfaite lorsqu’elle finit par se débarrasser du disque dur de la boîte, Souleymane Diallo. Progressivement, s’installe une équipe dévouée à sa cause et aux fonctions visiblement fantaisistes. Pour « dissoudre » le trop-plein de nouvelles recrues dans le Faise, Mme Samb opère des transformations dans ses locaux et change le mobilier. Jusque-là, sans doute, rien de trop grave.

En mars 2015, commence le vrai combat. Mme Mbacké veut muter le Faise en agence pour donner une caution légale à cette gestion dispendieuse. «L’administrateur du Faise flanqué de son équipe de conseillers s’était rendu à la primature. Une réunion est convoquée autour du secrétaire général adjoint du gouvernement, le magistrat Cheikh Dieng. Elle demande une mutation du Faise en…Agence », raconte une source qui préfère garder l’anonymat. Une doléance qui tombe mal d’autant que son mentor, Macky Sall a depuis quelque temps opéré une chasse aux nombreuses agences superflues et clientélistes laissées par Wade. «En un rien de temps, le secrétaire général adjoint démonte, au cours de la réunion, les ambitions de Mme Nata Mbacké Samb et lui fait remarquer que le Faise n’a point les caractéristiques pour être érigé en Agence. Cheikh Dieng lève aussitôt la séance au grand dam de Mme Samb », ajoute notre interlocuteur. Il faut  noter que le Sieur Dieng venait d’ailleurs juste d’être nommé à ce poste pour pallier les carences en matière de rédaction juridique et de conformité des actes pris par le gouvernement.

Il faut noter que le gouvernement avait supprimé une dizaine d’agences, en 2012, à la faveur du changement de régime. Une manière de rationaliser les agences qui commençait à pulluler. Mais, cette décision n’est pas sans conséquence. Après une âpre bagarre judiciaire, l’Etat a finalement consenti à indemniser les travailleurs des agences dissoutes à hauteur de 300 millions. D’autres ex-agents sont intégrés dans la Fonction publique. C’est pour éviter les écueils de «l’agencialisation» que l’autorité veille scrupuleusement à la création des agences. Malgré les efforts de l’Etat, le FMI a exhorté au mois d’avril dernier le gouvernement à réduire davantage les agences.

Une agence de faite

En dépit de cette situation, Mme Samb n’en démord pas pour autant dans son projet de faire du Faise une…Agence. Selon plusieurs sources, elle passe alors outre les observations du juge Cheikh Dieng et du Faise une agence de fait mais pas de droit.

Les salaires, premier secteur juteux, flambent. Le contractuel touche entre 350 000 FCFA et 450 000 FCFA. La Responsable de la Division Partenariat et Projets perçoit un million. Tout est aligné sur les émoluments des agences. Ça recrute de partout. «La petite amie du fils de l’Administrateur est contractuelle », nous rapporte notre source. Son propre fils n’est pas recruté mais, tout porte à croire, que le jeune, la trentaine, ne se plaint guère. Lui qui passe des journées entières au Faise. Une équipe audiovisuelle est embauchée alors qu’il y a un service de communication au Faise et au Ministère des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur.

Mme Samb qui voit tout en grand se paie une grosse Range Rover à la place du véhicule en bon état que lui a légué son prédécesseur. Le Faise qui se sent à l’étroit avec la flambée des recrutements déménage à la Cité Keur Gorgui. De nouvelles dépenses sont engagées pour le mobilier et autres matériels de bureau. Aujourd’hui, du fait des nombreux recrutements, les deux appartements loués à la cité Keur Gorgui ne suffisent plus à accueillir les agents du Faise.

Elle marque la distance avec la tutelle en créant son propre site internet alors le ministère en a déjà.

La barre est franchie lors de l’Expo Milan 2015, en Italie. Mme Nata Mbacké Samb fait le plein de représentants. Au total 6 à 7 personnes sont convoyés. Parmi les heureux missionnaires figurent le jeune chauffeur de l’Administrateur, son fils et sa petite amie. Tous pris en charge par le Faise.

Mme Mbacké  ne se sent pas lésée dans cette situation. Elle qui a bâti en un temps record une villa d’une valeur de plus 100 millions aux HLM grand Yoff.

Les bénéficiaires des financements livrés à la voracité des banques

Seule maître à bord, l’Administrateur du Faise déroule librement son plan. Comme en atteste les nouvelles dispositions pour l’accès aux fonds alloués aux émigrés. Désormais, il faut, en effet, débourser en liquide 10 % du montant sollicité pour toucher au financement sollicité. Ce n’était nullement le cas avant. Pourquoi cette subite mutation ? Une source proche de l’institution confie que le taux de remboursement des financements antérieurs est dérisoire. Ainsi, pour contraindre les bénéficiaires à payer leur dette, le Faise les livre aux banques qui leur exigent un apport liquide de 10 %. En plus le taux de 6% appliqué par Fonds d’aide est excessif et contribue grandement à un faible remboursement.

Au moment où les bénéficiaires sont pressurés, des sommes faramineuses sont distribuées aux femmes de la Diaspora sans aucun apport. C’est le cas en juillet dernier où Mme Mbacké a distribué 150 millions de FCFA au Congo. La même opération a été rééditée au Burkina Faso où le choix des bénéficiaires laisse transparaître une politisation à outrance du Faise. En France, le Faise a dégainé 200 millions de FCFA, à Bruxelles 100 millions de FCFA. Sans compter qu’en Italie, au Mali, en Mauritanie, etc. les femmes se sont vues arrosées de billets de banque sans les 10 % que les banques réclament. Cette gestion de Mme Mbacké est rendue possible par la complicité de certains responsables. « Mme Mbacké a quasiment dans sa poche Bakasso Gassama, le nouveau directeur de la Daip et Sory Kaba le Directeur général des Sénégalais de l’extérieur. Tous les deux refusent d’ouvrir les yeux », soupire un employé du Faise.

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