CONFLIT ENTRE LA VOITURE ET LE PIETON SUR LES PASSAGES CLOUTES: 100 morts chaque année et toujours le même appel à la sécurité !

CONFLIT ENTRE LA VOITURE ET LE PIETON SUR LES PASSAGES CLOUTES: 100 morts chaque année et toujours le même appel à la sécurité !

 

 

Conduite agressive, pas de priorité pour les piétons, traversée hasardeuse… Chaque année, ce ne sont pas moins de 100 piétons qui sont tués sur la route, soit en traversant, soit en marchant sur la chaussée ou alors sur le long de la route. On remarque clairement le non-respect du passage piéton, d’un côté de la part des conducteurs et d’un autre des piétons.

A quoi servent les passages piétons dans les rues de Dakar ? En tout cas, dans les petites rues, les passages piétons sont rares, tandis que dans les artères importantes ils sont plus utiles, mais pas assez sécurisées, donc dangereux. Scène quotidienne.

Mercredi, 9 heures, à Mermoz. La capitale est passée en situation rouge à cause de la «très mauvaise qualité de l’air. Une dame d’un certain âge traverse la chaussée sans faire attention. Soudain, une voiture glisse et les freins crissent. Elle évite de peu la sexagénaire… ‘Hay boma laloon nga xam may kan’ (Si vous m’aviez touché, vous verrez de quoi je suis capable)», s’exclame la dame.

Ce conflit entre automobilistes et piétons, c’est presque remarquable au niveau de tous les passages cloutés de la ville. À Dakar, pour un tiers des piétons tués en ville, ça s’est passé sur un passage piéton, selon des données officielles. Au niveau de ce même arrêt Cheikh Béthio à Mermoz, à cette heure de pointe, le passage clouté n’est pas du tout respecté. Pour preuve, la dame Fatou Sarr est bloquée au passage piéton depuis une bonne dizaine de minutes.

La mésaventure de Fatou au passage clouté de Mermoz

Elle explique sa mésaventure : «Je n’ose pas traverser tant que les voitures roulent à vive vitesse. Je fais très attention, car un jour à l’arrêt de la station Total de Mermoz, en traversant le passage clouté, la première voiture avait cédé le passage, mais la seconde m’a heurté avant de me traîner sur plusieurs mètres. Ce jour-là, s’il y avait une autre voiture qui venait, je serais morte».

Écouteurs dans les oreilles, traversées anarchiques en dehors des clous ou non-respect des feux, voitures roulant à toute vitesse, sans aucun égard, ni compassion aux piétons qui veulent traverser la voie, le piéton dakarois ou le conducteur, jeune ou vieux, est parfois indiscipliné.

Faut-il le rappeler, les passages pour piétons sont délimités par des lignes blanches au sol et situés à un endroit où il n’y a pas souvent de panneaux d’arrêt ni de feux de circulation. Ils servent à faciliter le passage pour les piétons. Car ceux-ci ont priorité lorsqu’ils s’engagent sur la chaussée (lorsqu’ils mettent le pied dans la rue). Il est conçu pour maintenir les usagers groupés dans un espace visible par les automobilistes et où ils peuvent circuler ou traverser en toute sécurité vis-à-vis du trafic routier.

Cette définition n’est qu’une simple théorie sur les voies de dégagement de la capitale. Au niveau d’un passage clouté de la VDN, ici en cette heure de forte affluence, les cars déposent ou prennent des clients dans l’anarchie la plus totale. A notre passage, un groupe d’étudiants tente de rejoindre l’autre côté de la voie. L’attente fut longue, certains se lancent, d’autres à l’image de cette jeune fille préfère attendre le bon moment.

Un périple risqué et incompréhensible

«A chaque traversée, je suis animée par un sentiment de peur. Je ne force rien, parce que quand on va expliquer les causes, toi tu seras à l’hôpital ou mort. Il n’y a aucun doute, tu peux te faire renverser à tout moment ici alors que tu as la priorité», dit-elle.

Le pire, c’est qu’on assiste à des traversées hasardeuses des piétons pour rejoindre la cité SIPRES, de l’autre côté de la voie. Un périple risqué et incompréhensible, d’autant qu’une passerelle est érigée à une vingtaine de mètres du pont.

«Les responsabilités sont partagées. Il est vrai que le conducteur sénégalais n’est pas patient. C’est une sorte de haine qui les anime souvent une fois au passage clouté. Surtout quand ils viennent d’échapper à un long fil d’embouteillages», explique Momar Ndir, un conducteur croisé à une bretelle de sortie de Sacré-Cœur.

Ousmane Ndiaye, conducteur de bus Tata, retrouvé à l’arrêt de la VDN, ajoute : «La passerelle est à quelques mètres ainsi que le passage clouté, mais par fainéantise, ils (piétons) préfèrent traverser où ils veulent nous obligeant à ralentir alors qu’on est pas obligé de s’arrêter. Voilà ce qui provoque les accidents sur cet axe».

Ibrahima Ndiaye, jeune cadre dans une agence de la place, a sa propre solution. Il explique : «Il faut marquer une ligne d’arrêt continue ou semi-continue cinq mètres avant, comme cela se fait dans pratiquement tous les pays du monde pour les passages piétons».

43% des accidents de la route concernent le conflit entre la voiture et le piéton

En tout cas, chaque année, on enregistre plus 100 piétons qui sont tués dans les accidents de la circulation. Les nombreux accidents de la route font perdre au Sénégal, chaque année, 2% de son PIB (Produit intérieur brut). Ce qui équivaut à 100 milliards de francs CFA.

De plus, 600 personnes perdent la vie annuellement du fait des accidents. Et 43% des accidents de la route concernent le conflit entre la voiture et le piéton. L’estimation est du chef de la Division politique et planification à la direction des Transports routiers, Modou Kane Diaw.

Assette BALDE

MATAR FAYE, DIRECTEUR DE LA NOUVELLE PREVENTION ROUTIERE

«Malheureusement, chez nous, les sanctions sont inexistantes…»

Directeur de la Nouvelle prévention routière du Sénégal (NPRS), Matar Faye a reconnu ce non-respect des passages piétons dans la circulation à Dakar. D’ailleurs, il souligne que, chaque année, «c’est une centaine de morts et toujours. Ça se passe souvent sur le passage piéton qui est soi-disant protégé».

«Tout automobiliste qui s’approche de cet espace devra ralentir au besoin, freiné pour laisser passer les piétons. Malheureusement, comme on le voit à Dakar, la plupart des conducteurs quelle que soit la catégorie, en général, dès qu’il arrive au niveau des passages cloutés, ils accélèrent, ce qui n’est pas très courtois. Parce qu’ils ignorent que la route est un espace à passagers», a relevé Matar Faye.

Toutefois, il a souligné qu’il y a des piétons qui sont tués sur ces passages piétons ou sur la chaussée. «Parce que, nul ne peut marcher sur les trottoirs à Dakar qui sont envahis par les marchands ambulants, tabliers et certains fournisseurs qui en font des parkings. N’empêche, avertit-il, il faut aussi que les piétons sachent qu’ils ont des devoirs et ne doivent pas traverser n’importe comment».

«Il y a beaucoup de gens qui pensent que le piéton ne doit traverser que sur les passages piétons, il peut traverser en l’absence de passage piéton en s’assurant que les véhicules sont en arrêt», a tenu à préciser Matar Faye.

Il indique par ailleurs qu’au niveau des passages cloutés, la priorité appartient aux piétons dès l’instant qu’il est engagé. «Très souvent, ce qui se passe, c’est qu’un automobiliste cède le passage à un piéton, mais la voiture de derrière ne comprend pas pourquoi vous vous êtes arrêtés. Elle vous dépasse pour accélérer et généralement la collision est inévitable», a-t-il expliqué.

Ainsi, pour mettre fin à ces accidents qui coûtent la vie à des centaines de personnes, le directeur s’est voulu formel : «Il n’y aura jamais de sécurité routière durable en l’absence de règles répressives rigoureuses. Malheureusement, chez nous, ces sanctions sont inexistantes ou si elles existent elles sont insuffisantes».

Voxpopuli

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